Les fausses confidences, acte II, scène 13

Marivaux, Les fausses confidences

Acte II scène 13

Intro

Marivaux est un grand dramaturge français du 18e, siècle des Lumières dans lequel les intellectuels combattent l’obscurantisme en revendiquant les libertés individuelles. Les comédies de Marivaux illustrent ce courant philosophique. Elles se démarquent par un langage singulier qui lui permet de mettre en scène des intrigues fondées sur des tromperies. Le langage chez Marivaux ne se résume pas à un rôle narratif, il rentre dans le registre satirique tout en laissant les personnages libres d’exprimer leurs émotions. Ainsi, Marivaux met en lumière les pouvoirs du langage à travers ses pièces, positifs ou négatifs.

Les Fausses confidences de Marivaux est une comédie en prose présentée pour la première fois en 1737, illustrant parfaitement cette préoccupation sur les pouvoirs du langage. Dans cette pièce, Dorante est un bourgeois appauvri, amoureux d’Araminte, une bourgeoise veuve et riche dont la mère la destine à marier à un noble, le comte Dorimont. Mais les fausses confidences des personnages, et surtout du valet Dubois, feront triompher l’amour.

L’extrait que nous allons analyser est tiré de cette pièce, il s’agit de l’acte II scène 13 où Araminte vient d’apprendre que Dorante a des sentiments pour elle, celle-ci tend un piège en déclarant à Dorante qu’elle veut en épouser un autre, pour l’éprouver et voir sa réaction. Cette scène qui semble à la fois être une fausse confidence parmi d’autres et une parodie de scène galante se trouve être, malgré sa portée comique, un moment crucial de l’intrigue de la pièce. Nous nous demanderons donc comment cette scène rend comique une fausse confidence qui joue un rôle central dans l’intrigue, en montrant un stratagème qui échoue malgré l’apparente sincérité de Dorante ? Pour répondre à cette question nous procéderons à une analyse linéaire de ce texte que nous avons découpé en 3 mouvements, une première partie qui expose le plan d’Araminte (l1-l10), une seconde montrant le trouble de Dorante (l10-l22) et une dernière partie qui présente Araminte pensant avoir échoué (l22-l32)

1 : Le stratagème d’Araminte = 1-10

• L1 : « je suis déterminée à épouser le comte » => phrase présent indicatif le comte nommé = raison certitude
• L2 : « d’un ton ému » => didascalie = Dorante réagit directement
• L2 : « déterminée Madame ? » => parallélisme avec déterminée, exclamation = surprise de D
• L3 : « oui tout à fait résolue » => ton assertif = supériorité d’A
• L3-4 : « Le Comte […] promet » => énumération = stratagème étape par étape
• L4 : « Il change de couleur » => intro double énonciation = constat qui montre que A attend une réaction + public impliqué
• L5 : « Quelle différence pour moi madame » => répétition Madame = infériorité D + surpris/plaint
• L6 : « D’un air délibéré » => didascalie = A adopte une émotion non ressentie
• L8 : « Et pour qui Madame ? » => interrogation = implication D
• L6 : « Ne vous embarrassez pas et écrivez » => impératif = A supérieure

[pic 1]

Comme nous venons de le voir, Araminte actionne son stratagème visant à éprouver Dorante, le langage semble donc avoir un pouvoir de manipulation. Nous allons le voir, ce stratagème semble être efficace au point de troubler Dorante.

2 : Le trouble de Dorante = 10-22

• L10 : « D reste rêveur et par distraction ne va point à la table » => didascalie = D cherche à gagner du temps
• L12 : « Oui Madame » => réponse totale à question partielle = décalage comique + Madame comique répétition
• L13 : « Il ne sait ce qu’il fait voyons si cela continuera » => double énonciation = A contrôle plan + réaction D
• L14 : « Ah ! Dubois m’a trompé » => aparté + double énonciation = D croit au stratagème et public le sait
• L15-18 : Impression stychomitie  = accélération

[pic 2]

Comme nous venons de le voir, Dorante est troublé par le stratagème d’Araminte. Celle-ci qui semblait contrôler le plan se retrouve perdue par les réactions de Dorante. Ce moment est comique pour le spectateur mais ne permet pas une évolution de la situation des protagonistes.

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