Les Espaces Maritimes : Approche géostratégique

Les espaces maritimes : approche géostratégique

Introduction :

Les espaces maritimes qui représentent 71% de la planète ont un rôle majeur dans une économie mondialisée qui connait une dynamique de littoralisation.

La mondialisation a accru l’importance stratégique des mers et des océans, dans la mesure où le transport maritime est vital pour l’économie mondiale (approvisionnement en énergie, en denrées agricoles, en matières premières ; échanges de produits manufacturés).

Ce sont les États les plus impliqués dans la mondialisation qui s’efforcent donc de contrôler et de sécuriser les routes maritimes mais l’appropriation des espaces maritimes fait l’objet de tensions entre les grandes puissances. La géostratégie de ces espaces, qui concentrent les tensions majeures, est donc révélatrice de la hiérarchie et de la compétition des puissances dans la mondialisation.

Quels sont les enjeux posés par ces espaces dans le contexte de la mondialisation du XXIème siècle ?

Ces espaces ont une grande importance géoéconomique, géopolitique et géostratégique.

I. Des enjeux économiques

1. Espace de ressources

Représentant 71% de la planète, ces espaces se caractérisent par d’importantes ressources halieutiques (pêche mais surexploitation), minières et énergétiques.

Les ressources halieutiques :

Le quart de l’humanité dépend directement des produits de la mer pour son alimentation. Les ressources halieutiques représentent donc un autre enjeu majeur, malgré la mise en œuvre de solutions alternatives, comme l’aquaculture - qui se développe aussi sur les littoraux.

Les principales zones de pêche sont concentrées dans le Pacifique et l’Atlantique Nord

- au large de la côte ouest de l’Amérique et au nord-ouest de l’Europe. Elles font l’objet d’une compétition entre les États, comme la " guerre de l’anchois " entre les pêcheurs, français et espagnols dans le golfe de Gascogne. Les tensions liées à l’exploitation des ressources halieutiques existent partout dans le monde.

Le risque majeur est la surexploitation des espèces (disparition possible de certaines espèces, comme le thon rouge en Méditerranée), dans la mesure où certaines mers et océans souffrent déjà de la surpêche, tandis que le volume des prises augmente chaque année du fait de l’accroissement de la population mondiale et de la transformation des habitudes alimentaires. De plus, les passages répétés des chaluts de fond et des dragues ont un effet destructeur sur l’écosystème marin, ce qui aggrave encore les effets de la surpêche. Ces menaces environnementales se doublent de conflits sociaux entre artisans pêcheurs et pêcheurs industriels.

Les ressources minières et énergétiques:

Les espaces maritimes contiennent 1/3 des réserves et de la production mondiale de gaz et de pétrole grâce aux progrès techniques de l’off-shore profond.

Les fonds marins représentent également 84% des réserves de minerais - les nodules polymétalliques reposant sur le lit océanique : manganèse, cobalt, cuivre et nickel. Et de vastes zones du Pacifique recèleraient d’importantes quantités de terres rares, utilisées par les industries de haute technologie. L’augmentation du prix des matières premières dû au développement de nouveaux pays industriels rend ces gisements sous-marins de plus en plus attractifs, et donc de plus en plus convoités.

L’exploitation actuelle ou future de ces ressources fait l’objet de tensions entre les États : la Chine et le Vietnam revendiquent des archipels situés en mer de Chine parce que leur localisation permet l’exploitation de ressources énergétiques. L’archipel des Spratly situé dans cette mer fait d’ailleurs l’objet de conflits multiples entre les États bordiers, Chine et Vietnam, mais également Philippines, Malaisie, Brunei et Taïwan. Le conflit entre la Chine et le Japon à propos des Senkadu Diaoyu est du même type, tout comme le Golfe de Guinée est un "point chaud " du fait des gisements off-shore.

Et d’autres tensions apparaissent déjà au sujet des richesses de l’Arctique : la fonte accélérée de la banquise en Arctique relance les convoitises sur cet océan. La fonte d’une partie de la calotte polaire permettrait également l’accès à de nouvelles ressources de matières premières - minerais et hydrocarbures. De ce fait, cet espace fait d’ores et déjà l’objet d’une compétition entre la Russie, le Danemark et le Canada, qui revendiquent la dorsale de Lomonossov comme prolongement de leur propre plateau continental. En 2007, une expédition russe y dépose un drapeau par plus de 4000 mètres de fond.

Bien sûr, la question de la durabilité se pose. La pollution s’aggrave (explosion d’une plate-forme pétrolière Deepwater Horizon louée par la c° BP dans le golfe du Mexique en 2010 générant un désastre écologique, la pire marée noire de l’histoire des États-Unis. Les côtes de Floride et de Louisiane sont souillées ce qui compromet les activités de pêche et de tourisme.

2. Espace de contact et de circulation

Les transports maritimes réalisent 80% des échanges de marchandises : 3000 pétroliers, 1500 méthaniers, 4700 porte-conteneurs. Selon certaines estimations, ces échanges doubleront de volumes dans la décennie à venir. Ces échanges maritimes donnent un premier aperçu de la hiérarchie des États dans la mesure où une vingtaine de pays contrôlent 80% de la flotte mondiale. Le groupe danois Maersk est le plus important opérateur de porte-conteneurs du monde.

25 ports polarisent 50% des flux mondiaux avec une littoralisation renforcée des activités. La saturation des routes maritimes mondiales entraîne une compétition entre les façades portuaires et entre les ports qui les composent. La façade Asie-pacifique est la plus dynamique.

Les façades maritimes s’affirment comme de véritables interfaces à l’échelle mondiale (Northern Range, façade pacifique d’Asie orientale, façade atlantique d’Amérique du Nord). La concentration des hommes et des activités reflète la dynamique de littoralisation. Le dynamisme des littoraux a attiré les activités liées aux échanges - industries chimiques, raffineries, etc., et le développement d’immenses zones industrialo-portuaires.

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