« Toute présence végétale agissait sur elle comme un antidote» écrit Colette à propos de sa mère adorée dans Sido. La célébration du monde dans la littérature peut-elle aussi agir comme un antidote ?
Dissertation : « Toute présence végétale agissait sur elle comme un antidote» écrit Colette à propos de sa mère adorée dans Sido. La célébration du monde dans la littérature peut-elle aussi agir comme un antidote ?. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar tmm.G • 14 Décembre 2023 • Dissertation • 1 809 Mots (8 Pages) • 674 Vues
« Toute présence végétale agissait sur elle comme un antidote» écrit Colette à propos de sa mère adorée dans Sido. La célébration du monde dans la littérature peut-elle aussi agir comme un antidote ?
Colette publie en 1908 un recueil de récits intitulé Les Vrilles de la vigne, écrits souvent intimistes qui reflètent sa vie agitée après l’échec de son mariage. En 1930, elle livre un récit autobiographique, Sido, dans lequel elle se penche sur son enfance en rendant hommage à la figure marquante de sa mère. Ces deux œuvres ont pour point commun d’exprimer une célébration du monde qui prend sa source dans le rapport si particulier de sa mère à la nature : « toute présence végétale agissait sur elle comme un antidote ». Colette a bien besoin aussi d’un antidote, c’est-à-dire d’un remède qui la soigne, qui l’apaise. L’écriture semble jouer ce rôle. Mais comment la littérature peut-elle agir comme un antidote ? Voyons d’abord comment Colette célèbre le monde dans ces deux textes, pour ensuite comprendre quel antidote cela lui offre à elle, mais aussi aux lecteurs.
Ainsi Colette célèbre-t-elle le monde à travers ses œuvres. D’abord, un roman faisant l’hommage des êtres vivants, c’est ce que propose l’auteur dans « Les vrilles de la vigne ». Il prend pour figure principale le rossignol, un oiseau connu pour son chant mélodieux, faisant l’usage de son instrument le soir, accompagné de ses camarades et hannetons : « Autrefois, le rossignol ne chantait pas la nuit », « Il se levait avec les camarades, dans l’aube grise et bleue, et leur éveil effarouché secouait les hannetons endormis à l’envers des feuilles de lilas ». Cependant, lors d’une nuit où il dormait, les vrilles de la vigne l’ont pris pour captif : « les vrilles de la vigne poussèrent si dru, cette nuit-là, que le rossignol s’éveilla ligoté, les pattes empêtrées de liens fourchus, les ailes impuissantes… ». Depuis ce jour, le rossignol, têtu et résistant, décide de s’opposer à la vigne : « De tout le printemps se jura de ne plus dormir, tant que les vrilles de la vigne pousseraient ». Il fait l’usage de sa voix qu’il utilise comme une arme pour lutter contre un sommeil heureux et trompeur : « dès la nuit suivante, il chanta, pour se tenir éveillé : Tant que la vigne pousse, pousse, pousse… Je ne dormirai plus ! ». Ce rossignol évoque un symbole de liberté qui ne craint pas d’exprimer à haute voix toute forme d’injustice : « J’ai vu chanter un rossignol sous la lune, un rossignol libre et qui ne se savait pas épié ».
Ainsi, la célébration du monde passe également par l’hommage aux êtres vivants. Aussi, l’éloge de la nature passe par la personnification d’un rossignol : J’ai vu chanter un rossignol sous la lune» ; en effet Colette fait l’éloge de la nature en passant par le rossignol qui illumine c’est nuit en lui chantant, de plus les éléments de la nature tel que les hannetons, les feuilles de lilas, les vignes en fleurs, l'odeur du réséda et l'acidité d'oseille fraîche. Ces descriptions sont souvent empreintes d'une certaine poésie et d'une beauté naturelle qui soulignent la richesse et la diversité de la nature. On peut également noter la personnification des vrilles de la vigne, qui prennent vie et deviennent presque des personnages à part entière dans l'histoire, renforçant ainsi l'idée que la nature est vivante et pleine de surprises
Enfin dans Les Vrilles de la Vigne, Colette exprime sa fascination pour la beauté de chaque instant du quotidien, même les plus simples et apparemment insignifiants. Ainsi, à travers ses descriptions minutieuses de la nature et de la vie quotidienne dans la campagne française, Colette nous invite à prendre le temps d'apprécier la beauté qui nous entoure. Par exemple, lorsqu'elle décrit la récolte des raisins, elle ne se contente pas de décrire le processus, mais elle le fait avec une attention particulière aux détails, comme la couleur des raisins mûrs, leur texture sous les doigts, et l'odeur sucrée qui se dégage de la vendange. Colette nous montre ainsi que même dans les tâches les plus banales, il y a de la beauté à apprécier si nous prenons le temps de la découvrir. Pour elle, célébrer le monde, c'est donc prendre le temps de contempler et de savourer chaque instant de la vie, en étant conscient de la beauté et de la magie qui se cachent derrière les choses les plus simples. Ainsi, si Colette célèbre bien le monde, elle utilise ce petit monde d’elle pour en faire un véritable remède.
En effet, l’autrice use de l’écriture comme d’un véritable antidote contre ses propres angoisses. D’abord, Colette sublime ses épreuves personnelles par l’art. En fait, sa jeunesse fut une épreuve compliquée, elle l’émet dans les vrilles de la vigne : toute seule éveillée dans la nuit Cependant les épreuves de sa vie ne sont point des contraintes, car elle l’accepte et le glorifie : elle [Kiki] se délecte d’une tristesse et d’une solitude plus savoureuses que le bonheur dans le « Dialogue des bêtes ». C’est donc une sublimation de ses expériences passées.
Ensuite, la nature est un remède qui permet à Colette de repenser à des êtres qui lui sont chers comme sa mère, lorsqu'elle était plus jeune où elle se levait tôt le matin pour se promener et voir la nature s'éveiller : A trois heures et demie[...] le soleil encore ovale, déformé par son éclosion…. Pour continuer Sido est en effet écrit comme un arbre généalogique où chaque membre de la famille est présenté un à un. La première partie aborde la mère de Colette, une femme autoritaire et charismatique, jouissant d'une connaissance intime de la nature. On découvre ensuite le "Capitaine" qui est le père de Colette, un militaire qui a perdu une jambe à la guerre. Enfin la fratrie est dévoilée avec les "Sauvages", Achille et Léo ainsi que la grande demi-sœur de Colette qui a subi un mariage malheureux. Colette se souvient alors petit à petit de ces figures importantes qui ont marqué son enfance. Cela lui permet de se régénérer et d'obtenir toujours plus d'énergie pour continuer le récit. Son rapport à la nature est d'ailleurs un héritage de sa mère, Sido, qui pouvait elle-même, telle la pythonisse, interpréter et traduire de manière quasiment mystique tous les mouvements de la nature : Il va geler, la chatte danse. Le jardin d'enfance de la narratrice est aussi présenté dans "Jour gris" ce qui lui permet de surmonter la mort de sa mère.
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