Le Bostwana Face à La Montée De L'autoritarisme
Commentaire de texte : Le Bostwana Face à La Montée De L'autoritarisme. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar didpa • 28 Octobre 2014 • Commentaire de texte • 5 571 Mots (23 Pages) • 637 Vues
Ian Taylor
Le Botswana face à la montée
de l’autoritarisme
Le Botswana est généralement présenté comme un
« modèle de réussite » et de « prospérité » en Afrique.
Pourtant, à examiner la réalité des dynamiques de la
politique du pays, en particulier sa démocratie célébrée
et son engagement proclamé en faveur de la liberté
d’expression, une toute autre image apparaît. Des indices
alarmants révèlent la direction autocratique que
prend le régime en place. L’expulsion, en mai 2005, d’un
professeur d’université, qui avait exprimé quelque inquiétude
quant à l’intolérance de l’élite au pouvoir envers
la critique, en atteste.
Politique africaine n° 99 - octobre 2005
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autoritaire, ce qu’atteste notamment la récente extradition d’un professeur
de l’université du Botswana ; celui-ci avait osé exprimer quelque inquiétude
quant à l’intolérance de l’élite au pouvoir envers toute critique.
Reconsidérer le « phare de la démocratie »
Le Botswana indépendant est né d’un accord passé entre les élites coloniales
et les élites autochtones. Le Parti démocratique du Botswana (Botswana Democratic
Party [BDP]) est arrivé au pouvoir suite à une transition sans heurts
et bien préparée, sur fond d’« électorat entièrement apolitique 5» et passif. Les
fondateurs du BDP étaient d’importants éleveurs de bétail, profondément
conservateurs et menés par Seretse Khama et Ketumile Masire. Selon S. Khama,
« ce fut [son] intérêt personnel et financier dans le bétail qui l’invita en premier
lieu à acquérir la confiance des autorités coloniales 6 » ; dans les années 1960,
il était devenu, en effet, le producteur le plus influent du pays. Dès l’origine,
les deux hommes établirent un système multipartiste dominé par le BDP – et
ce jusqu’à aujourd’hui.
Au niveau de la gouvernance, le Botswana est « fondé sur un président
exécutif effectif 7 » et, par la suite, Seretse Khama a rapidement initié un renforcement
du bureau de la présidence. Les principaux pouvoirs furent donc,
et sont demeurés depuis, centralisés au sein de la présidence. Commandant
à la fois l’État et le parti dominant, les trois chefs de l’État qui se sont succédé
ont jusqu’à présent largement exercé leur pouvoir dans le but de consolider
leur position et celle du parti dirigeant. Seretse Khama, de son côté, ne fut jamais
« très à l’aise » avec la politique électorale et les débats parlementaires, c’est
pourquoi la Constitution fut modifiée dès octobre 1972 afin que le président
1. Lire, à ce sujet, R.Werbner, Reasonable Radicals and Citizenship in Botswana : the Public Anthropology
of Kalanga Elites, Bloomington, Indiana University Press, 2004.
2. Voir C. Harvey et S. Lewis, Policy Choice and Development Performance in Botswana, New York,
St Martin’s Press, 1990 ; J. C. Leith, « Why Botswana prospered », communication présentée au
département d’études politiques et administratives, université du Botswana, 3 mars 2004 ;
R. Werbner, Reasonable Radicals and Citizenship in Botswana…, op. cit.
3. Voir L. Picard, The Politics of Development in Botswana : a Model for Success ?, Boulder, Lynne Rienner,
1987.
4. Voir J. C. Leith, « Why Botswana prospered », art. cit.
5. P. Fawcus et A. Tilbury, Botswana : the Road to Independence, Gaborone, Pula Press, 2000, p. 182.
6. N. Parsons, W. Henderson et T. Tlou, Seretse Khama, 1921-1980, Braamfontein, MacMillan Publishers,
1995, p. 188-189.
7. Ibid., p. 271.
n’ait plus à se présenter aux élections législatives. Désormais, il serait nommé
en vertu de sa position de dirigeant du parti majoritaire et, de facto, ne serait
plus responsable devant l’Assemblée nationale 8. Le président de la République
actuel, Festus Mogae, a favorisé quant à lui, et ce sans concertation
préalable et dans le secret, la nomination de l’inexpérimenté lieutenant général
Ian Khama (le fils aîné de Seretse) au poste de vice-président. Lors des élections
d’octobre 2004, F. Mogae a annoncé publiquement, et ce à trois reprises, que
si la renomination de Khama comme vice-président (et donc comme successeur
désigné) était rejetée, il dissoudrait le Parlement.
Ainsi, à tour de rôle, les trois chefs de l’État se sont montrés prêts à subordonner
la loi et la Constitution aux exigences politiques du moment. Lorsqu’en
1969 et 1974 le vice-président Ketumile Masire fut écarté par son électorat
de Kanye au profit de l’ancien chef Bathoen Gaseetsiwe
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