TD Arrêt Blanco
Commentaire d'arrêt : TD Arrêt Blanco. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Farah Friha • 5 Novembre 2023 • Commentaire d'arrêt • 1 147 Mots (5 Pages) • 233 Vues
Au-delà de sa sacralisation dans l’histoire, l’arrêt Blanco rendu par le tribunal des conflits le 8 février 1873 est considéré de nos jours comme un éveil juridique qui a joué un rôle crucial dans le développement du droit administratif en France. Cet arrêt représente en effet un tournant majeur où la responsabilité administrative a été mise à l'épreuve. Désormais, il n’est guère admis dans le système juridique français que les dommages occasionnés par l’activité des services publics ne puissent faire l’objet d’une indemnisation.
Les faits exposés dans l'arrêt Blanco relatent un événement tragique au cours duquel une enfant âgée de cinq ans, nommée Agnès Blanco, a été gravement blessée par un wagonnet utilisé et conduit par quatre ouvriers, près de Bordeaux, dans une manufacture de tabac appartenant à l’État. Cet accident lui a valu l’amputation de sa jambe gauche.
Suite à cela, le père de l’enfant a intenté, devant le tribunal civil de Bordeaux, une action qui était à la fois menée contre les quatre ouvriers, comme coauteurs de la blessure infligée à sa fille, et contre l’Etat, comme civilement responsable de l’imprudence de ses employés. De son côté, le préfet de la Gironde estime qu’en vertu de la loi des 16-24 août 1790 et du décret du 16 fructidor an III les juridictions judiciaires ne sont pas compétentes pour statuer sur cette action en responsabilité, c’est-à-dire pour juger l’État. Il propose un déclinatoire de compétence, mais le tribunal civil de Bordeaux refuse et se déclare compétent. Le préfet déclenche alors une procédure d'arrêté de conflit, obligeant la juridiction judiciaire à suspendre sa décision.
Ainsi, cette affaire finie par être léguée au Tribunal des conflits, une juridiction spéciale en charge de régler les conflits de compétence entre les juridictions administratives et judiciaires en France. Nonobstant, il convient de rappeler qu'à cette époque, la distinction fondamentale, connue sous le nom de "Summa divisio", entre ces deux ordres juridictionnels demeurait incertaine, engendrant des difficultés pour les citoyens confrontés à des litiges impliquant à la fois le droit administratif, régissant les rapports entre l'administration publique et les citoyens, et la responsabilité extracontractuelle de l'État, traitant des dommages causés par ses services publics. Dès lors, l’arrêt Blanco a suscité deux problèmes de droit majeurs : En premier lieu, celle de la compétence juridictionnelle, à savoir si cette affaire relevait de la juridiction administrative ou de la juridiction judiciaire. En second lieu, si celle-ci a renforcé l'autonomie du droit administratif tout en affirmant la responsabilité civile de l'État ?
La solution apportée par le Tribunal des conflits précise que le droit civil ne peut être appliqué dans cette affaire "la responsabilité, qui peut incomber à l’État, pour les dommages causés aux particuliers par le fait des personnes qu’il emploie dans le service public, ne peut être régie par les principes qui sont établis dans le Code civil, pour les rapports de particulier à particulier’’ De plus, le tribunal précise que "cette responsabilité n’est ni générale, ni absolue," et qu'elle obéit à des règles spéciales qui varient en fonction des besoins du service public et de la nécessité de concilier les droits de l’État avec les droits privés.
En raison des deux problèmes de droit évoqués, il est possible de considérer que l'arrêt Blanco a provoqué une révolution dans les compétences juridictionnelles (I), qui a conduit à une réorganisation de la justice administrative (II).
- Une révolution des compétences juridictionnelles
L'arrêt Blanco met en évidence une dualité entre les juridictions françaises, chacune prétendant être compétente pour traiter l'affaire. D'une part, les juridictions judiciaires sont préoccupées par la responsabilité civile de l'État (A), tandis que les juridictions administratives se concentrent sur la compétence administrative en matière de service public (B).
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