La Traite Des Noirs
Mémoires Gratuits : La Traite Des Noirs. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar dissertation • 2 Mars 2014 • 2 435 Mots (10 Pages) • 1 003 Vues
Pour arrêter le dépeuplement d’Hispaniola (l’actuelle Haïti) – les indigènes, décimés par les mauvais traitements, les maladies et la faim, ne sont plus que quelques milliers en 1510 alors qu’ils étaient peut-être un million en 1492 -, Bartolomé de Las Casas propose qu’on fasse appel à une main-d’œuvre nouvelle, celle des esclaves importés d’Afrique. S’il ne perçoit pas, dans un premier temps, l’iniquité d’une telle solution, celui qui fut le plus ardent défenseur des Indiens du Nouveau Monde n’est pas toutefois à l’origine de la traite négrière, une pratique déjà ancienne et acceptée par les chrétiens de l’époque. Ce n’est que plus tard que Las Casas regrettera d’avoir pu faire une telle proposition. Mais l'esclavage, que les Écritures Saintes ne condamnaient pas, était chose admise. Par exemple, lors de sa querelle avec le pasteur protestant Jurieu, Bossuet, évêque de Meaux, écrira : « De condamner cet état [de servitude], ce serait entrer dans les sentiments que M. Jurieu lui-même appelle outrés, c’est-à-dire dans les sentiments de ceux qui trouvent toute guerre injuste : ce serait non seulement condamner le droit des gens, où la servitude est admise, comme il paraît par toutes les lois, mais ce serait condamner le Saint-Esprit qui ordonne aux esclaves, par la bouche de saint Paul, de demeurer en leur état et n’oblige point les maîtres à les affranchir. »
Les réflexions de Paul sur l’esclavage
Dans son Épître aux Ephésiens (6, 5-8), Paul déclare : « Esclaves, obéissez à vos maîtres d’ici-bas avec crainte et tremblement, en simplicité de cœur, comme au Christ, non d’une obéissance tout extérieure qui cherche à plaire aux hommes, mais comme des esclaves du Christ, qui font avec âme la volonté de Dieu. Que votre service empressé s’adresse au Seigneur et non aux hommes, dans l’assurance que chacun sera payé par le Seigneur selon ce qu’il aura fait de bien, qu’il soit esclave ou qu’il soit libre. »
Dans sa Première épître à Timothée (6, 1-2), Paul, parlant des esclaves, dit : « Tous ceux qui sont sous le joug de l’esclavage doivent considérer leurs maîtres comme dignes d’un entier respect, afin que le nom de Dieu et la doctrine ne soient pas blasphémés. Quant à ceux qui ont pour maîtres des croyants, qu’ils n’aillent pas les mépriser sous prétexte que ce sont des frères ; qu’au contraire ils les servent d’autant mieux que ce sont des croyants et des amis de Dieu qui bénéficient de leurs services.
Dans son Épître à Tite (2, 9-10), Paul rappelle à Tite les devoirs particuliers qu’il faut enseigner à certains fidèles comme, par exemple, les vieillards, les femmes âgées, et les esclaves : « Que les esclaves soient soumis en tout à leurs maîtres, cherchant à leur donner satisfaction, évitant de les contredire, ne commettant aucune indélicatesse, se montrant au contraire d’une parfaite fidélité : ainsi feront-ils honneur en tout à la doctrine de Dieu notre Sauveur. »
Traite négrière et commerce triangulaire
Récemment installées en Amérique, les puissances maritimes européennes mettent en place la traite négrière au cours des XVIe et XVIIe siècles et la portent à son apogée au siècle suivant. Cette traite concerne d’abord les colonies du Nouveau Monde puis l’archipel des Mascareignes dans l'océan Indien – c’est-à-dire : les îles de France et de Bourbon (l’île Maurice et la Réunion).
Pour des questions de rentabilité, la traite devient un véritable commerce triangulaire : 1/ échanger sur la côte africaine, avec les chefs locaux, des produits bruts et manufacturés européens contre des captifs ; 2/ transporter les captifs par-delà les océans pour les amener dans les colonies ; 3/ vendre ou échanger les captifs contre des denrées tropicales destinées à l’Europe.
La traite négrière - c’est-à-dire la déportation dans les colonies de captifs africains vendus par d’autres tribus africaines – s’avère possible parce que la traite et l’esclavage existaient en Afrique avant l’arrivée des navires portugais puis européens. Toutefois, si cette dimension africaine de la traite est admise par tous les historiens, il n'en demeure pas moins vrai que les Africains ont généralisé un tel trafic parce qu’ils trouvaient des acheteurs. En fait, c'est avec la conquête arabe dans les premiers temps de l’islam que la traite a commencé dans le continent africain. Les populations soumises sont en effet obligées de fournir à leurs vainqueurs une main-d'œuvre servile. Se mettent alors en place deux circuits : une traite transsaharienne à destination du nord de l'Afrique et du Moyen-Orient ; une traite orientale à destination de la mer Rouge. A cette traite sous contrôle arabo-musulman s'en ajoute une autre au sud du Sahara, purement interne à l’Afrique celle-là, et qui est alimentée par les razzias et les guerres entre les ethnies et les potentats locaux.
Les transactions d’un négrier, le nègre pièce d’Inde
Après avoir quitté la France le 22 juillet 1702, accompagné d’une frégate de 44 canons, le navire « L’Aigle » arrive au large de l’Angola portugaise. Si l’on en juge par le Journal d’un voyage sur les Costes d’Afrique et aux Indes d’Espagne, fait à bord du navire L’Aigle et publié sous son nom d’auteur à Rouen en 1723, les négociations s’engagent comme suit avec le roi du pays. « La harangue a été courte : ils [les représentants de la Compagnie de commerce] l’ont simplement assuré de l’amitié du Roi leur maître […] Ensuite ils lui ont présenté de la part du Roi un manteau d’écarlate, une robe de chambre, un chapeau garni d’un plumet blanc. Ce nègre, ébloui par tant de belles choses, […] les a reçus parfaitement bien, mais encore mieux leur présent. Il leur a promis de favoriser leur commerce […] Ils ont convenu des coutumes et des droits qu’on lui paierait […] »
Une fois l’autorisation du potentat local obtenue, les négociations s’engagent avec les intermédiaires indigènes qui se chargent de mettre en rapport les marins européens avec les marchands d’esclaves. Les transactions se font en « pièces du pays » - c’est-à-dire en esclaves -, dont l’auteur du Journal fournit un tarif détaillé. Par exemple : « […] Bassins de cuivre : 10 pour une pièce [entendons : 10 bassins de cuivre équivalent à une pièce
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