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La Franc-maçonnerie dans la seconde moitié du XVIIIe siècle

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Par   •  3 Janvier 2019  •  Dissertation  •  4 231 Mots (17 Pages)  •  647 Vues

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La Franc-maçonnerie dans la seconde moitié du XVIIIe siècle

La Franc-maçonnerie est entourée de tout un mythe qui en fait un sujet de controverse. Selon le règlement actuel du Grand Orient de France, c’est une « association essentiellement philanthropique, philosophique et progressive, la Maçonnerie a pour objet la recherche de la vérité, l'étude de la morale et la pratique de la solidarité: elle travaille à l'amélioration matérielle et morale, au perfectionnement intellectuel et social de l'humanité ».

La Franc-maçonnerie est l’héritière des anciennes « guildes » anglaises de constructeurs. La Franc-maçonnerie « moderne » apparait au début du XVIIIe siècle dans une Angleterre qui sort tout juste de terribles conflits religieux et politiques. Elle fut importée en France par des partisans au prétendant Stuart réfugiés en France aux environ de 1723. Dans la décennie qui suit, il y a une offensive du pouvoir royal contre la Franc-maçonnerie mais sans conséquences graves toutefois et une tentative d’individualisation de Maçonnerie française à l’égard de l’Angleterre. La Franc-maçonnerie est condamnée par le pape en 1738 par la bulle In Eminenti, mais cette condamnation ne fut pas enregistrée par les parlements français.

Depuis son apparition pratiquement, et encore plus depuis 1789, la Franc-maçonnerie est la cible de nombreuses attaques et les théories de complots vont bon train à son sujet. L’idée d’une participation des maçons à la préparation, puis à l’explosion de la Révolution française, est presque aussi ancienne que la Révolution elle-même. Cela s’inscrit dans une tradition historiographique ancienne qui revient à expliquer un événement inattendu par une trahison, un complot ou une conjuration. Ce qui nous intéresse ici ce n’est pas la Révolution en elle-même mais l’évolution des mentalités prérévolutionnaires. Mathiez, en 1926, niait a peu près toute influence de la Maçonnerie sur l’évolution de ces mentalités et a fortiori sur les événements de 1789. G. Lefebvre, P. Chevallier ou A. Soboul n’avait pas suivi l’opinion de Mathiez et aujourd’hui on a tendance à nuancer considérablement l’opinion trop tranchée de Mathiez. A. Soboul, dans un article qui a fait date, remarque que le rôle des francs-maçons dans la genèse puis l’éclosion de 1789 peut s’interpréter différemment selon qu’on s’intéresse aux causes lointaines ou aux causes immédiates de la Révolution. Dans le premier cas, la question revient à se demander si la maçonnerie à participer au mouvement général des Lumières, si elle a fait sienne les idées progressistes du siècle ; dans le second cas, il convient d’étudier l’attitude politique des maçons et d’apprécier leur rôle dans les premières assemblées révolutionnaires. Or, dans les deux cas, la réponse n’est pas nette. Mais ici nous ne nous intéresserons qu’à la première approche.

En effet, nous allons chercher à savoir si la Franc-maçonnerie à adhérer au mouvement des Lumières et surtout quel est son rôle dans la diffusion des Lumières. La Franc-maçonnerie s’inscrit là dans de nouvelles formes de sociabilité qui se développent au siècle des Lumières. Selon M. Agulhon, « la sociabilité est définie comme l’aptitude des hommes à vivre intensément des relations publiques ». Daniel Roche se demande « comment, dans une société inégalitaire, la sociabilité contribue à constituer des enclaves d’indépendance et de liberté, non dictés par des logiques corporatistes et organicistes ». Ainsi, nous allons nous intéresser à la Franc-maçonnerie comme une forme de sociabilité à l’intérieur d’un mouvement plus ample, celui des Lumières et à la Franc-maçonnerie comme créatrice d’une nouvelle forme de sacralité entre 1770 et 1789.

Pour cela, nous commencerons par voir que la Franc-maçonnerie est l’instrument de diffusion de la pensée du siècle et ensuite nous nous intéresserons à la Franc-maçonnerie comme une forme de sociabilité prônant la fraternité.

I- L’instrument de diffusion de la pensée du siècle des Lumières

  1. Une large diffusion géographique

Depuis les premières créations parisiennes et provinciales des années 1730, la Maçonnerie s’impose de façon importante surtout après 1750. Fait parisien au départ, elle s’élargit aux dimensions du royaume et les fondations de loges croissent de décennie en décennie. En province comme à Paris on est passé de la phase de curiosité et d’inquiétude surveillé par les autorités à un mouvement dynamique et ample. Pour les premières implantations, la Maçonnerie s’installe surtout dans les centres provinciaux notables, où le rôle des fonctions urbaines diversifiées a été très important. Le décalage chronologique entre les fondations maçonniques provinciales et celle de Paris est de moins de dix ans, ce qui fait contraste avec les lenteurs et les hésitations des créations culturelles. A partir des premières capitales, la Maçonnerie rayonne tout de suite, mettant à profit les relations déjà existantes, mouvements des négociations et trafic des voyageurs, déplacements marchands, militaires, curiosité des intellectuels. L’attraction exercée partout par l’ordre permet de comprendre la tolérance des autorités. Sauf éclat exceptionnel, les intendants laissent faire et la croissance des loges progresse régulièrement. Quand le Grand Orient de France entreprend la réorganisation générale de la Maçonnerie française, aux environ de 1773, la presque totalité des villes académique a été gagnée par le mouvement. La France provinciale qui pense à suivi la capitale en moins de vingt ans. Le réseau se calque approximativement sur celui des villes de plus de dix mille habitants. De 1770 à 1789, tous les centres urbains d’importance sont touchés. La multiplication des ateliers resserre les mailles de la trame urbaine en Guyenne, en Languedoc, en Provence, en Moselle, etc.… Par un phénomène de contamination immédiate, les créations se multiplient, en grappe, autour des villes où la Franc-maçonnerie est fortement implantée. L’expansion est la règle dans tout le royaume. En 1777, il y a environ 300 ateliers qui maçonnent en France, et ce chiffre dépasse les 700 en 1789. Le tournant 1780-1785 se marque par une dernière poussée de fondations qui se ralentit après. La diffusion des loges se fait toujours des grandes villes vers les petites, et de la périphérie vers le centre. Phénomène de façade maritime et de routes fluviales et terrestres, il gagne progressivement vers l’intérieur des terres, utilisant les tracés des relations diverses, militaires, administratives, commerciales, intellectuelles.

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