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Carnet de lecture, La Douleur, Duras

Fiche de lecture : Carnet de lecture, La Douleur, Duras. Recherche parmi 299 000+ dissertations

Par   •  11 Septembre 2024  •  Fiche de lecture  •  3 753 Mots (16 Pages)  •  6 Vues

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1)

J’ai encore besoin de la place vide pour le supplice.

Ce passage se situe au début du livre, à la suite d’une conversation avec D, à la fin de laquelle Marguerite lui demande de la laisser seule. Ce passage renvoie à la place qu’occupe la douleur dans la vie de l’auteure. On comprend que si cette douleur, avant tout morale, occupe une place dans son esprit, l’envahit, elle lui demande également de l’espace physique. La douleur occupe tout, et se répand dans toute place « vide », physique ou morale. Dans ce passage on sent que la douleur ressentie est forte au point de la voir se matérialiser. Cette douleur est dans tous les aspects de la vie de Marguerite, d’autant plus que l’adverbe « encore » semble vouloir montrer que cet abandon à la douleur est fréquent, habituel. L’intensité de cette douleur n’est pas laissée au hasard. Le fait d’utiliser le mot « supplice » laisse entrevoir la manière dont Marguerite conçoit ces moments, comme une torture. Quand j’ai lu ce passage, j’ai ressenti une grande solitude, j’ai eu la sensation de comprendre, de voir cet espace vide autour de moi se remplir de douleur. J’ai senti comme Marguerite se sentait seule face à cette douleur, qu’elle avait presque une dimension cathartique. La douleur semble se propager et Marguerite qui s’y abandonne. D’autre part la douleur, le « supplice » est ici un « besoin », ce qui peut paraitre assez paradoxal ; si Marguerite subit la douleur, elle a besoin de la sentir.

Je m’endors près de lui tous les soirs, dans le fossé noir, près de lui mort.

Ce passage m’a étonnée. J’ai eu la sensation d’être piégée par l’auteure. Au début de la phrase, elle semble être positive ; on comprend que Marguerite a du mal à dormir et cette affirmation parait être presque une bonne nouvelle. Marguerite évoque alors son mari ; « près de lui » , cette « présence » m’a d’abord paru comme une forme de soutien, une idée qu’ils n’étaient pas vraiment séparés, comme une sorte de message d’espoir. La première partie de la phrase est assez douce, sortie de tout contexte, il s’agit d’une banale phrase qui souligne un lien entre deux personnes. Cependant, on comprend bien ici une connotation triste, une sensation de manque, presque une dépendance. Par la suite Marguerite évoque, encore, l’image du fossé noir, omniprésente dans l’histoire et pur fruit de son imagination (elle n’a reçu aucune nouvelle lui disant que Robert L avait été fusillé et jeté dans un fossé). L’image douce d’un couple lié s’endormant ensemble est alors brisée. C’est dans le fossé noir que Marguerite s’endort, obsédée par cette image, elle partage cette souffrance. La phrase prend alors une tournure lugubre, complétée par la dernière partie qui parait presque être une chute. Marguerite répète l’expression « près de lui » mais cette fois la complète par l’adjectif « mort ». Le mot termine la phrase, comme pour marquer une finalité. Peut-être que mon interprétation est exagérée, mais dans les différentes étapes de la phrase, j’ai vu différents états d’esprit par lesquels est passée Marguerite. Tout d’abord l’image d’un couple heureux, une forme d’espoir puis l’image du fossé, de la souffrance, de la séparation et enfin celle de la mort.

Mme Kats défie Dieu.

J’ai choisi de ne citer que cette phrase, mais c’est tout le passage qui m’a émue. Dans ce passage Marguerite raconte que Mme Kats vit maintenant avec elle, en attendant que sa fille déportée revienne. Alors, en tant que lecteur ayant connaissance de la Seconde guerre mondiale, on comprend que la fille de Mme Kats ne peut être vivante, qu’elle a sûrement été tuée dès son arrivée dans un camp, étant infirme. Cependant une longue citation d’une conversation fait comprendre que Mme Kats attend encore sa fille, qu’elle a tout préparé pour son retour. En tant que lecteur, j’ai trouvé ce passage absolument désespérant, j’ai cru pouvoir comprendre cette douleur de perdre un enfant, mais de ne pas l’accepter, j’ai ressenti une forme de détresse face à l’attitude de cette mère. On comprend que son enfant est morte, elle en a été informée mais elle ne peut pas accepter une telle chose. Au cours de ce récit et de la conversation, Marguerite ne prend pas place, elle semble presque se relayer au rang de narrateur. Mais cette dernière phrase montre qu’elle a compris. Une forme d’admiration émane de cette phrase mais surtout de la compassion et de la peine. Si Mme Kats défie Dieu, c’est qu’elle défie la réalité, continue de préparer un retour impossible de sa fille. Cette simple phrase fait ressentir la profondeur de la douleur de Mme Kats qui en arrive à défier une réalité évidente.

Dans un sourire, c’est sans douleur, elles disent.

J’ai choisi cette citation, mais c’est encore une fois tout le passage qui m’a émue. Il s’agit du récit de l’extermination juive à travers les yeux de spectatrice de Marguerite. Ce que j’ai trouvé frappant c’est la volonté d’un discours neutre, d’éviter toutes expression de sentiment. Dans un premier temps le récit de ces femmes tuant des bébés en souriant m’a réellement horrifiée, et le style neutre de l’auteure m’a quelque peu étonnée. Face à une telle horreur, on a du mal à imaginer cette héroïne sensible rester neutre. Mais j’ai fini par trouver que ce style neutre apporté plus qu’il n’enlevait au récit. Le fait de laisser ce récit neutre des sentiments des sentiments de l’auteure, mets le lecteur face à une réalité. Les faits parlent plus qu’une expression excessive des impressions d’un narrateur qui n’est que spectateur.

  1. Comprenez-vous pourquoi ce texte épouvante Marguerite Duras ?

Marguerite Duras évoque une relation paradoxale avec son propre texte. D’une part elle dit être            épouvantée par son texte, ce qui peut paraître étrange étant donné que c’est elle qui l’a écrit, si l’on peut être effrayé par l’inconnu, il parait inhabituel d’être effrayée par soi, son œuvre, son travail. Cependant ce texte est le témoin d’une période sombre de sa vie durant laquelle elle a souffert, ce qui peut expliquer l’épouvante que lui inspire La Douleur.

Ce texte constitue une preuve irréfutable de la douleur endurée, une attestation que cette période a existée. Dans le texte on perçoit la profondeur de cette douleur, l’emprise qu’elle a eue sur la narratrice. L’état de souffrance dans lequel se trouvait Marguerite se fait ressentir par la description de son quotidien. Lorsqu’elle explique crier à multiple reprise, le lecteur comprends que cette douleur est inexprimable, qu’elle l’habite au point de ne pouvoir l’extérioriser que par des cris, sans autres signification que la souffrance de la narratrice, qui n’expriment rien d’autre.

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