Pourquoi enseigner la littérarure

1. Des études littéraires, a-t-on toujours besoin ?

Mouade JEMMOUDI

2ème année au Doctorat Civilisations Francophones et Comparées

Université Hassan II de casablanca

FLSH Ben Msik Casablanca, Maroc

Axes de réflexion : 1- les sciences exactes et les sciences humaines un tout inséparable.

                                  2- pourquoi faut-il enseigner les Lettres.

Au seizième siècle, dans une démarche intégralement humaniste, François Rabelais ne manque pas de souligner l’importance du rapport entre les sciences qui éduquent l’esprit et celles dites exactes. En effet, il affirme que la « science sans conscience n’est que ruine de l’âme »^[1]. Cette phrase aussi célèbre que l’œuvre de l’écrivain, témoigne de la sensibilité et de la sagesse des humanistes. Leur clairvoyance les a guidés à s’interroger sur les questions susceptibles de rendre hommage à la valeur de l’être humain perdue pendant des siècles dans un obscurantisme scolastique aveugle. En effet, l’être humain est cruel lorsqu’il est dépourvu de mœurs et de valeur : l’histoire le confirme. Cette constatation nous oriente vers des questions essentielles à savoir : a-t-on besoin toujours, dans notre contexte actuel, de sciences qui guident nos esprits et qui éduquent nos consciences ? Si la réponse est affirmative, quelles seraient ces sciences ?  Comment procèdent-elles ?    

Dans un ouvrage intitulé vérité et méthode^[2], le philosophe allemand Hans-Georg Gadamer, avance que la séparation des sciences exactes et des sciences dites de l’esprit était le résultat d’une tentative de spécialisation amorcée pendant la Renaissance. Autrement dit, avant cette phase de l’histoire, le savoir constituait une unité inséparable qui permet à l’homme de connaître et de comprendre le monde dans lequel il vit. C’est dans cette optique que la philosophie s’est présentée comme un amour de la sagesse. Les philosophes, et ceci pendant des siècles, incarnaient le savoir avec ses différentes orientations. Aristote, le célèbre philosophe, n’était pas seulement un grand physicien et mathématicien, il a écrit également « la poétique d’Aristote » qui sera une référence dans les études littéraires durant les siècles ultérieurs.

Il est vrai qu’actuellement, dans une ère de spécialisation et pour des raisons académiques, on a tendance à séparer le savoir en ces deux grandes orientations, mais croire que l’une pourrait subsister en dehors de l’existence de l’autre serait une profonde erreur. L’humain n’est pas régi uniquement par la raison (le logos). Qu’en est-il à propos de l’ethos et de l’éros ? Ces trois instances se croisent et s’interfèrent. Il est donc, primordial que l’éducation prenne en considération ces piliers afin d’assurer un enseignement équilibré.

Tout au long de sa quête de l’amélioration et du développement de ses conditions de vie, l’homme a besoin de sciences qui éduquent son âme et guident son esprit. C’est ce qui explique d’ailleurs l’importance des sciences humaines. Celles-ci assurent l’équilibre entre la raison et la passion. Leur présence est une condition sine qua non pour éviter les dérapages et les risques des sciences exactes qui ne croient qu’à la raison. En effet, la recherche relative aux sciences exactes a besoin d’être guidée par l’éthique, sans laquelle on est voué aux désastres et à toute sorte de folies humaines. L’exemple le plus frappant est celui de l’invention des bombes atomiques et des armes chimiques, sans parler des expériences faites sur les animaux.

Dans ce contexte, l’enseignement des Sciences Humaines, et des Lettres en particulier, s’avère crucial. En effet, enseigner les Lettres donne aux futures générations les repères éthiques nécessaires dans un monde dont les valeurs se dégradent jour après jour. On peut penser, par exemple, d’une part, à la tragédie qui vise à épurer les mœurs de la société, et d’autre part, à la comédie qui corrige les vices de l’individu. Toutes les deux jouent un rôle essentiel dans l’éducation et la formation de l'homme du siècle actuel et dont la société a besoin. Le mensonge, l’hypocrisie, et la corruption sont autant de tares qui ravagent notre société et que l’enseignement des Lettres pourra évincer.

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