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Comment la transgression dans les Cahiers de Douai mène-t-elle le poète sur le chemin de la liberté ?

Cours : Comment la transgression dans les Cahiers de Douai mène-t-elle le poète sur le chemin de la liberté ?. Recherche parmi 302 000+ dissertations

Par   •  22 Avril 2025  •  Cours  •  1 751 Mots (8 Pages)  •  28 Vues

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Dissertation : Comment la transgression dans les Cahiers de Douai mène-t-elle le poète sur le chemin de la liberté ?

        Pèlerin ivre de lumière et de beauté, Arthur Rimbaud est considéré comme le plus singulier des poètes, dont le texte le plus célèbre le "Dormeur du Val" est rédigé alors qu’il a à peine 16 ans. Conscient de son génie, il cultive la provocation afin de remettre en cause les codes poétiques de l’époque. Il veut les dépasser afin de trouver du nouveau, comme il le stipule dans son recueil une Saison en enfer paru à l’automne 1873 : « il faut être absolument moderne ». Cette perception de la poésie a déjà débuté dans son recueil les Cahiers de Douai publié en 1919, dans lequel Rimbaud s’inspire certes des parnassiens et des symbolistes, mais a la volonté de rompre avec les traditions en créant sa propre écriture poétique parce qu’il est farouchement épris de liberté. Comment la transgression dans les Cahiers de Douai mène-t-elle le poète sur le chemin de la liberté ? On se demandera alors de quelle manière les ruptures dans le recueil et dans l’existence de Rimbaud répondent à son exigence de liberté. Il sera par conséquent nécessaire d’aborder l’âge de l’insouciance de cet adolescent, puis d’étudier les révoltes rimbaldiennes et enfin d’analyser la singulière liberté d’expression de ce poète, dit maudit.

        I/  L’âge de l’insouciance

  1. L’adolescent : Dimension autobiographique du recueil, poèmes écrits entre 1870 et 1871. Par principe, refuse le milieu où il vit, se nourrit d’anticonformisme et d’opposition à l’ordre établi, se révoltant contre l’absurdité de l’existence.
  • C’est le cas de Rimbaud avec l’éducation austère de sa mère, qui le surnommait « bouche d’ombre », car ses premiers écrits ne rapportaient rien.
  • « On n’est pas sérieux quand on a dix-sept ans », "Roman". Ce vers, qui encadre le texte, souligne l’évolution de celui qui n’appartient plus à l’enfance et qui n’a pas encore atteint l’âge adulte. Cet entre-deux facilite l’insouciance et la désinvolture, grâce auxquelles le poète appréhende le monde avec légèreté, à la recherche de l’ivresse, « Dix-sept ans ! - On se laisse griser. »

  1. Les premiers émois amoureux :  
  • Métaphores audacieuses : « Dans un baiser, qui la fit rire D’un bon rire qui voulait bien… », "Première soirée", comme « La sève est du champagne et vous monte à la tête… », "Roman". Les points de suspension invitent à la réflexion et achèvent l’image choquante pour l’époque.
  • Lexique trivial : Rimbaud emploie un vocabulaire vulgaire dans "Au Cabaret-vert", « aux tétons énormes » expansion du nom « fille » et accentue par la forme emphatique de la proposition.  Les intentions de l’adolescent s’avèrent donc limpides.
  • Dépassement des sources d’inspiration : Admirateur des membres du Parnasse auxquels il rend hommage dans "Soleil et chair" où il célèbre la déesse de l’amour Vénus, le poète s’en émancipe grâce à la provocation dans la chute de "Vénus anadyomène". En effet, ce détail sur la « croupe » manifeste l’esthétique de la laideur afin de renverser les codes classiques de la beauté. Rimbaud se moque alors de la tradition lyrique en faisant rimer deux termes antithétiques dans la pointe du texte : « Vénus »/ « anus ».

  1. L’errance :
  • Cassure du rythme du poème : Bouleversement de la syntaxe au sien de "le buffet" : le rythme du second quatrain est cassé à l’aide de coupes qui ne respectent pas les césures à l’hémistiche. De nombreux contre-rejets et enjambements malmènent l’alexandrin en séparant les expansions des noms qu’elles caractérisent. Cela relève de la modernité, mais surtout du plaisir immodéré de Rimbaud de s’affranchir des règles.
  • La fugue : Marque d’une inadaptation au monde, mais volonté également d’indépendance, la fugue fait partie de la constitution du poète. Blaise Cendrars fait de même à 16 ans, assoiffé de liberté et d’aventures. Son long poème "La Prose du Transsibérien et de la petite Jehanne de France" écrit en 1913 est considéré comme pionnier dans la modernité poétique, ses vers saccadés épousant les heurts du train. Dans "Ma Bohème" qui clôt le recueil, Rimbaud explique sa conception de la vie d’artiste inhérente à la vie nomade des bohémiens. Il crée d’ailleurs le néologisme « Robinsonne » dans "Roman" afin d’exprimer son besoin d’aventure. Cette vie est le meilleur chemin selon lui qui conduit à la poésie, « un pied près de mon cœur ! », "Ma Bohème".
  • La nature : Sacralisation de ce « trou de verdure », "le Dormeur du val", temple protecteur au sein duquel le poète fugueur trouve refuge : « Mon auberge était à la Grande-Ourse », "Ma Bohême". Souvent apostrophée comme dans le premier poème cité au vers 11, ou au vers 8 dans le poème "le mal" : il la prend à témoin face à la cruauté des puissants. D’ailleurs, dans ce texte, il lui attribue un rôle sacré, telle la mère de l’humanité, au moyen de l’adverbe modalisateur : « Nature ! ô toi qui fis ces hommes saintement ! ... ».

II/  La révolte

  1. La bourgeoisie :
  • Reproche de l’oisiveté des bourgeois, « Tous les bourgeois poussifs qu’étranglent les chaleurs » dans "A la musique". En effet, ils s’opposent totalement à Rimbaud, jeune, impétueux et marcheur, eux qui restent dans l’immobilisme, étouffés dans leur confort.
  • Il se moque encore dans "Roman", « Sous l’ombre du faux-col effrayant de son père… » : le poète affronte l’austérité du père en le niant grâce à la synecdoque, qui le désigne, façon de prendre le contrepied de la situation.

  1. La guerre :
  • Rimbaud critique l’abus de pouvoir des puissants indifférents à la folie de la guerre notamment dans "Rage de Césars" avec « œil terne » et « l’Empereur est soûl de ses vingt ans d’orgie ! », ou encore « près du Roi qui les raille » dans "le Mal". Il fait également la caricature de Napoléon III en le décrédibilisant au moyen du langage hypocoristique puéril : « raide sur son dada » ou « doux comme un papa », "l’Éclatante victoire de Sarrebrück". Ce titre est une antiphrase car l’armée française a obtenu très facilement la victoire lors de cette bataille. Il est donc ridicule de s’en enorgueillir.
  • En outre, l’adolescent prend la défense du peuple en louant « la crapule » révolutionnaire dans "le Forgeron" ou en peignant les enfants prisonniers de la misère dans "les Effarés". Cet épisode rappelle celui de Gavroche accompagnant des enfants perdus jusqu’à une boulangerie dans les Misérables de Victor Hugo (1862).
  • Enfin, Rimbaud rend hommage aux morts de la Révolution française dans "Morts de Quatre-vingt-douze" tout en glorifiant le combat de ces soldats pour la liberté qu’il aime tant.

  1. La religion :
  • Il décrédibilise également Dieu en le comparant à un nourrisson dans "le Mal", par conséquent impuissant pour secourir les hommes. La dénonciation de la cupidité de l’Église s’avère extrêmement violente puisqu’elle pointe l’hypocrisie de la religion chrétienne, qui fait profit de la misère des hommes crédules. L’émotion de l’auteur s’avère perceptible dans le déséquilibre des alexandrins et des libertés qu’il prend avec la versification, notamment dans la quasi-absence de césures à l’hémistiche. Cette cassure du rythme relève d’une révolte personnelle contre les dogmes, dont les règles traditionnelles de la poésie, mais aussi contre l’étroitesse d’esprit de la société.
  • Cette fracture chez Rimbaud répond par conséquent à la nécessité d’une émancipation créatrice de tout son être. D’ailleurs, il va plus loin dans "le Châtiment de Tartufe", puisqu’il démasque celui-ci pris en flagrant délit de commettre un péché, alors qu’il prône la chasteté. Cette dénonciation se teinte d’ironie, rendant le ton encore plus cinglant.

III/  La liberté d’expression

  1. Le voyant :
  • Lettre du 15 mai 1871 à Paul Demeny, « Le Poète se fait voyant par un long, immense et raisonné dérèglement de tous les sens. Toutes les formes d’amour, de souffrance, de folie ; il cherche en lui-même, il épuise en lui tous les poisons, pour n’en garder que les quintessences. »
  • Visionnaire, il explore des territoires inédits avec les 44 poèmes hallucinés constituant les Illuminations publiées en 1886 : il ne veut pas changer le monde, mais le dire autrement. Apollinaire fait de même avec son poème liminaire "Zone" dans son œuvre Alcools (1913), où il n’y a aucune ponctuation. Rimbaud contribue d’ailleurs au développement du vers libre et malmène la prose en éprouvant la syntaxe par de multiples inversions par exemple. Son poème "Après le Déluge" invite en épilogue à de nouveaux déluges. Ce recueil se lit dans plusieurs pièces comme l’affirmation d’une révolte visant autant le monde social que l’univers des lettres. 
  • « Il est certain aujourd’hui que M. Arthur Rimbaud a fixé la prose de l’avenir » écrit Anatole France, écrivain militant, à l’intérieur du journal quotidien Le Temps le 24 octobre 1886.

  1. Le mouvement : Le poète ne tient pas en place, il s’ennuie vite. Sa vie est caractérisée par le mouvement.
  • Surnom de Verlaine qu’il n’a jamais aussi bien porté : « l’homme aux semelles de vent ».
  • Arrêt de la poésie au bout de quatre années : le mystère Rimbaud se mêle ainsi au mythe. Son ami Ernest Delahaye explique qu’après ses vingt ans, il perd le goût d’écrire et éprouve le besoin de voyager. Ainsi, il accumule sans cesse des allers et retours entre Aden au Yémen et Harar en Ethiopie, parce qu’il s’ennuie.
  1. L’instigateur :
  • Rimbaud inspire des écrivains, tels Antonin Artaud et René Char, qui devient le préfacier du jeune poète. Char transmet un portrait présumé de Rimbaud qui s’inscrit dans une véritable suite où sont traqués tous les visages de Rimbaud à la génération qui lit ses textes aux environs de 1956. Pour Char cependant, il ne s’agit là que d’un point de départ. Il donne, en juin de la même année, un texte intitulé d’abord Sous un portrait d’Arthur Rimbaud, qui deviendra En 1871.
  • Des chanteurs comme Léo Ferré et Jacques Brel puisent dans ses poèmes, tandis qu’outre-Atlantique Rimbaud insuffle ses idées à Jim Morrison qui fait alors de lui le premier artiste rock’n’roll ou encore Patty Smith pour le new wave et Bob Dylan, maître du folk- rock. Ce compositeur interprète intègre dans ses chansons des textes profonds et sensibles mélangés aux accents rock contenus dans la musique : de ce fait, il donne naissance à une nouvelle forme de poésie.

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