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La chevelure, Maupassant

Commentaire de texte : La chevelure, Maupassant. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  13 Décembre 2023  •  Commentaire de texte  •  4 553 Mots (19 Pages)  •  247 Vues

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La Chevelure, est une nouvelle fantastique écrite par Guy de Maupassant, auteur  réaliste du 19-ème, publiée pour la première fois en 1884.  Elle fait partie de son recueil de nouvelles intitulé "Le Horla et autres contes fantastiques".

Le récit se déroule tout d’abord dans un asile, on y retrouve un personnage décrit comme fou ; « aux joues creuses et aux cheveux presque blancs ». C’est un récit à focalisation double , le narrateur de rang 1 rencontre le docteur du patient, ce dernier, lui présentera son journal intime. Dans ce journal, « le fou » y conte sa vie, de jeune homme de 32 ans, qui semble tout à fait ordinaire, en premier lieu. On comprend que celui-ci est un jeune collectionneur d’objets anciens, qui se plait à imaginer la vie passée des objets menée avec leurs anciens propriétaires. Un jour, le narrateur de rang 2, se rendit chez un marchand d’antiquité, pour trouver le nouvel objet qui agrandira sa collection. Chez l’apothicaire, il aperçut, un meuble ancien du 17-ème siècle, (décrit comme un secrétaire). Ce fut une rencontre troublante entre lui et le meuble italien, comme une sorte d’Innamoramento entre l’homme et l’objet . C’est pourquoi, il se résolut, après de brèves hésitations, à acheter le meuble. Il le place dans la pièce la plus intime de sa maison : sa chambre. Il effectue par la suite, une profonde analyse du secrétaire, il le scrute, il le caresse dans ses moindres recoins, et ce durant huit jours. Il trouva dans une cachette secrète, une longue et mystérieuse chevelure de femme tressée. Dès qu'il la possède, il est hanté par le désir constant de la toucher, de la caresser et même de l'embrasser

Quand je rentrai chez moi, j'éprouvai un irrésistible désir de revoir mon étrange trouvaille; et je

la repris, et je sentis, en la touchant, un long frisson qui me courut dans les membres.

 Durant quelques jours, il fallait que je la visse et que je la maniasse. Je tournais la clef de

l'armoire avec ce frémissement qu'on a en ouvrant la porte de la bien-aimée, car j'avais aux mains

et au cœur un besoin confus, singulier, continu, sensuel de tremper mes doigts dans ce ruisseau

charmant de cheveux morts.

 Puis, quand j'avais fini de la caresser, quand j'avais refermé le meuble, je la sentais là toujours,

comme si elle eût été un être vivant, caché, prisonnier; je la sentais et je la désirais encore ; j'avais

de nouveau le besoin impérieux de la reprendre, de la palper, de m'énerver jusqu'au malaise par ce

contact froid, glissant, irritant, affolant, délicieux.

 Je vécus ainsi un mois ou deux, je ne sais plus. Elle m'obsédait, me hantait. J'étais heureux et

torturé, comme dans une attente d'amour, comme après les aveux qui précèdent l'étreinte.

 Je m'enfermais seul avec elle pour la sentir sur ma peau, pour enfoncer mes lèvres dedans, pour la

baiser, la mordre. Je l'enroulais autour de mon visage, je la buvais, je noyais mes yeux dans son

onde dorée afin de voir le jour blond, à travers.

 Je l'aimais ! Oui, je l'aimais. Je ne pouvais plus me passer d'elle, ni rester une heure sans la revoir.

 Et j'attendais...j'attendais...quoi ? Je ne le savais pas ? - Elle.

 Une nuit je me réveillai brusquement avec la pensée que je ne me trouvais pas seul dans ma

chambre.

 J'étais seul pourtant. Mais je ne pus me rendormir ; et comme je m'agitais dans une fièvre

d'insomnie, je me levai pour aller toucher la chevelure. Elle me parut plus douce que de coutume,

plus animée. Les morts reviennent-ils ? Les baisers dont je la réchauffais me faisaient défaillir de

bonheur ; et je l'emportai dans mon lit, et je me couchai, en la pressant sur mes lèvres, comme une

maîtresse qu'on va posséder.

 Les morts reviennent ! Elle est venue. Oui, je l'ai vue, je l'ai tenue, je l'ai eue, telle qu'elle était

vivante autrefois, grande, blonde, grasse, les seins froids, la hanche en forme de lyre; et j'ai

parcouru de mes caresses cette ligne ondulante et divine qui va de la gorge aux pieds en suivant

toutes les courbes de la chair.

 Oui, je l'ai eue, tous les jours, toutes les nuits. Elle est revenue, la Morte, la belle morte,

l'Adorable, la Mystérieuse, l'Inconnue, toutes les nuits.

Mon bonheur fut si grand, que je ne l'ai pu cacher. J'éprouvais près d'elle un ravissement

surhumain, la joie profonde, inexplicable, de posséder l'Insaisissable, l'Invisible, la Morte ! Nul

amant ne goûta des jouissances plus ardentes, plus terribles !

 Je n'ai point su cacher mon bonheur. Je l'aimais si fort que je n'ai plus voulu la quitter. Je l'ai

emportée avec moi toujours, partout. Je l'ai promenée par la ville comme ma femme, et conduite

au théâtre en des loges grillées, comme ma maîtresse...

 Mais on l'a vue ... on a deviné ... on me l'a prise ... Et on m'a jeté dans une prison, comme un

malfaiteur. On l'a prise ... oh ! Misère !...

 Le manuscrit s'arrêtait là. Et soudain, comme je relevais sur le médecin des yeux effarés, un cri

épouvantable, un hurlement de fureur impuissante et de désir exaspéré s'éleva dans l'asile.

 "Ecoutez-le, dit le docteur. Il faut doucher cinq fois par jour ce fou obscène. Il n'y a pas que le

sergent Bertrand qui ait aimé les mortes."

 Je balbutiai, ému d'étonnement, d'horreur et de pitié:

 "Mais... cette chevelure... existe-t-elle réellement ?"

 Le médecin se leva, ouvrit une armoire pleine de fioles et d'instruments et il me jeta, à travers son

cabinet, une longue fusée de cheveux blonds qui vola vers moi comme un oiseau d'or.

 Je frémis en sentant sur mes mains son toucher caressant et léger. Et je restai le cœur battant de

dégoût et d'envie, de dégoût comme au contact des objets traînés dans les crimes, d'envie comme

devant la tentation d'une chose infâme et mystérieuse.

 Le médecin reprit en haussant les épaules :

 "L'esprit de l'homme est capable de tout." »

Caractérisation du passage : l’extrait soumis à notre étude, est un monologue intérieur, une analepse du collectionneur, à travers l’utilisation de la première personne du singulier marquant la subjectivité du récit, dans un registre fantastique. On explore la frontière entre le réel et le surnaturel sous le prisme d’une fétichisation morbide d’une partie du corps féminin Dans cet extrait de "La Chevelure" de Guy de Maupassant, le narrateur relate sa découverte et son obsession pour une chevelure mystérieuse. Dès son retour chez lui, le narrateur ressent un désir irrésistible de revoir cette trouvaille particulière, une chevelure trouvée dans une vieille armoire.

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