Commentaire La Reine Margot Dumas Pourchasse de La Mole 1ere Parcours Les romans de l'énergie
Commentaire de texte : Commentaire La Reine Margot Dumas Pourchasse de La Mole 1ere Parcours Les romans de l'énergie. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar fs546 • 11 Mars 2024 • Commentaire de texte • 2 924 Mots (12 Pages) • 179 Vues
Texte 5 : Energie instinctive
Coconnas, La Hurière et dix soldats s’élancèrent à la poursuite de La Mole, qui, couvert de sang et arrivé à ce degré d’exaltation qui est la dernière réserve de la vigueur humaine, bondissait par les rues, sans autre guide que l’instinct. Derrière lui, les pas et les cris de ses ennemis l’éperonnaient et semblaient lui donner des ailes. Parfois une balle sifflait à son oreille et imprimait tout à coup à sa course, près de se ralentir, une nouvelle rapidité. Ce n’était plus une respiration, ce n’était plus une haleine qui sortait de sa poitrine, mais un râle sourd, mais un rauque hurlement. La sueur et le sang dégouttaient de ses cheveux et coulaient confondus sur son visage.
Bientôt son pourpoint devint trop serré pour les battements de son cœur, et il l’arracha. Bientôt son épée devint trop lourde pour sa main, et il la jeta loin de lui. Parfois il lui semblait que les pas s’éloignaient et qu’il était près d’échapper à ses bourreaux ; mais aux cris de ceux-ci, d’autres massacreurs qui se trouvaient sur son chemin et plus rapprochés quittaient leur besogne sanglante et accouraient. Tout à coup il aperçut la rivière coulant silencieusement à sa gauche ; il lui sembla qu’il éprouverait, comme le cerf aux abois, un indicible plaisir à s’y précipiter, et la force suprême de la raison put seule le retenir. À sa droite c’était le Louvre, sombre, immobile, mais plein de bruits sourds et sinistres. Sur le pont-levis entraient et sortaient des casques, des cuirasses, qui renvoyaient en froids éclairs les rayons de la lune. La Mole songea au roi de Navarre comme il avait songé à Coligny : c’étaient ses deux seuls protecteurs. Il réunit toutes ses forces, regarda le ciel en faisant tout bas le vœu d’abjurer s’il échappait au massacre, fit perdre par un détour une trentaine de pas à la meute qui le poursuivait, piqua droit vers le Louvre, s’élança sur le pont pêle-mêle avec les soldats, reçut un nouveau coup de poignard, qui glissa le long des côtes, et, malgré les cris de : « Tue ! tue ! » qui retentissaient derrière lui et autour de lui, malgré l’attitude offensive que prenaient les sentinelles, il se précipita comme une flèche dans la cour, bondit jusqu’au vestibule, franchit l’escalier, monta deux étages, reconnut une porte et s’y appuya en frappant des pieds et des mains.
— Qui est là ? murmura une voix de femme.
— Oh ! mon Dieu ! mon Dieu ! murmura La Mole, ils viennent… je les entends… les voilà ! … je les vois… C’est moi ! … moi ! …
Extrait du chapitre VIII de La Reine Margot, Alexandre DUMAS (1845)
24 août 1572 - La nuit du massacre de la Saint-Barthélemy se poursuit. Les protestants ont été pris sur le vif et font tout leur possible pour se défendre. Les catholiques, Coconnas, La Hurière, l’aubergiste, et des soldats fidèles au roi Charles IX sillonnent les rues et repèrent à nouveau de La Mole.
Intro : Alexandre Dumas (1802-1870) ; roman historique (de cape et d’épée, intrigues politiques, camaraderie, combats flamboyants) XVIe Royaume de France, événement conflit de religion, nuit de la Saint-Barthélemy (24-27 août 1572)
Contexte
Le massacre a débuté, et tous les catholiques arpentent les rues pour éliminer les protestants. La Mole, un protestant, avait réussi à s’échapper de ses bourreaux mais est vite repéré à nouveau. Dans ce passage, les personnages Coconnas, La Hurière et dix soldats poursuivent La Mole dans les rues de Paris. Il est déjà couvert de sang et court à toute allure, essayant d'échapper à ses assaillants. Il arrive finalement au Louvre, en quête de protection auprès de la Reine Margot. Le passage montre l'intensité de la poursuite, l'épuisement physique et émotionnel de La Mole, et sa forte volonté de survivre. Le texte dépeint une scène d'intense énergie physique et émotionnelle.
PBIQ Dans quelle mesure le danger peut-il être la source d’un déploiement d’énergie extraordinaire ? En quoi l’énergie instinctive permet-elle un dépassement de ses limites corporelles et physiologique ?
Développement
- L1-8 – La course effrénée – La Mole, une bête traquée – Chasse aux protestants
_ L1-3 La Mole est en fuite. Il est poursuivi par une horde de catholiques qui veulent l’assassiner. Les catholiques sont empreints d’une énergie destructrice. La Mole est mal en point, il est lui aussi animé par une énergie, plus instinctive, généré par le chaos et le danger pressant : il « bondissait par les rues » (L3) à l’image d’un lièvre traqué par des chasseurs. Les groupe participiaux « couvert de sang » et « arrivé à ce degré d’exaltation » suivi de la relative « qui est la dernière réserve de la vigueur humaine » rendent compte de sa terreur. Cette peur génère en lui une formidable énergie, sorte d’instinct de survie l’obligeant à s’activer fortement. La Mole n’est guidé que par son instinct ; il n’est plus maître de ses pensées et se laisse aller à des agissements purement instinctifs : rester en vie, fuir, le plus vite possible.
_ L3-4 Nous pouvons remarquer un jeu de balancement dans l’écriture, entre les assaillants et l’assailli. Les chasseurs talonnent La Mole, le verbe « éperonnaient » animalise une fois de plus le protestant, comme dans la comparaison qui suit. En effet, La Mole a tellement peur et fuse tellement vite que cela « semblait lui donner des ailes ».
_ L4-5 Le sens de l’ouïe est fortement sollicité depuis le début. La Mole est sans cesse en alerte, après « les pas et les cris », c’est « Parfois une balle » qui « sifflait à son oreille ». L’univers sonore de la scène marque le protestant, et impacte sa course. La locution adverbiale « tout à coup » et le GN « une nouvelle rapidité » témoignent de l’intensité de l’action.
_ L5-7 Cette phrase comporte deux parallélismes syntaxiques précisant l’effet de cette course effrénée sur La Mole : « Ce n’était plus +GN » puis « mais +GN ». Ces deux parallélismes s’organisent autour d’une subordonnée relative : « qui sortait de sa poitrine ». Dumas veut montrer à quoi ressemble la respiration du protestant à ce moment ; et l’animalise encore plus par la même occasion. Nous pouvons repérer un chiasme grammatical dans le deuxième parallélisme : « nom +adj » puis « adj + nom », auquel ajoute une antithèse entre les mots « sourd » et « hurlement ». Nous remarquons bien que La Mole est au bout de ses forces, nous l’imaginons peinant dans sa fuite.
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