“L'APPEL AU PEUPLE” DU 2 DECEMBRE 1851
Commentaire de texte : “L'APPEL AU PEUPLE” DU 2 DECEMBRE 1851. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Car0le • 2 Décembre 2015 • Commentaire de texte • 5 694 Mots (23 Pages) • 4 047 Vues
“L'APPEL AU PEUPLE” DU 2 DECEMBRE 1851
INTRODUCTION:
Le 6 octobre 1848, lors du débat final relatif à l'adoption de la nouvelle Constitution, Jules Grévy, républicain convaincu, défend avec des accents prophétiques l'amendement qu'il a déposé et qui vise à remplacer le président de la République élu au suffrage uni-versel par un simple président du Conseil désigné par l'Assemblée: “Etes-vous bien sûrs que dans cette série de personnages qui se succéderont tous les quatre ans au trône de la présidence, il n'y aura que de purs républicains empressés d'en descendre? Etes-vous sûrs qu'il ne se trouvera jamais un ambitieux tenté de s'y perpétuer? Et si cet ambitieux est le rejeton d'une des familles qui ont régné sur la France, répondez-vous qu'il ne parviendra pas à renverser la République?” Son amendement est rejeté car la plupart des constituants estiment qu'il est prioritaire de disposer d'un pouvoir exécutif fort face au péril de l'anarchie.
NATURE:
Trois ans plus tard, le 2 décembre 1851 au petit matin, un ensemble de décrets et de proclamations, dont “l'Appel au peuple”, est placardé dans la capitale en vue d'annoncer le coup d'Etat sous forme de diverses mesures d'exception prises immédia-tement, de deux textes adressés au peuple et à l'armée, et de deux décrets de plébiscite pour le 21 décembre, l'un soumis à l'acceptation du peuple français et le second à celle de l'armée de terre et de mer, le tout signé par le président de la République, Louis-Napoléon Bonaparte.
AUTEUR:
Charles Louis Napoléon Bonaparte est né à Paris, le 20 avril 1808. C'est le fils cadet de Louis Bonaparte, roi de Hollande, un des frères de Napoléon I. Après la débâcle napoléonienne, tous les Bonaparte sont frappés par la loi d'exil perpétuel du 12 janvier 1816. Louis-Napoléon est donc élevé en Suisse alémanique par sa mère, Hortense de Beauharnais. Il étudie sous la direction d'un précepteur, Philippe Le Bas, républicain et franc-maçon. Il est encouragé par sa mère à s'intéresser à la politique: elle a coutume de lui répéter qu'un grand destin l'attend car il porte le nom de Bonaparte. A la chute de Charles X en 1830, il espère pouvoir rentrer en France mais, alors que la loi du 11 septembre 1830 autorise la rentrée en France de la plupart des bannis de janvier 1816, la loi d'exil est maintenue en ce qui concerne les Bonaparte. Déçu, LNB partage son temps entre l'Angleterre et la Suisse et suit de près les affaires françaises. Il écrit des Rêveries politiques et un Manuel d'Artillerie. En 1836, Louis-Napoléon fait une tentative de coup d'Etat à Strasbourg où une majorité d'habitants est hostile au gvt. Il arrive à rallier quelques officiers supérieurs commandant la place. La tentative de coup d'Etat est déclenchée le 30 octobre 1836 mais tourne mal. Louis-Napoléon est arrêté et exilé en Amérique. Il y passe un certain temps puis retourne en Angleterre. Dans ces deux pays, ils acquièrent des idées sociales. Le 6 août 1840 il organise une seconde tentative de coup d'Etat, cette fois à Boulogne. C'est un autre échec: il est arrêté une nouvelle fois et incarcéré dans la forteresse de Ham, dans la Somme. Condamné à la réclusion perpétuelle, il s'évade le 25 mai 1846 et passe en Angleterre. Après la Révolution de février 1848, il est élu à l'Assemblée nationale. Lors des premières élections présidentielles tenues en France au SU, les 10 et 11 décembre 1848, il est élu président de la République avec une très nette avance sur ses adversaires, il obtient 5,5 millions de voix, soit 74,5 % des suffrages exprimés.
CONTEXTE:
Depuis le début de son mandat, le Président rencontre des difficultés qui culminent en 1851: en effet, l'entente avec l'Assemblée s'avère rapidement impossible. Alors que la popularité de LNB ne cesse de croître dans le pays, se pose la question d'une révision de la Constitution qui lui permettrait d'obtenir une prolongation de son mandat qui vient à échéance en 1852 et qui n'est pas renouvelable. Bientôt, un parti de l'Elysée s'organise autour de quelques fidèles du Président qui rallie à sa cause les principaux chefs de l'armée. Le 9 janvier 1851, LNB se sent assez fort pour relever le général Changarnier, monarchiste avéré, de son commandement de la division militaire de Paris. Deux généraux proches de LNB le remplacent. Cette action provoque un cataclysme politique. LNB choisit une nouvelle équipe ministérielle le 24 janvier 1851. Celle-ci ne comporte plus que des “hommes spéciaux” ou techniciens. L'Assemblée refuse sa confiance au nouveau gvt qui n'est pas représentatif de sa majorité. A partir de ce début d'année 1851, les choses s'enveniment à tel point que l'on peut parler de lutte ouverte entre le Président et l'Assemblée: il ne s'agit plus que de savoir qui viendra à bout de l'autre. Alors que la situation politique devient inextricable, LNB se décide à tenter le coup d'Etat le 2 décembre 1851: il donne à cette entreprise le nom d'opération Rubicon, en souvenir de Jules César qu'il admire beaucoup.
PROBLEMATIQUE:
Comment le président, à travers cette proclamation, fait-il face à la situation illégale créée par le coup d'Etat? Quelles solutions propose-t-il pour remédier au chaos politique et sur quelle base essaie-t-il de construire son entreprise?
ANNONCE DU PLAN:
Tels sont les trois points de cet “Appel au peuple” qui s'articulent dans une dialectique implacable et répondent à des questions fondamentales, permettant ainsi à LNB de justifier le coup d'Etat, d'exposer son programme politique et de fonder la légitimité du nouveau pouvoir dans le Peuple.
I. Justifier le coup d'Etat: une rhétorique habile
A- Accuser l'Assemblée et critiquer la Constitution
L. 3: “La situation actuelle ne peut durer plus longtemps”, pour expliquer qch d'aussi grave qu'un coup d'Etat, il faut être capable de développer une argumentation reposant sur de très bonnes raisons. Le meilleur moyen, c'est de rejeter la faute sur qn ou qch d'autre. C'est ce que LNB s'efforce de faire dès la première ligne après le titre. Par “la situation actuelle”, il fait allusion au chaos politique qui résulte de la mésentente entre l'Assemblée et lui-même. Deux points en particulier les opposent: le refus de l'Assemblée d'abroger la loi du 31 mai 1850 qui touche le SU. En effet, aux élections législatives complémentaires du 10 mars 1850, les démoc-socs confirment leur poussée déjà visible lors des élections législatives du 13 mai 1849. Devant cette menace venant des partis de gauche, Baroche, le nouveau ministre de l'Intérieur, défend un projet de loi visant à amputer le corps électoral du tiers des électeurs, ce qui revient à rétablir le suffrage censitaire. Ce projet est voté par la majorité (433 voix contre 241) le 31 mai 1850. Le 8 octobre 51: LNB, qui tient à garder le SU intact, propose l'abrogation de la loi mais le 13 novembre, l'Assemblée repousse l'abrogation à seulement 7 voix de majorité (par 355 voix contre 348).
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