Les anciens combattants et la société française 1914-1939
Fiche de lecture : Les anciens combattants et la société française 1914-1939. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Marion FAUJOUR • 27 Février 2018 • Fiche de lecture • 1 754 Mots (8 Pages) • 993 Vues
Marion FAUJOUR
Les Anciens-Combattant et la Société Française 1914-1939
Antoine PROST
Volume histoire
Antoine PROST né le 29 octobre 1933 dans le Jura, est un professeur à l'Université d'Orléans et à l'institut d'étude politique de Paris. Il est l'auteur de nombreux articles et ouvrages, provenant pour la majorité du même éditeur : « la CGT à l'époque du front populaire, 1934-1939 ». Avec « les Anciens-Combattants et la Société française » le recours simultané aux méthodes classiques de l'histoire ou de la sociologie et à celles, plus neuves, de la linguistique ou de l’ethnologie, lui permet d'analyser les comportements et les mentalités des classes moyennes appartenant à la société française entre les deux guerres. Cette thèse composée en trois volumes : 1. histoire, 2. sociologie, 3. mentalités et idéologies, comporte également sept hors-textes et une mise en forme de Philippe BILLOIS. Proposée au grand public sous forme d'ouvrage, celle-ci fut imprimée et brochée en octobre 1977 par l'imprimerie Chirat à Saint-Just-La-Pendue. M. PROST a également dirigé le centre de recherche sur l'histoire des mouvements sociaux et du syndicalisme, devenu le centre d'histoire sociale du Xxe siècle, ce qui explique que ses ouvrages soient en majorité orientés vers des études prosopographiques (soit l'étude d'un groupe social). Président de l'association le mouvement social (qui édite une revue du même nom) et de l'association des amis du Maitron, il est de plus engagé politiquement. L'auteur sera adjoint au maire Jean Pierre SUEUR du parti socialiste de la ville d'Orléans de l'année 1989 à 2001. Il a contribué de manière décisive à l'évolution de l'histoire politique contemporaine, notamment par sa réflexion sur les mots et le langage utilisés en politique qu'il est important de définir. Antoine PROST est également un spécialiste des questions d'éducation qu'il juge essentielle au bon fonctionnement politique et social d'un pays.
Son œuvre « Les Anciens-Combattants et la Société Française 1914-1939 » est sans aucun doute l'ouvrage le plus cité par les chercheurs contemporains du monde combattant. Cet ouvrage marque un tournant décisif dans les relations entre la société d'hier et d'aujourd'hui et les victimes de guerres. Cette réflexion porte sur la place des anciens-combattants, leur rapport à l'autre, la représentation que l'on se fait d'eux, l'idéalisation, l'héroïsme... toutes ces notions sont remises en question par l'historien qui tente de comprendre avec exactitude, tant sur le plan sociologique, historique que psychologique, les véritables relations entre la société française et une catégorie d'individus.
Les études prosopographiques sur le monde combattant telle que la propose A. PROST sont assez rares. Pour commencer cette thèse regroupe les mutilés, les démobilisés, les combattants, les veuves, les orphelins, et les ascendants car n'oublions pas que la guerre n'a pas que tué des hommes, elle a prit des maris, des fils, pères, oncles, frères... Lorsque l'auteur dévoile son champs d'étude il confirme l'idée que le monde combattant réuni à la fois les soldats mais aussi toutes les victimes de la guerre. L’interaction avec la société doit alors être repensée car longtemps les chercheurs se sont contentés d'un groupe d'individus restreins. L'étude d'une seule catégorie sociale ne peut donner un aperçu suffisamment précis sur l'état des mentalités et des relations entre le front et l'arrière. La vision et l'image produites et données par la société d'avant Antoine PROST sont alors faussées, ou du moins obsolètes. Idéalisés ou encore élevés au statut de héros nationaux dans les écrits, il ne faut pas oublier les faits qui nous rappelle qu'au lendemain de la Grande Guerre la France est à la fois dévastée par les pertes humaines et matérielles, et que longtemps elle tournera le dos à ces Hommes mutilés physiquement et psychologiquement. Oubliés, ignorés ou encore isolés les victimes de guerre n'ont que trop peu la parole, très peu de droit et sont totalement incompris par la société de l'époque. Alors que la France fête la fin de la guerre, heureuse d'avoir obtenue sa vengeance, le poilu lui, tente de se souvenir des raisons de cette guerre et d'en comprendre le sens et d'accepter les pertes qu'elle a engendré. Le contraste entre les soldats et la société est si grand que le retour au foyer est pour beaucoup mal vécu. Pour ces multiples raisons, Antoine PROST explique la création des associations pour défendre leur droit et valoriser la mémoire. « L'expression anciens-combattants désigne à la fois l'ensemble insaisissable des hommes qui ont fait la guerre et les anciens-combattant organisés, c'est à dire les associations qui parlent en leur nom. Celles-ci postulent en effet leur propre représentativité et refusent de distinguer entre elles et la clientèle qu'elles visent. Elles se prétendent les interprètes authentiques de la génération du feu. L’ambiguïté n'est donc pas accidentelle elle est voulue et les associations l'entretiennent » ( p.2).
Dans son introduction A. PROST nous apprend que l'idée de cet ouvrage lui est apparu en Algérie. Son expérience comme soldat lui permit d'imaginer ce que fut l'horreur de la Grande Guerre. L'éloignement des siens, la réception des lettres aussitôt périmées que reçues, l'immersion dans un univers inhabituel et très différent du monde qu'il connu, la camaraderie chaleureuse, sincère et pourtant artificielle, la mort enfin, très rarement donnée ou risquée mais toujours imperceptiblement présente comme un lointain possible. « donner l'assaut avec l'appui des chars, de l'aviation et de l'artillerie à une poignée de tireurs d'élite, dont l'arme la plus lourde était une mitrailleuse : il n'y avait pas de quoi s'enorgueillir ou se prendre pour des héros. Le souvenir de la Grande Guerre invitait à plus de modestie »(p.1). Lorsque Antoine PROST réalise qu'une guerre comme celle de l'Algérie peut détruire psychologiquement et socialement un homme, il décide de s'intéresser aux relations entre les anciens-combattants et la société française dans l'entre deux guerres. Comme son nom l'indique elle est dominée par le souvenir de la guerre et l'appréhension d'un nouveau conflit. Selon l'historien en étudiant la société française de cette époque nous pouvons comprendre avec plus de discernement les décisions qui furent prises lors de la seconde guerre mondiale. En étudiant les Hommes et leur histoire, en tentant de s'identifier à eux et de se mettre à leur place, Antoine PROST espère rétablir la vérité sur la place des anciens-combattants. En commençant par étudier le thème de la guerre comme opinion public, il s'est rapidement rendu compte que le poids des associations était trop grand dans la société pour les omettre. « la marque vivante de la guerre dans la société française, c'était ces rescapés perpétuant le souvenir incommunicable des tranchées et s'efforçant de tirer des leçons de la tragédie »( p.2). Cette étude était essentielle pour saisir, par-delà les conséquences démographiques et économiques de la guerre, le traumatisme psychologique et social qu'elle a provoqué. Si l'originalité majeure du sujet tient à la nature particulière des groupements de combattants et de leur clientèle, comme à la complexité de leur rapport à l'ensemble de la société, la proximité relative de la période étudiée n'est pas sans conséquences. En effet l'étude présentée par M. PROST n'est pas une histoire morte. Côtoyer les associations et leurs adhérents a crée une sorte de relation intime entre l'auteur et les « sujets » étudiés. Cette proximité crée un climat particulier bien qu'elle ne modifie pas les codes et méthodes fixés par le chercheur. Le jeu subtil des associations et de leurs adhérents entraîne trois conséquences. Il conduit d'abord à centrer l'analyse sur les associations puisque les anciens-combattants n'auraient pas d'existence dans la société en dehors d'elles. Antoine PROST présente alors différents champs historiographiques qui lui permettront d'organiser son étude et de faire l'historiographie du sujet. Il s'agit de l'histoire du « mouvement » combattant dans sa généralité, de la place sociale des associations avec leurs procédures de recrutement « le public visé ne présente pas assez de trait commun pour former, à nos yeux, un groupe véritable »( p.3), et enfin le discours des combattants organisés sur eux-mêmes. Ce discours étant une perspective capitale puisque les associations prétendent reposer sur une unité de morale qui a pour but réel de créer. Ne souhaitant pas faire de son ouvrage un procès ou encore un panégyrique M. PROST nous propose ici une nouvelle facette de notre histoire avec pour seul objectif la volonté de faire découvrir aux lecteurs historiens ou non, plus que des faits ou des chiffres, mais avant tout des Hommes vivants.
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