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Lettre de rémission pour un meutrier de sa femme

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Par   •  23 Mai 2016  •  Commentaire de texte  •  4 406 Mots (18 Pages)  •  1 652 Vues

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Histoire Moderne

Lettre de rémission pour un meurtrier de sa femme (1530)

(extrait de Natalie Zemon Davis, Pour sauver sa vie, les récits de pardon).

Les lettres de rémission sont des sources de témoignages sur l’histoire sociale de leur époque. L’exposition des crimes et des arguments excusant le criminel donne lieu à des descriptions très détaillées du mode de vie et des règles sociales qui régissaient la société, mais aussi sur la criminalité et la violence. Au XVIème Siècle et comme cela était déjà le cas au Moyen Age, la société est une société ou la violence est omniprésente, répandue et notamment la violence privée au sein des couples, des familles, des communautés. On se fait justice soi même à cette époque.

Le document que nous allons étudier est une lettre de rémission adressée à François 1er par Thomas Manny. Ici, elle n'est pas dans son intégralité. Nous allons tout de suite, proposer une définition de la lettre de rémission et elle nous est donné par Claude Gauvard dans le cadre de sa thèse sur les lettres de rémission en France à la fin du Moyen Age. Selon lui, « c'est un acte de chancellerie par lequel le roi octroie son pardon à la suite d'un crime ou d'un délit, arrêtant ainsi le cours ordinaire de la justice qu'elle soit royale, seigneuriale, urbaine ou ecclésiastique. Outre la remise de peine, l'accusé est pleinement rétabli dans sa bonne renommée et dans ses biens, les intérêts de la partie adverse étant néanmoins préservés ». Cette lettre de rémission est reprise dans « Pour sauver sa vie, les récits de pardon au XVIème Siècle » par Natalie Zemon Davis. En quelques mots, c'est une historienne, professeur d'université depuis 1959. Elle est associée à l’École des Hautes Études et elle est spécialiste de l'histoire culturelle et sociale de la France de l'époque moderne.

Les lettres de rémission sont des documents importants et plutôt nombreux (on en recense des centaines de milliers entre le début du XIVème Siècle et 1791 (date de leur suppression). Cependant, elles ont longtemps été mise de côté par les historiens qui ne les étudiaient pas et cela pour de nombreuses raisons et critiques que nous verrons ultérieurement.

La document est un texte normalisé comme tous les documents administratifs et il suit un plan particulier qui a pour objectif de convaincre et c'est ce que nous allons voir au cours de cette étude.

Nous allons donc nous demander en quoi cette lettre de rémission est -elle caractéristique des récits de pardon de l'époque moderne?

Nous allons tout d'abord, nous intéresser à la lettre en elle-même, le fond (ce que l'on pourrait appeler la forme). Puis, nous nous pencherons sur le fond, c'est à dire le récit en lui-même.

  1. La lettre de rémission.

a) Un acte administratif.

Nous avons donc vu dans l'introduction, la définition, ce qu'est une lettre de rémission. Cette lettre qui est une lettre royale est en général composée à la suite d'un décès commis par homicide. Deux situations encourageaient le suppliant à faire une demande de grâce. La première est celle de l'ultime recours que dépose le suppliant avant un procès ou après une condamnation. La deuxième est l'avertissement par un tiers (parent, procureur, juge) que l'affaire pourrait attirer les faveurs du roi. C'est le cas du suppliant de notre texte Thomas Manny.

La lettre était rédigée par des notaires après que l'histoire ait été racontée à un secrétaire du roi et à ses clercs. La rédaction de la lettre implique au minimum deux personnes : un notaire du roi et ses clercs établissent un brouillon avec le récit du suppliant qui est ensuite repris sur un parchemin. Cette lettre est ensuite lue devant le chancelier ou l'un de ses représentants appartenant à la Grande ou Petite Chancellerie, puis elle est discutée par un maître des requêtes parfois en présence du roi parmi les auditeurs. Les officiers de Chancellerie s'assuraient ensuite que la faute pouvait bien faire l'objet d'une rémission. Puis, la lettre était signée et cachetée par des scellés de cire verte ornés de rubans de soie. Une fois, les frais de justice réglés par le suppliant, la lettre lui était remise.

Le coût d'une lettre de rémission dans les années 1530 équivalaient à environ 6 livres. Cette somme pouvait être plus élevée si on y rajoutait les frais d'honoraires de l'avoué et le coût des « présents » offerts afin de faire accélérer la procédure. On sait que les suppliants les plus pauvres et misérables ne payaient pas les frais de justice et que ceux qui n'en étaient pas dispensés, procéder en quelque sorte à une collecte de fonds afin de rassembler la somme nécessaire.

La lettre devait ensuite être entérinée par une cour de justice royale (soit la plus haute cour de la juridiction régionale ou par le Parlement) au cours de l'année qui suivait. Le suppliant devait se présenter devant les juges tête nu, les mains jointes en signe d'imploration et les genoux fléchis et ainsi présenter sa requête. Le suppliant certifiait après avoir lu la lettre à l'assistance que le contenu était véridique. Des question lui étaient ensuite posées afin de vérifier la teneur et la véracité de ses propos et réponses. A ce terme là, la rémission était alors acceptée ou refusée : la décision venant de la seule volonté du roi.

Nous venons donc de voir la procédure que suit la lettre de rémission de son écriture au jugement final donné par le roi. Nous allons maintenant, nous intéresser au plan que suit la lettre, à sa construction.

        b) La construction de la lettre.

La lettre de rémission suit un plan précis et possède la même structure qu'une charte.

La lettre de rémission suit un éventail de techniques et de thèmes narratifs. Le but est de faire un lien entre la violence, la pratique et la recherche du pardon. Les lettres de rémissions sont organisées en un récit cohérent qui conduit le lecteur à suivre l'évolution des faits, des événements ayant conduit au crime. La manière et la forme de la lettre jouent un rôle important dans la procédure.

La lettre de rémission fait partie des récits de pardon que l'on retrouve à l'époque moderne et qui peuvent être classés ainsi : rémission, abolition et commutation de peine.

La typologie est confortée en premier lieu par la description des adresses, préambules et autres éléments qui composent le corps de la lettre. Comme nous l'avons vu précédemment, la lettre n'est pas rédigée par le suppliant lui-même mais par un notaire, un secrétaire. Celui ci est responsable du libellé de l'introduction et de la conclusion. Ces libellés sont des formules consacrées apprises ou regroupées dans un formulaire de chancellerie.

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