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"Le Monde entier est un théâtre", en quoi cette affirmation tirée de Comme il vous plaira de Shakespeare, permet-elle d'éclairer votre lecture des Caractères de La Bruyère?

Dissertation : "Le Monde entier est un théâtre", en quoi cette affirmation tirée de Comme il vous plaira de Shakespeare, permet-elle d'éclairer votre lecture des Caractères de La Bruyère?. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  20 Mars 2023  •  Dissertation  •  2 629 Mots (11 Pages)  •  1 219 Vues

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Sujet / "Le Monde entier est un théâtre", en quoi cette affirmation tirée de Comme il vous plaira de Shakespeare, permet-elle d'éclairer votre lecture des Caractères de La Bruyère?

Le XVIIème siècle, aussi appelé "Grand siècle", est marqué par un rayonnement des arts, encouragé par le Roi-Soleil, à Versailles. C'est une période de monarchie absolue sur laquelle les auteurs vont poser un regard critique afin d'observer, comprendre et guider leurs contemporains. Ces moralistes mettent en avant l'idéal de l'honnête homme qui doit primer sur les vices, tels que l'hypocrisie ou la vanité des hommes du XVIIe siècle. Les auteurs comme La Rochefoucauld, Pascal, la Fontaine ou La Bruyère vont mettre en lumière les enjeux des relations sociales et de la nature humaine. Ils se livrent, le plus finement possible, à l" anatomie des replis du coeur" humain (La Rochefoucauld).

Ainsi, l'oeuvre unique de La Bruyère, nommé Les Caractères, a été rédigée entre 1687 et 1696, avec neuf éditions successives. C'est le travail de toute une vie d'observations minutieuses et attentives, de la vie courtisane notamment, qui a permis à l'écrivain de publier plus de mille "remarques", regroupées dans seize chapitres.

Dans sa pièce de théâtre, Comme il vous plaira, le dramaturge anglais William Shakespeare affirme que " Le monde entier est un théâtre". Cette citation rassemble deux idées contraires, à savoir d'un coté "le monde entier", la réalité, l'existence, l'essence; et de l'autre coté "le théâtre", le factice, le jeu, l'artificiel. Le verbe d'état "être" lie les deux idées qui n'en forme finalement plus qu'une seule. En effet, l'utilisation de ce verbe permet à Shakespeare d'affirmer fermement, comme un axiome, que chaque individu, depuis la naissance jusqu'à la mort, joue un rôle. Tous les hommes, passent par les mêmes phases de la vie où il faut suivre les règles, les convenances, la bienséance, autrement dit "jouer son rôle". Ce principe de personnages types se retrouve au théâtre, notamment dans la Commedia Dell'Arte, avec les amoureux (Colombine), les zannis (Arlequin), les vieillards (Pantalon). Ainsi, selon cette citation, l' "être" et le "paraître" se mélange puisque la réalité "est" illusion. De plus, le second enjeux du théâtre, tout aussi important que les comédiens sur scène, est le public qui observe, analyse et tire des apprentissages. C'est exactement ce que font les moralistes, ils se posent en observateurs du monde d'une telle sorte qu'ils semblent s'élever au dessus de la société pour la regarder sous un angle extérieur. Ainsi, il n'est pas étonnant que les écrivains se sentent comme devant un spectacle lorsqu'ils regardent leurs contemporains.

Nous nous demanderons alors comment La Bruyère témoigne de la pièce de théâtre qu'est la société du XVIIe siècle.

Nous étudierons, dans un premier temps, la structure unique et rythmée de l'oeuvre. Ensuite, nous mettrons en avant la fausseté des individus performant, notamment, dans le microcosme de la Cour de Versailles. Enfin, nous montrerons que La Bruyère prend la place de spectateur mais également de metteur en scène de la société du XVIIe siècle.

La Bruyère a, clairement, la volonté de représenté la société en conservant la hiérarchie des milieux.

La division du livre le montre dans un premier temps. En effet, les différentes parties de l'oeuvre, les chapitres, correspondent à des groupes d'individus : "De la Ville", "De la Cour", "Des Grands"; ou également, des sujets larges touchant le monde entier : "De la Société et de la Conversation", " Des Biens de Fortune". L'auteur a souhaité structurer son oeuvre, de façon précise et hiérarchisée. La Bruyère a, ainsi, reproduit la pyramide sociale existant réellement au XVIIe siècle. Il est parti du peuple pour aller jusqu'au roi, en passant par les bourgeois, les courtisans et les Grands. Cela permet au lecteur de réfléchir et prendre conscience , dès l'ouverture du livre, que le monde est ordonné, orchestré selon un modèle où chacun appartient à un groupe, à un milieux. Cela suggère des règles de vie à suivre, autrement dit, nous avons un rôle défini à jouer en société.

Le lecteur est frappé par l'allure discontinue des Caractères fait de "remarques". La Bruyère opte pour ce genre sans règles qui lui permet alors une grande diversité de formes, du portrait de Théodecte (V,12) de plusieurs dizaines de lignes à une phrase nominale (VIII,55) "Jeunesse du prince, source de belle s fortunes". Cette rapidité de changement apporte du rythme, de la vivacité rappelant la forme théâtrale. On retrouve cette sobriété à l'intérieur même des phrases qui sont courtes et construites en parataxe, c'est à dire sans coordination ou liens logiques. La Bruyère juxtapose de courtes propositions, en employant le point-virgule et le deux-points : "Il tient le milieux avec ses égaux; il s'arrête, et l'on s'arrête; il continue de marcher, et l'on marche : tous se règlent sur lui." Ce style rend compte de la vivacité de pensée de l'auteur et de son envie de clarté des propos. En effet, La Bruyère illustre à plusieurs reprises le célèbre alexandrin de Nicolas Boileau : " Ce qui ce conçoit bien, s'énonce clairement"

La Bruyère maîtrise à la perfection l'art des jeux de mot, des énigmes mais avant tout des chutes aussi spectaculaires et inattendues qu'au théâtre. L'auteur cherche toujours à instruire son lecteur tout en gardant une part de légèreté plaisante. Il allie parfaitement le "docere" instruire en latin, et le "placere" plaire en latin. Il laisse le lecteur réfléchir à ses énigmes qui sont de véritables leçons de vie sociale tel que : "La Cour est comme un édifice bâti de marbre : je veux dire qu'elle est composée d'hommes fort durs, mais fort polis" (VIII, 10). LB reprend avec ironie l'idée de politesse : l'homme "poli" qui n'est pas l'honnête homme, est un être façonné. Comme le marbre du sculpteur, l'âme du courtisan est une matière à tailler, à lisser pour que l'extérieur soit sublime. Le naturel est gâché au profit de l'artifice. Ainsi, au travers d'une métaphore architecturale, LB fait bien réfléchir

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