Marguerite yourcenar

Marguerite Yourcenar écrit : « Un pied dans l’érudition, l’autre dans la magie, ou plus exactement, et sans métaphore, dans cette magie sympathique qui consiste à se transporter en pensée à l’intérieur de quelqu’un » (p.327). En effet, un roman permet au lecteur de se projeter vers les autres et de se mettre dans la peau des autres en s’immergeant dans les pensées et la vie de personnages fictifs. En éprouvant une transportation en pensée pour ces lecteurs ou en s’identifiant à eux, le lecteur vit une expérience de camaraderie  et se frôle à l’altérité. S’il est vrai que le roman a pour fonction de permettre au lecteur de se mettre dans la peau des autres nous nous interrogeons sur comment la méthode prônée par Yourcenar a-t-elle permis de faire jouer le rapport dialectique entre « sois même » et de l’« autre ». Nous relevons les principaux éléments qui caractérisent la méthode d’écriture de l’auteure dans les carnets de notes de «  Mémoires d’Hadrien » (I), nous abordons aussi comment le personnage d’Hadrien arrive-t-il à dépasser un « je » biographique pour atteindre un « je » universel (II). Mais le roman ne nous apprend-il pas finalement à travers l’itinéraire d’Hadrien et par ses réflexions un moyen de s’évader de soi-même et des autres ? (III)

I- Les carnets de notes

Autrement dit, le journal littéraire que tenait Marguerite Yourcenar pendant la rédaction des mémoires, est une réflexion de l'auteur sur son travail. Regard Miroir. Dans cet extrait, elle va faire part de la démarche et des difficultés de la biographie.

A/ l’investissement de Marguerite Yourcenar dans le roman.

Marguerite Yourcenar a fait de longues recherches pour se mettre dans la peau de son personnage. Elle confie dans ses notes « L’une des meilleures manières de recréer la pensée d’un homme : reconstituer sa bibliothèque. », elle nous partage que la réalisation de se livre fut un travail harassant car, elle devait avoir une bonne connaissance du sujet, faire plusieurs recherche, inventer, visualiser, et surtout se mettre à la place d’Hadrien. Elle a donc fait face à des difficultés telles qu’être proche sans être trop présente, avoir différentes sources, l’objectivité, la vérité… Elle avait pour enjeux de rendre le sujet à nouveau vivant, avec de l’identification.

Elle fournit dans le roman un travail minutieux et précis par des démarches extrêmement prudente et lucide. Les Mémoires d’Hadrien abordent plusieurs sujet comme le pouvoir, l’amour, la découverte de sois et de l'autre mais aussi la mort. La mort est omniprésente dans Mémoires d’Hadrien. Elle ouvre et clôt le roman mais est aussi présente tout au long de la vie d’Hadrien. En se mettant à la place d’Hadrien elle mène aussi une réflexion sur les expériences de sa vie. Mais cette découverte de sois n’est pas aisée : 

le moi est complexe, insaisissable, changeant comme l’indique le titre de la deuxième partie, « Varius multiplex multiformis » qui signifie « varié, complexe, changeant ». Par l’analyses psychologiques, politiques et littéraires qui rapprochent ces Mémoires fictives du genre de l’essai car Hadrien mêle narration intime et réflexions sur des sujets divers.

B/ Les principaux éléments caractérisant la méthode d’écriture de l’auteure.

Marguerite Yourcenar adopte une écriture très classique, au style rigoureux, et la langue noble qui s’adapte au niveau d’un empereur. On peut donc parler du style stoïcien. « Les moindres mots, les moindres gestes, les nuances les plus imperceptibles étaient notés; des scènes, que le livre tel qu’il est résume en deux lignes, Ajoutés les uns aux autres, ces espèces de comptes rendus eussent donné un volume de quelques milliers de pages. Mais je brulais chaque matin ce travail de la nuit. » (p.340-341) ce passage des carnets de notes nous montre à quel point l’auteur était exigeante dans la réalisation de son roman.

L’écriture est non seulement philosophique mais aussi abstraite, Hadrien utilisant souvent le « nous » généralisant ou le « on » impersonnel pour montrer un détachement du « je » afin de montrer une vérité générale et universelle. Mais l’écriture de Yourcenar fait aussi preuve d’une sensibilité lyrique face à la beauté du monde : « “La circulation de l’or, le passage des idées, aussi subtil que celui de l’air vital dans les artères, recommençaient au-dedans du grand corps du monde ; le pouls de la terre se remettait à battre” ». On peut rapprocher les Mémoires d’Hadrien des Essais de Montaigne qui mêlent aussi narration personnelle et réflexion philosophique.

Dans le roman elle nous partage ses recherches, ses preuves et son cheminement avant et pendant la réalisation de son ouvrage. Marguerite Yourcenar s’identifie et s’associe à l’empereur Hadrien pour retracer sa vie. Le personnage incarné est imaginé par l’auteure donc plusieurs pensées, émotions, sentiments et réflexions imaginées pour prendre la place du personnage.

II- Du « je » biographique au « je » universel

A/ Le « je » biographique

Autrement dit, pour partir à la découverte de soi, Hadrien mène une réflexion sur les expériences de sa vie, une quête de soi. Il nous confie le but de son projet qui est de « mieux se connaitre avant de mourir ». Mais cette quête de soi est difficile, Marguerite Yourcenar s’exprime aussi par le personnage. Le « moi » est inconstant, instable et fuyant. Le « moi » est complexe, insaisissable,  changeant. Le « je » est masqué derrière un rôle : « Mais peu à peu un nouveau venu entrait en fonctions, un nouveau directeur de troupe, un metteur en scène. Je connaissais le nom de mes acteurs ; je leur ménageais des entrées et des sorties plausibles ». Le roman réaliste fait une description objective et précise de la vie des autres et nous permet ainsi de mieux comprendre ce qu’ils vivent. Les registre tragique et épique dans ce roman suscitent l’empathie, créant un sentiment de fraternité avec les personnages.

De plus, après toutes les recherches de M.Yourcenar, ses raisonnements sont appuyés par : une lettre qu’elle a lue, des recherches autobiographiques et historiques, les retours des médecins et scientifique qu’elle a rencontrée et en sommes des informations de sources sûres afin d’enrichir et d’imaginer les pensées et les actes du personnage d’Hadrien et de l’incarner. « J’ai fait diagnostiquer plusieurs

Soi-même comme un autre

roman

4 heures

20 points

INTÉRÊT DU SUJET • Quelles sont les particularités d’une fiction romanesque où l’auteur choisit de faire assurer la narration par un personnage qui s’exprime à la première personne ?

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