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La Traduction

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Par   •  21 Avril 2013  •  Dissertation  •  1 226 Mots (5 Pages)  •  1 039 Vues

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Traduire, qu’est-ce-à dire ?

Christian BALLIU

ISTI – Haute Ecole de Bruxelles

ISIT, Paris

Depuis les années 1950, la traduction a fait l’objet d’une réflexion ordonnée et s’est érigée en discipline indépendante de la linguistique. On pourrait croire ingénument qu’en se libérant du verrou linguistique qui l’emprisonnait, la traductologie allait quitter les sables mouvants de la linguistique contrastive pour s’installer véritablement au carrefour de disciplines annexes, comme la sociolinguistique ou les sciences cognitives, aujourd’hui à la mode.

En réalité, force est de constater que l’enseignement de la traduction est encore complètement inféodé à une structuration et à une philosophie linguistiques, dont la matérialisation est le texte à traduire. Et les sempiternelles questions sur la fidélité en matière de traduction, la traditionnelle opposition entre sourciers et ciblistes, ne prennent pas en compte les réalités du marché et ce partenaire privilégié qu’est le client. C’est ainsi que le marché, mot tabou s’il en est dans les études de traductologie, est rarement invoqué, y compris lorsqu’il s’agit de déontologie.

Qu’on le veuille ou non, c’est le client qui s’érige souvent en dépositaire unique de la traduction et ses préoccupations vont bien au-delà des seules considérations linguistiques pour réussir l’acte de communication. L’histoire de la traduction conforte d’ailleurs cette assertion.

Ma toute première expérience de traducteur indépendant, dans le domaine médical, fut à la fois traumatisante et salutaire. J’avais littéralement léché ma traduction, en étais assez fier tout en craignant le verdict implacable de mon premier client. Celui-ci me reçut en me disant que j’avais un beau style, mais que ma traduction ne convenait pas, sans doute – me disait-il « par péché de jeunesse ». Lorsque je lui demandai la raison de sa désapprobation – que je considérais en réalité comme un désaveu de mes qualités mais aussi de la formation que j’avais reçue dans mon école -, il m’indiqua que ma traduction était mauvaise car il n’y retrouvait pas les mots de l’original. Voilà un exemple très concret de ce que j’appelle l’emprise du linguistique sur l’acte traduisant. La scène se passe à la fin des années 1970, époque à laquelle un Ladmiral luttait déjà contre cette forme d’enseignement de la traduction au sein de l’université française. On pourrait croire naïvement que les temps ont changé ; il n’en est rien. Le pire est que cette conception est aussi encore plus largement répandue qu’on ne pourrait le croire dans les écoles de traduction.

Il y a donc dans certains cas, et c’est ma deuxième observation, une pédagogie du marché à mettre en place, le fait étant que nombre de dirigeants de bureaux de traduction ne sont souvent pas traducteurs eux-mêmes ; la traduction est un produit comme un autre, que l’on achète et que l’on vend. Et c’est à nous, traducteurs, qu’il incombe d’instaurer cette pédagogie en discutant, en négociant, avec le patron, pour lui montrer la valeur ajoutée d’une vraie équivalence entre textes, qui est en définitive culturelle, sociologique, plutôt que linguistique. Je rappelle souvent à ce propos que les plus grands traductologues, et même de très grands linguistes, ne sont pas issus du sérail de la linguistique, mais de disciplines en apparence très éloignées, comme la médecine, la chimie (Whorf), l’anthropologie (Nida) ou même l’arachnologie (Savory). Je dis en apparence, car en fait, quand on a compris que l’enjeu, ce n’est pas ce que le texte dit, ni même – malgré les sirènes de la théorie du sens – ce que le texte veut dire, mais ce que le texte fait, alors l’idée apparaît nettement moins saugrenue qu’on en l’aurait pensé au départ.

D’autres clients comprennent en revanche très bien et commandent par exemple des traductions résumées (ce dont on ne s’occupe guère, et à tort, dans les écoles) et une partie du texte est ainsi

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