Rabelais, Gargantua, chapitre XXIX, 1535
Commentaire de texte : Rabelais, Gargantua, chapitre XXIX, 1535. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Edouard Vallet • 16 Mai 2023 • Commentaire de texte • 1 773 Mots (8 Pages) • 376 Vues
Séquence 2 : Gargantua de Rabelais
Objet d’étude : La littérature d’idées du XVIe
s. au XVIIIe
s.
Problématique : : Gargantua, un récit carnavalesque au service d’une littérature humaniste ?
Séance 5 : Un enseignement hors des livres
Objectif : Expliquer la lettre de Grandgousier, chapitre didactique
Supports : Rabelais, Gargantua, chapitre XXIX, 1535.
Projet de lecture : En quoi la lettre de Grandgousier à Gargantua est-elle une démonstration
des devoirs qui incombent à un monarque?
Mouvement 1 : La thèse de Grandgousier
La ferveur de tes études aurait exigé qu’avant longtemps je n’interrompe ce philosophique repos, si la confiance accordée à nos amis et anciens alliés n’avait aujourd’hui
trompé la sécurité de ma vieillesse. Mais puisque telle est cette fatale destinée, qui fait
que c’est par ceux mêmes dans lesquels j’avais placé toute ma confiance que je suis
inquiété, je me vois forcé de te rappeler au secours des gens et biens qui te sont confiés
par droit naturel.
- Ce premier mouvement sert de préambule à la lettre. Le ton est sérieux. Aucune marque de sentimentalisme. La conjonction «si» montre qu’il s’agit pour Grandgousier d’une lettre exceptionnelle.
Celle-ci brise l’instruction savante de Gargantua car la teneur de cette missive est de faire revenir
le fils. Grandgousier prend au sérieux l’instruction de son fils. Il emploie l’expression «ferveur de tes
études» ainsi que «philosophique repos».
- Les termes «confiance», «anciens alliés» et «trompé» nous place dans une dimension politique. Il
sera question de diplomatie.
- L’expression «fatale destinée» implique l’idée que les problèmes rencontrés par Grandgousier, à
savoir le conflit avec Picrochole, n’est pas de son fait. Plus largement, nous avons une critique faite
du pouvoir sur un territoire, à savoir que les guerres pour l’obtention de terres sont à ce point nombreuses, que cela devient en soi une règle.
- Grandgousier réemploie le terme «confiance», quant au participe passé «inquiété», il fait écho à
«trompé». Ainsi, Grandgousier insiste sur son désappointement. On remarquera le pronom à valeur
totalisante «toute» associé à «confiance». Il s’agit ici, ni plus ni moins d’une trahison dans le jeu
d’alliance politique.
- «je me vois forcé de te rappeler au secours des gens et biens qui te sont confiés par droit naturel.»
Il s’agit ici de la thèse de la lettre : le roi se dit «forcé» ce qui est contradictoire avec son rang. Il y a
donc une règle qui oblige le fils du Roi. Quand le royaume est attaqué, le fils du roi doit venir servir
aux côtés de son père. Cela fait également partie de son éducation, non savante cette fois-ci. C’est
ce qu’il faut comprendre par l’expression «droit naturel».
Mouvement 2 : Justification de la thèse
Car aussi vrai que les armes restent sans force au-dehors si le bon sens n’est en la maison, de même vaine est l’étude, et inutile est le bon sens, si en temps opportun on ne les
met à exécution grâce à la vertu, et s’ils ne sont rapportés, enfin, à l’effet vers lequel ils
tendaient.
La conjonction de coordination «car» implique une explication. Grandgousier justifie l’interruption
du «philosophique repos». Les cinq premières propositions sont au présent «restent», «est»x3,
«met». L’adjectif «vrai» impose un présent à valeur de vérité générale : Grandgousier délivre un
enseignement à son fils Gargantua. Il construit cette partie de la lettre par un jeu d’opposition organisé avec les «si». Dans un premier temps, il montre que la raison («le bon sens») l’emporte sur la
force («les armes»). Par un parallélisme de structure appuyé par la locution adverbiale «de même»,
Grandgousier démontre que la raison et l’instruction doivent tendre vers un objectif. En effet, Grandgousier emploie les termes «vaine» et «inutile : il faut pouvoir employer ses talents. Le conflit qui
l’oppose à Picrochole est donc une raison justifiable à l’arrêt momentané des études.
Mouvement 3 : La situation politique explicitée
Ma résolution n’est pas de provoquer, mais d’apaiser, non d’assaillir, mais de défendre,
non de conquérir, mais de garder mes fidèles sujets et terres héréditaires. C’est elles
qu’a hostilement envahies Picrochole, sans cause ni raison, et de jour en jour il poursuit
sa furieuse entreprise, dans des excès non tolérables pour toute personne attachée à la
liberté.
- Le principe de parallélisme de structure est repris avec la première phrase du mouvement 3 : «Ma
résolution n’est pas de provoquer, mais d’apaiser, non d’assaillir, mais de défendre, non de conquérir, mais de garder mes fidèles sujets et terres héréditaires.» Trois fois nous trouvons un enchaînement négation / affirmation. Grandgousier prend soin d’employer des verbes à l’infinitif pour avoir
plus d’impact. Ces verbes forment des couples d’antonymes :
- «provoquer» / «apaiser»
- «assaillir»
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