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Droit Administratif - commentaire d'arrêt, Ordonnance Du 10 Janvier 2014 Dieudonné

Dissertation : Droit Administratif - commentaire d'arrêt, Ordonnance Du 10 Janvier 2014 Dieudonné. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  2 Novembre 2014  •  2 776 Mots (12 Pages)  •  2 774 Vues

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Commentaire d’arrêt du CE, ordonnance du 10 janvier 2014

« Société Les Productions de la Plume et M. Dieudonné M’Bala M’Bala »

« La liberté est la règle et la restriction de police l’exception ». Cette phrase prononcée par le Commissaire de Gouvernement Corneille dans l’affaire « Baldy » du 19 août 1917 pose un principe de droit administratif important. En d’autres termes, il semblerait que l’ordre public ne puisse porter atteinte aux libertés que sous certaines conditions. La liberté serait alors définie comme le pouvoir de faire tout ce qui ne ne s’opposerait pas au régime du service public et de la police administrative. Cette définition souligne alors la nécessité d’opérer une conciliation entre le maintien de l’ordre public d’une part, et le respect des libertés d’autre part. Et c’est sur cette question que se penche l’ordonnance du Conseil d’Etat du 10 janvier 2014 rendue sur l’affaire « Société les productions de la Plume et M. Dieudonné M’Bala M’Bala ».

En l’espèce, le 7 janvier 2014, le maire de Tours, par la voie d’un arrêté, a interdit sur le territoire de sa commune la représentation du spectacle « Le Mur » de M. C...A... prévue le jour-même.

Les productions de la Plume et M. C…A… directement concernés par les effets de cette mesure de police, ont formé un référé-liberté devant le juge des référés du tribunal administratif d’Orléans, afin d’annuler l’arrêté pris par le Maire de Tours en date du 7 janvier 2014. Le 10 janvier 2014, le juge des référés du tribunal administratif rejette leur demande tendant à suspendre l’exécution de l’arrêté du maire de Tours sur le fondement de l’article L521-2 du code de justice administrative. Par la suite, toujours le 10 janvier 2014, l’affaire a été transmise au juge des référés du Conseil d’Etat.

A l’appui de cette demande de suspension en urgence de l’arrêté du Maire de Tours, étaient formulés des moyens tendant à relever que le maire avait commis, au titre de l’exercice de son pouvoir de police administrative, une illégalité et que ce faisant, il aurait obéi aux consignes du ministre de l’intérieur et aurait ainsi entaché sa décision de détournement de pouvoir.

Ainsi, le juge des référés du Conseil d’Etat a été amené à se poser la question suivante : le maire peut-il annuler, au titre de son pouvoir de police administrative, la représentation d’un spectacle sur la base de propos à caractère antisémite précédemment utilisés dans le cadre de cette même représentation ?

Selon le juge des référés du Conseil d’Etat, le maire peut en effet, au titre de son pouvoir de police administrative générale, annuler par un arrêté le spectacle de M. C… A… produit par la SARL Les Productions de la Plume compte tenu de la réalité d’un risque de trouble à l’ordre public consistant à provoquer la haine et la discrimination raciale.

De plus, le juge des référés au Conseil d’Etat estime que la mesure prise par le maire est d’autant plus nécessaire compte tenu du fait que le spectacle présente une atteinte à la dignité de la personne humaine. Ainsi, le juge des référés au Conseil d’Etat a rejeté la demande des Productions de la Plume et de M. C…A….

Au titre de cette solution, il faut voir que le juge des référés du Conseil d’Etat n’a fait que suivre un mouvement jurisprudentiel constant (I) se basant sur l’idée impérative que la dignité de la personne humaine, composante moderne de l’ordre public, doit être respectée (II).

I - Une décision du Conseil d’Etat inscrite dans une logique jurisprudentielle

La demande de suspension de l’arrêté du Maire par les requérants fait l’objet d’un refus de la part du Conseil d’Etat pour la simple et bonne raison que cette mesure s’intègre parfaitement au pouvoir de police administrative générale du maire (A) mais en plus, qu’elle se justifie bien par la présence d’un trouble à l’ordre public (B).

A.) Une mesure justifiée par l’exercice de police administrative générale du maire

Le juge des référés du tribunal administratif a rappelé « qu’il appartient aux autorités chargées de la police administrative de prendre les mesures nécessaires à l’exercice de la liberté de réunion ». Par cette phrase que reprend le juge des référés du Conseil d’Etat, il nous amène à nous interroger sur le domaine de compétence du maire. On le sait, la police administrative est le premier but de l’action administrative consistant en la règlementation des comportements des individus dans un but de préservation de l’ordre public. La police administrative vise donc à maintenir l’ordre, et par déduction, à éviter le désordre.

L’ordre public renvoie à une trilogie traditionnelle datant de 1789. Cette trilogie c’est que l’ordre public implique la sécurité, la tranquillité et la salubrité publique. Il faut savoir qu’au niveau communal, c’est le maire qui est chargé de préserver l’ordre public par le biais de son pouvoir de police administrative prévu à l’article L2122-24 du Code général des collectivités territoriales. Ainsi, en cas de trouble à l’ordre public, le maire peut sous certaines conditions intervenir. C’est ce que démontre l’arrêt « Société des Films Lutetia » du Conseil d’Etat de 1959. En l’espèce, le maire a pu interdire la diffusion d’un film sur le territoire de sa commune par son pouvoir de police administrative générale. Ici, le maire a aggravé la disposition préalable du Ministre de l’intérieur titulaire d’un pouvoir de police administrative spécial, en démontrant des circonstances locales particulières.

En revanche, lorsque l’autorité titulaire d’un pouvoir de police administrative spéciale a pris des mesures préalables qui s’avèrent être complètes, le Maire ne peut plus intervenir au titre de son pouvoir de police administrative générale. C’est ce que démontrent les arrêts du Conseil d’Etat de 2011 du même jour : « Commune de Saint-Denis » et « Commune de Penne-Mirabeau ». Lorsqu’il existe une police administrative spéciale complète, la police administrative générale ne peut plus intervenir.

Dans l’affaire Dieudonné, le Ministre de l’intérieur, par une circulaire du 6 janvier 2014, interdisait la représentation du spectacle de M. C... A... aux motifs que par les propos à caractère antisémite qu’il contenait, il pouvait enclencher une polémique et constituer un trouble

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