La contribution des colonies britanniques à la Première Guerre mondiale
Dissertation : La contribution des colonies britanniques à la Première Guerre mondiale. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar frollo • 8 Décembre 2017 • Dissertation • 3 474 Mots (14 Pages) • 1 167 Vues
Trop souvent les ouvrages généraux portant sur l’Empire britannique ne parlent que de chiffres quand ils abordent le sujet de la contribution de contingents impériaux à la guerre. Pourtant, n’est-ce pas déshumaniser la guerre que d’omettre de rendre compte de l’expérience de la guerre des différents peuples qui y prirent part ? Durant la Première Guerre mondiale, des soldats venus des quatre coins du monde débarquèrent en Europe après une traversée en bateau qui pouvait durer jusqu’à six semaines. Pour certains, c’était un retour vers la mère-patrie alors que pour d’autres, il s’agissait de découvrir le monde occidental pour la première fois. Il est incontestable que l’empire de la Grande-Bretagne joua un rôle décisif dans l’issue de cette guerre mondiale, que ce soit en raison de la richesse, des effectifs, des travailleurs, des denrées alimentaires, des matières premières ou de tout à la fois, et dont avait accès la métropole en quantités phénoménales. Cependant, ce travail-ci se concentre sur les expériences presque personnelles de trois peuples qui contribuèrent à l’effort de guerre chacun à leur façon et dont le destin prendra un tournant irréversible. L’Australie, qui construisit son identité nationale à partir de la campagne de Gallipoli, le Canada, dont la crise de la conscription marquera la politique interne des dizaines d’années après la fin de la guerre et l’Inde, qui après avoir payé le prix du sang, dû retourner au combat pour acquérir sa liberté, changèrent le cours de l’histoire moderne. Mais avant d’aborder leur parcours fascinant, un portrait global de l’empire britannique de 1914 s’impose.
À l’aube du 20e siècle, l’Empire britannique représente 34 millions de kilomètres carrés où vivent 400 millions de personnes[1] qui produisent une grande partie des denrées alimentaire ainsi que des matières premières consommées en Europe.[2] La Grande-Bretagne était maîtresse des mers et représentait une formidable puissance lorsqu’elle fit son entrée dans la Première Guerre mondiale le 4 août 1914. Elle comptait justement sur sa puissance navale, son hégémonie sur les mers et sur la force de son économie pour vaincre l’Allemagne avec l’aide des puissances terrestres qu’étaient la France et la Russie. Cette combinaison ne pouvait qu’être gagnante. Pourtant, peu après le début de la guerre, on constatait l’insuffisance de cette impressionnante flotte pour venir à bout des Puissances centrales. La guerre, la vraie, avait lieu sur le terrain et avalait une quantité d’hommes effroyable.[3] L’avantage véritable des britanniques dans cette guerre fut les 8,5 millions de soldats, marins et aviateurs impériaux qui combattirent à leurs côtés,[4] sans compter les millions de travailleurs impériaux qui contribuèrent à l’effort de guerre. Par exemple, un million d’hommes provenant de l’empire britannique auraient été employés dans le seul but d’entretenir les lignes de communication des armées britanniques au Moyen-Orient.[5] Ceci n’est qu’un aperçu témoignant de l’incroyable aide dont a pu profiter la Grande-Bretagne lors de la Grande Guerre. Ajoutons à cela le fait que les forces envoyées outre-mer par les dominions ont été payées par ceux-ci.
L’Empire britannique constitue une puissance non-négligeable et est clairement l’un des facteurs ayant permis la victoire des Alliés. Les Allemands ont beaucoup sous-estimé l’aide que pourrait apporter cet empire, pensant que les relations tendues entre colonies ou dominions et Londres ainsi que la distance les empêcheraient de participer à l’effort de guerre.[6] Ils furent très déçus lorsque l’Inde, le Canada, l’Australie et la Nouvelle-Zélande déclarèrent presque à l’unisson leur désir de défendre la mère-patrie. Pourquoi un tel engouement inattendu ? Chacun des territoires a une histoire qui lui est propre ainsi qu’une expérience de la guerre unique. L’Australie, très attachée à la Grande-Bretagne mais aussi à sa liberté, rejettera par deux fois la conscription. Le Canada, qui doit composer avec deux réalités sociolinguistiques différentes, participera activement à l’effort de guerre en dépit de toutes les frictions que cela causera entre les anglophones et les francophones. L’Inde, le joyau de la Couronne, paiera elle aussi le prix du sang tout en espérant sa liberté en retour. Ces trois cas de figure sont intéressants à analyser dans le cadre d’une étude sur l’importance de l’empire britannique durant la Première Guerre mondiale pas seulement à cause du nombre d’effectifs qu’ils représentent, mais aussi parce qu’ils illustrent des expériences de la guerre qu’on a tendance à oublier. Leurs efforts ne doivent plus être vu que comme de la chair à canons venue de loin. Dans ce portrait de l’effort de guerre australien, canadien et indien, il sera question de chiffres, mais aussi de conscription, d’opinion publique et d’identité nationale.
Australie
En tout, l’Australie apporta une contribution de 420 000 hommes à l’effort de guerre britannique, ce qui représente un peu plus de 13% de sa population masculine. 65% de ces effectifs sont morts ou blessés. On dénombre 59 000 morts à la fin de la guerre. En Australie, cet épisode de l’histoire est à la source de la construction d’une identité nationale. Plus particulièrement, la campagne de Gallipoli fixe dans la mémoire collective la bravoure militaire d’un peuple. Cette campagne désastreuse aura aussi eu un impact sur la conscription. Mais avant ces événements, il y eu une entrée en guerre très dynamique.
Les Australiens ressentaient un très fort attachement à la Grande-Bretagne au début du 20e siècle. Ils avaient l’impression de faire partie de la grande famille britannique dans laquelle l’Angleterre jouait le rôle de mère.[7] Cela s’explique par la très récente immigration de britanniques qui se considéraient Anglais avant d’être Australiens. Il n’est donc pas étonnant de constater un engouement général à l’idée de défendre la mère-patrie en difficulté dès la déclaration de guerre de la Grande-Bretagne à l’Allemagne à l’été 1914. Légalement, cette déclaration plaçait automatiquement tous les dominions, dont l’Australie, en situation de guerre contre les Puissances centrales, puisque leurs relations extérieures étaient encore gérées par Londres. Par contre, en théorie, la nature de l’aide apportée à la Grande-Bretagne était du ressort exclusif du gouvernement en place dans le dominion.[8] Cela veut dire que l’Australie aurait pu se contenter d’envoyer trois livres sterling symboliques à Londres et d’encourager de loin les soldats britanniques au front. Bien entendu, il en fut tout autre. Le Premier ministre du Commonwealth d’Australie, Andrew Fisher, promit une aide qui irait jusqu’au dernier homme et jusqu’au dernier shilling, ce qui en dit long sur la volonté de contribuer des Australiens au tout début du conflit.
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