Autorité et légitimité du roi hellénistique
Dissertation : Autorité et légitimité du roi hellénistique. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar kuhyce • 14 Décembre 2020 • Dissertation • 2 334 Mots (10 Pages) • 772 Vues
L’histoire grecque hellénistique est celle de la plus grande expansion du monde
grec. Cette expansion s’opère à partir des conquêtes macédoniennes, de la péninsule
balkanique par Philippe II de Macédoine jusqu’aux rives de l’Indus par Alexandre III.
A la mort d’Alexandre ses compagnons et généraux, les diadoques, se partagent ses
conquêtes et s’affrontent pour lui succéder avant de prendre chacun le titre de roi.
Progressivement émergent, dans les différentes régions anciennement conquises, des
royaumes concurrents dits hellénistiques, dirigés par des souverains de culture
grecque, des macédoniens, qui continueront à helléniser ces régions. Le conflit
multiforme qui s’engage entre ces royautés et qui s’étend principalement de 323 à 280
av. J.-C. marque une période trouble pour le monde grec. Il impose à chacun des
diadoques et futurs rois un effort pour asseoir son autorité et fabriquer sa légitimité par
l’imitatio Alexandri, « l’ensemble des usages et des appropriations suscitées par la
figure d’Alexandre ». Le roi hellénistique par cet effort charismatique, militaire et
politique, s’inscrit comme digne héritier et successeur d’Alexandre et de ses
possessions. Cette performance du pouvoir royal se heurte néanmoins à des résistances
internes, d’ordre culturel ou issues de volontés indépendantistes. S’y opposent dans le
même temps les contingences d’un vaste territoire et les ambitions concurrentes des
royautés voisines, auxquelles la diplomatie du roi hellénistique doit répondre. Dans
quelle mesure les différents royaumes hellénistiques nés de la mort d’Alexandre
rencontrent des obstacles à leurs projets respectifs d’affirmation souveraine sur les
territoires conquis ? Pour y répondre, il s’agira dans un premier temps d’étudier
quelques-uns des mécanismes communs de conquête du titre royal et de sa légitimité
mis en place par les rois hellénistiques. Ensuite, nous mettrons en lumière les entraves
à cette autorité royale nouvellement conquise. Enfin, nous exposerons un équilibre
géopolitique précaire sur lequel les royautés hellénistiques fondent une partie de leur
autorité et de leur légitimité.
La matrice charismatique est fondatrice dans la construction de l’autorité et de la
légitimité des rois hellénistiques. A la lumière du concept d’imitatio Alexandri, on peut
distinguer dès à présent quelques-uns des processus essentiels et communs aux
royautés hellénistiques pour poser les bases de leur souveraineté, c’est-à-dire leur
capacité à se faire reconnaître comme autorité légitime sur les territoires conquis.
La conquête du titre royal et de sa légitimité est étroitement liée à la possession
d’une terre royale, la chôra basilikè. Le roi hellénistique contrôle et exploite un
territoire conquis par la lance, à l’image d’Alexandre. Le royaume hellénistique
s’inscrit dans un espace défini et rattaché à un pouvoir unique et personnel. La guerre,
en ce sens, est un vecteur de souveraineté commun aux royautés hellénistiques, qui
dans un contexte de vive concurrence, se disputent des territoires aux frontières
fluctuantes. Dans ce contexte, la violence est essentielle au roi hellénistique dans la
fondation et le maintien de sa souveraineté. A cet égard, il tire davantage de la culture
macédonienne que de la culture grecque. C’est par la guerre et la conquête qu’il reçoit
l’acclamation de ses soldats, qui sont eux-mêmes sources de légitimité pour le roi
hellénistique, comme ils l’étaient pour le roi macédonien. A titre d’exemple, c’est
après la victoire de Salamine de Chypre en 306 av. J.-C., où se sont opposés Ptolémée
ainsi qu’Antigone le Borgne, qu’Antigone fut proclamé roi par la foule de ses soldats
macédoniens. C’est en 305-304 av. J.-C., à la suite de l’échec de l’expédition
d’Antigone et de Démétrios Poliorcète, son fils, contre une Egypte alors contrôlée par
le diadoque Ptolémée que ce dernier est également proclamé roi par ses soldats. Les
diadoques prennent progressivement chacun, à compter de 306 av. J.-C., le titre de roi.
Cependant, la figure du roi-protecteur doit nuancer la représentation que l’on
pourrait se faire d’un roi hellénistique dont la souveraineté ne dépendrait que de
stratégies belliqueuses ou oppressives. Si le pouvoir royal hellénistique est une
contrainte pour les peuples conquis, il est aussi la condition de sécurité pour des cités
ou des villages aux défenses fragiles face aux menaces extérieures. Pour ne citer qu’un
exemple, Antigone Gonatas, fils de Démétrios Poliorcète, tire profit de sa mainmise
sur les « entraves de la Grèce » (Démétrias, Chalcis, Athènes et Corinthe) pour vaincre
les Galates à la bataille de Lysimachéia, en 277 av. J.-C. Cette victoire prestigieuse sur
les barbares celtes lui permet
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