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La croix de Ruthwell

Commentaire d'oeuvre : La croix de Ruthwell. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  16 Avril 2017  •  Commentaire d'oeuvre  •  3 371 Mots (14 Pages)  •  1 261 Vues

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La croix de Ruthwell

        

        C'est dans un contexte troublé qu'est plongée la Grande-Bretagne du VIII siècle. Le territoire subit les invasions successives. Il est également morcellé en plusieurs royaumes. L'aire qui nous concerne, le royaume de Northumbrie dans l'ouest, fait partie des premiers territoires christianisés grâce à l'influence du continent rendue possible grâce à la mission de saint Augustin en 596. Les royaumes insulaires ne sont donc pas isolés et ont peut le remarquer dans l'art.

Nous nous demanderons ici comment la représentation de la double nature du Christ peut servir une idéologie.

L'art insulaire et ses particularités seront l'objet de la première partie. Puis Nous nous interesserons au signe de la croix comme objet de triomphe et de gloire. Enfin nous verrons de quelle manière l'exaltation du sacrifice dans le poème du Songe de la Croix sert une orientation politique.

         La croix de Ruhtwell se situe dans le Dumfrieshire au sud de l'Ecosse. Elle s'élève sur 5,5 mètres de hauteur dans le choeur de l'église de Ruthwell.

La croix est datée du VIII siècle. Douglas McLean établie même une datation précise remontant à 731. Il justifie cette hypothèse par la création du nouvel évêché de de Whithorn datant du premier tiers du VIII siècle. C'est aussi la période pendant laquelle les sculpteurs du royaume de Northumbrie délaissent la fabrication de stèles pour s'orienter vers la réalisation de croix monumentales agrémentées de dalles sculptées.

Au XVII siècle une campagne iconoclaste est menée au Royaume-Uni est la croix de Ruthwell ainsi que d'autres monument ont été détruit pour leur caractère d'objet d'idolâtrie. La croix est abattue en 1642 sous la décision de la Grande Assemblée d'Aberdeen. Les vestiges témoignant de l'art insulaire avant l'an mil sont donc rares. A la fin du XIX siècle ont constate en Angleterre et dans le reste de l'Europe un regain d'intérêt pour le Moyen-Age, les productions et les modes de production de cette époque en réaction avec l'effervescence de l'ère industrielle et la disparition de certains savoir-faire. Le monument de Ruthwell est alors protégé en 1887 par l' « Ancient Monument Act » qui a été crée en 1882.

        La croix de Ruthwell est composée de deux pierres différentes. Ce monument est couvert de décors sculptés répartis en vingt-huit panneaux selon Robert T. Taffel et Catherine Karkov ou vingt-quatre panneaux selon David Howlet[1]. Sur les panneaux nord et sud sont figurés des scènes chrétiennes représentant pour la plupart le Christ accompagnées d'inscriptions latines. On trouve ainsi sur la face sud les quatre évangiles sur les bras de la croix avec un triangle au point de croisement. En descendant on reconnaît une scène de Visitation, Marie-Madeleine essuyant les pieds du Christ ( « Attulit alabastrum unguenti et stans retro secus pedes eius lacrimis coepit rigare pedes eius et capillis capitas sui tergebat »), la Guérison de l'homme né aveugle ( « Et praeteriens vidit hominem caecum a natibitate et sanavit eum ab infirmitate  » ), une Annonciation ( «  Et ingressus angelus ad eam dixit ave gratia plena dominus tecum benedicta tu in mulieribus » ) et une Crucifixion. La face nord présente Jean le Baptiste, le Christ reconnu par les bêtes dans le désert ( « IHS XPS iudex aequitatis; bestiae et dracones cognoverunt in deserto salvatorem mundi » signifiant « Jésus-Christ : le juge de l’équité ; les bêtes et les dragons reconnaissent dans le désert le sauveur du monde ») , saint Paul et saint Antoine ermites rompant le pain dans le désert (« Sanctus Paulus et Antonius duo eremitae fregerunt panem in deserto ») , la Fuite en Egypte et enfin une scène dont l'état très dégradé de permet pas d'affirmer de manière certaine qu'il s'agit d'une Nativité.

Ces plaques avec des scènes bibliques figurées sont encadrées d'inscriptions en caractères runiques. Il s'agit du Songe de la croix, The Dream of the Rood en langue originale.

Les dalles positionnées sur les côtés sont ornés de rinceaux végétaux encadrés par le Songe de la croix.

        La croix de Ruthwell est un des exemple les plus représentatifs de l'art insulaire qui intervient avant la période carolingienne. Avant le VIII siècle les îles britanniques reçoivent peu d'influences de l'Empire romain voire pas du tout pour l'Irlande. Pour la période qui nous concerne l'art insulaire se compose du répertoire traditionnel de l'art celtique et des influences romaines et orientales qui atteignent le territoire grâce à l'expansion du christianisme qui véhicule des images.A cela s'ajoute ensuite des éléments importés par les saxons et les scandinaves pendant les invasions successives auxquels les britanniques ont fait face.

Les croix monumentales sont emblématiques de l'art insulaire. Une des plus anciennes date du début du VIII siècle et a été érigé au sein de l'abbaye de Hexham à la mort de l'évêque Acca. La croix de Bewcastle est une des croix les plus importantes avec celles de Ruthwell. Elles sont d'ailleurs le plus souvent étudiées ensemble. Elles servent le plus souvent à insister sur le caractère sacré d'un lieu et permet d'affirmer la présence de la religion chrétienne dans des lieux fraîchement convertis au christianisme. Il s'agit donc de monuments à visée populaire.

Ces croix ont en commun des représentations de scènes de la vie du Christ ou d'autres épisodes bibliques dont les schémas empruntés sont méditerranéens. Ces scènes sont accompagnées de textes sacrées. Ainsi la croix en pierre est assimilée à la croix du Christ et par extension à l'Arbre de Vie. Les rinceaux sont typiques de l'art celtique comme en témoignent les manuscrits les plus importants de l'époque, le livre de Durrow (fin VII siècle) et surtout celui de Kells. Ces motifs végétaux sont aussi présents sur l'orfèvrerie qui connaît un développement remarquable dans ces régions comme les prouve le calice d'Ardagh en Irlande et les pièces insulaires du trésor de Sutton Hoo en Angleterre.

Jusqu'au IX siècle l'iconographie de ces croix s'enrichit de décors hagiographiques et la destination de chaque face de la croix se précise. Ainsi le Sacrifice, la Résurrection et la Gloire du Jugement Dernier sont exaltés et cela est visible sur la crois de Muiredach.

La production de ces croix semblent débuter en Irlande. Elles étaient d'abord situées dans des cimetières et se présentaient plutôt sous formes de stèles. Puis elles se sont monumentalisées et ont évoluées vers la ronde-bosse. Les communautés chrétiennes irlandaises étaient très dynamiques. Des missionnaires sont envoyés et ils fondent des monastères jusqu'en Italie. Ils diffusent ainsi les motifs des entrelacs. Dans les années 800 le répertoire iconographique des croix monumentales insulaires est repris dans les éléments visuels de la Renaissance carolingienne.

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