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Montaigne, Les essais

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Par   •  3 Mai 2023  •  Dissertation  •  1 719 Mots (7 Pages)  •  197 Vues

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Dissertation

        La question de l’autre anime tous les siècles, la confrontation de l’ethnologue contemporain Claude Lévi-Strauss avec les auteurs humanistes que sont Montaigne et Jean de Léry en témoignent. Toutefois, elle semble prendre une résonance particulière à la Renaissance, alors que les humanistes cherchent à placer l’Homme au centre de leurs préoccupations et, ce faisant, remettent en cause nombre de certitudes. Dans le premier livre des Essais, Michel de Montaigne explique que, pour se former, il faut « frotter et limer notre cervelle contre celle d’autrui », autrement dit, grâce à l’autre, apprendre à réfléchir, à développer son esprit critique. En quoi peut-on dire que les chapitres « Des Cannibales » et « Des Coches » et plus généralement les textes humanistes se caractérisent par une ouverture à l’autre et une interrogation sur l’autre ? L’humanisme s’interroge-t-il sur l’autre ou se sert-il de l’autre comme d’un miroir ? Nous verrons qu’effectivement l’humanisme part à la rencontre de l’autre, avant de montrer que néanmoins le questionnement qui en découle est tout autant une réflexion sur soi qu’une réflexion sur l’homme en général.

        Certes, comme le souligne Montaigne, l’humanisme est souvent parti à la découverte de l’autre.

        Il s’agit d’abord d’un autre différent, car éloigné géographiquement. En effet, La Renaissance est l’époque des grands voyages. La découverte de l’Amérique par Christophe Colomb en 1492 n’est qu’un des grands voyages initiés à la Renaissance, il est suivi par Vasco de Gama, Magellan et Jacques Cartier en particulier. L’Europe monte de grandes expéditions auxquelles participent des religieux, des scientifiques mais aussi des curieux, des observateurs soucieux de découvrir d’autres cultures, de les comprendre. Ainsi, Jean de Léry participe à une expédition française au Brésil. Son Histoire d’un voyage fait en la terre du Brésil montre son attention aux Indiens autochtones. Il s’applique par exemple à faire entendre leur langue ou à rendre compte de leurs coutumes. Le lecteur découvre une autre manière d’accueillir les étrangers, qui consiste à les dépouiller de leurs atours, chapeaux, épées, ceinture et autre casaque, pour s’en vêtir et jouer avec avant de les rendre à leur propriétaire. Ceux qui n’ont pas l’occasion de participer à ces expéditions font l’épreuve de l’altérité de manières différentes : par la lecture de récits de voyage, par la rencontre avec des représentants des peuples du Nouveau Monde ramenés parfois pour les présenter au roi, ou encore par des relations orales comme celles qu’a recueillies Montaigne au chapitre XXXI du premier livre des Essais, « Des Cannibales ». Il a en effet pris le temps de parler « très longtemps » avec un des visiteurs du roi Charles IX.

Il faut d’ailleurs rappeler que l’on ne voyage pas aujourd’hui comme au XVIème siècle et que de courts voyages pouvaient également confronter à l’altérité, à un autre éloigné dans le temps. Du Bellay en fait l’expérience quand il se rend à Rome et qu’il découvre une ville fort différente de celle qu’il s’attendait à voir, sans doute peu conforme à ses rêves de ville antique. Les Regrets expriment son désarroi, alors qu’il cherche vainement « Rome en Rome ». On remarque aussi que Montaigne, dans le chapitre VI du livre III, « Des Coches », revient sur l’histoire romaine en évoquant les moyens de transport des empereurs de l’Antiquité.

        Enfin, le désir de découverte de l’autre est tel à la Renaissance et à l’âge classique, que la littérature regorge de voyages imaginaires, d’ailleurs rêvés. On peut ainsi songer à l’Utopie (1516) de Thomas More, île fictive que le narrateur Raphaël Hythlodée nous fait découvrir: la cité utopienne est pensée comme un système établi dans la perspective du bien commun et dans le respect de l’individu. Fondé sur l’abolition de l’argent et de la propriété privée, elle garantit l’efficacité de ce nouveau contrat social en évinçant toute forme de pouvoir personnel de type tyrannique. C’est une société très organisée, garantissant une place et un rôle à chaque individu, favorisant ainsi son bonheur. De même, dans Les Aventures de Télémaque de Fénelon (1699), Adoam lie clairement l’île de la Bétique au mythe de l’âge d’or ; la peinture qu’il en fait est celle d’une utopie pastorale, un modèle idéal de vie tempérée.  

        Ainsi, l’humanisme et la Renaissance semble bien se caractériser par une ouverture sur l’autre. Toutefois, on peut se demander si cette ouverture sur l’autre est nécessairement une interrogation sur l’autre. Il semblerait en effet que se tourner vers l’autre permet dans un premier temps de s’interroger soi-même.

        Il semblerait donc que les auteurs humanistes trouvent dans la découverte de l’autre l’occasion d’approfondir la réflexion sur soi.

        En effet, la confrontation avec l’autre permet de prendre la mesure de ce que l’on est réellement. Ainsi, Montaigne, dans les Essais, recourt souvent à un détour par l’autre, l’autre de la lecture et celles des philosophes antiques en particulier, pour mieux se comprendre. L’héritage de l’Antiquité est pour lui « un auxiliaire pour ordonner, maîtriser et rendre communicables ses propres pensées ». Par ailleurs, si Montaigne est très curieux de l’autre dans son œuvre, notamment concernant les Amérindiens, il pose dès le début, dans la préface, un projet autobiographique : « Je suis moi-même la matière de mon livre ».

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