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Rousseau, Du Contrat social, Livre III, Chapitre 6

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Par   •  24 Mars 2023  •  Commentaire de texte  •  3 511 Mots (15 Pages)  •  418 Vues

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Quand l'essai et la fable s'attaquent au pouvoir

Rousseau, Du Contrat social, Livre III, Chapitre 6,

« Il est plus aisé de conquérir que de régir »

Proposition de corrigé

INTRODUCTION :

La contestation du régime monarchique est un thème récurrent de la philosophie des Lumières. Elle s'inscrit dans un large courant de remise en question des institutions au nom de la légitimité, de la raison et des garanties que les philosophes voudraient voir accorder aux gouvernés. Déjà largement ouverte par Montesquieu à travers la double critique du monarque (Louis XIV dans les Lettres persanes) et de la monarchie (De l'esprit des lois), cette contestation est reprise par Diderot dans l'Encyclopédie (article « Autorité politique ») et par Rousseau dans le Contrat social. L'extrait donné ici dénonce méthodiquement les tares d'un régime présenté en constant parallèle avec l'État républicain : Rousseau attaque sa mise en place, son fonctionnement, la manière dont il se perpétue héréditairement. Le ton est à la fois rhétorique et passionné, comme celui d'un discours persuasif qui joue habilement sur une forme recherchée et très construite pour faire passer un message dont tous les arguments ne sont pas justifiés avec rigueur.

I. Un texte apparemment fait pour convaincre

La critique se fait en quatre étapes, de manière très méthodique : Rousseau dénonce successivement le choix des hommes, le mode de fonctionnement, la continuité du régime monarchique et son caractère héréditaire, qui lui semble inacceptable et injustifiable. Cette critique se fait en constante comparaison avec le gouvernement républicain, ce qui se marque par un jeu rhétorique systématique sur les oppositions et les parallélismes.

1. Une structure claire et logique

Chaque paragraphe correspond donc à un thème précis, comme le montrent clairement les réseaux lexicaux qui les caractérisent.

 Le premier problème abordé est celui des hommes qui se trouvent dans les sphères les plus élevées du pouvoir (« élève aux grandes places » , l. 2, « ceux qui parviennent dans les monarchies », 1. 3) et qui, selon Rousseau, y ont accédé par intrigue. La récurrence du verbe « parvenir » (l. 3, 5 et 6) insiste particulièrement sur la notion d'accession aux places importantes, avec une connotation nettement dépréciative. On relèvera également les expressions « à la tête d’un gouvernement » (l. 7) ou « prend le timon des affaires » (l. 9/10). La notion de choix domine le premier paragraphe (« ce choix », 1. 6).

 Le deuxième paragraphe est consacré à la relation entre celui qui gouverne et le pays qui est gouverné à travers l'idée d'un équilibre nécessaire, mais jamais réalisé quand il s'agit d'une monarchie. On observe tout un jeu sur les adjectifs « grand » (l. 14) et « petit » (1. 14, 15), et plus généralement le lexique de la mesure et de l’adaptation : « sa grandeur et son étendue » (l. 11), la « grandeur » (l. 16), s’étendît ou se resserrât » (l. 18), « selon la portée du prince » (l. 18), « des mesures plus fixes », « des bornes constantes » (l. 19).

On remarque également l’abondance d’expressions renvoyant à la personne du roi, couplées à d’autres renvoyant à la notion d’État : « celui qui gouverne » (l. 12), « le prince » (l. 13 et 18), « son chef » (l. 14), repris à la même ligne par « le chef ». C’est donc bien sur lui que portera principalement l’argumentation, et sur son inadaptation à représenter à lui seul un « État » (l. 11, 14, 19), un « royaume » (l.18), « des peuples » (l. 16). Le « fonctionnement » et l'exercice du pouvoir sont abordés ici à travers l'idée non seulement d'une adaptation (« fût mesurée aux facultés de celui qui gouverne... », 1. 11/12) mais aussi d'une stabilité que seules peuvent offrir des institutions républicaines (allusion au « sénat », 1. 19).

 Dans l'ordre chronologique des choses, l'étape suivante est celle de la continuité du pouvoir lors de la mort de celui qui gouverne (« Un roi mort, il en faut un autre... », 1. 23). Une fois encore, le vocabulaire utilisé ne laisse pas de doute sur le thème abordé : « le défaut de cette succession continuelle » (l. 21), « une liaison non-interrompue » (l. 22), « des intervalles dangereux » (l. 23), les « interrègnes » l. 27). Rousseau analyse donc les difficultés de succession et les problèmes qui se posent dans les périodes d'interrègne, comme « la brigue et la corruption » (l. 24).

 La monarchie héréditaire : le dernier paragraphe est dans la suite logique (et non chronologique) du précédent. Il précise quelle a été la solution apportée au problème de la succession monarchique : l'institution d'un caractère « héréditaire », « un ordre de succession » qui peut conduire la monarchie entre les mains d'incapables, d'irresponsables ou de malades ! Une fois encore, le lexique renseigne le lecteur sur la manière dont Rousseau aborde cette question : le paragraphe précédent faisait le point sur les dangers des élections aboutissant à la désignation d’un nouveau roi, celui-ci évaluera les « risques » de la transmission héréditaire du pouvoir. Le terme, présent sous sa forme nominale à la ligne 33, apparaît également sous sa forme verbale « risquer » à la ligne 31, et l’idée est reprise dans l’expression « toutes les chances contre soi » (l. 33). Le texte se termine par une très brève anecdote soulignant le poids de l'hérédité monarchique à travers un exemple emprunté à l'Antiquité.

Si la dénonciation porte sur un point différent dans chaque paragraphe, on retrouve cependant toujours une comparaison avec le gouvernement républicain.

2. Mise en évidence d’une méthode d’argumentation fondée sur la comparaison

• Les signes de la comparaison : ils sont très nombreux dans chaque étape de la dénonciation. On peut tout d'abord repérer ce qui souligne une relation de supériorité ou d'infériorité par le jeu des locutions ou des comparatifs : « au-dessous du » (l. 1), « bien moins…que » (l. 6), « aussi rare » (l.7), « mesures plus fixes » (l. 19), « pas moins bien » (1. 20), « Le plus sensible » (l. 21), « pire que » (l. 27), « on a préféré » (1. 30), « on a mieux aimé » (l. 31). On peut remarquer

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