Fiche du texte n°5 : L’idéal d’Hadrien, Tellus stabilita dans Les Mémoires d’Hadrien (1951) de Marguerite Yourcenar

Fiche du texte n°5 : L’idéal d’Hadrien, Tellus stabilita dans Les Mémoires d’Hadrien (1951) de Marguerite Yourcenar

Introduction

Dans une atmosphère d’après-guerre où la paix dans le monde a été menacée par le dictateur Adolf Hitler, Marguerite Yourcenar (1903-1987) s’est rendue compte de l’influence du chef d’état sur les hommes. De ce fait, cette écrivaine ayant reçu une éducation humaniste par son père, retrace la vie du plus humaniste des empereurs romains : Hadrien, qui régna au IIème s. Elle désire renouveler le genre romanesque, même si elle est étrangère au Nouveau roman. M.Y. commença l’écriture de ce roman historique et autobiographie fictive en 1924, dont elle reprit les manuscrits en 1948 pour finalement publier son chef d’œuvre en 1951. Cette auteure s’appuie sur un travail d’érudition incroyable. Dans ce récit, Hadrien, alors qu’il va bientôt mourir, écrit une lettre à son petit-fils et Marc-Aurèle dans laquelle il lui expose ses méditations sur son éducation et son parcours en tant qu’empereur. L’extrait qui nous est proposé est issu du chapitre 3. Après avoir raconté comment il a rétabli l’ordre et la paix dans l’empire à la mort de Trajan, H présente l’idéal esthétique qui a dirigé son œuvre politique.

Quelle image de l’empereur et de l’empire se dessine à travers ces lignes ? Comment s’exprime la quête d’harmonie propre à H ? Quelle volonté personnelle H réalise durant son règne pour offrir à son peuple une harmonie nouvelle ? Quelles sont les ambitions d’H pour l’empire romain ?

I. L’expression d’une volonté impériale des l.1 à l.17 (jusqu’à « et les danseurs aussi »)

a) Expression d’un désir personnel à l’origine du tx

• Cet idéal est montré comme une attirance purement subjective

• « Trahit sua quemque voluptas » : chacun est attiré par son propre plaisir

• Expression du désir personnel : gradation « but », « ambition », « goût », « idéal » / goût particulier « propre à chacun », « je me sentais » (sentiment)/ « son » (x4) et « le mien »🡪 not° subjective associée au plaisir qui se trouve dans l’idéal par le parallélisme : « A chacun sa pente : à chacun aussi son but »

• Chiasme « son goût (=expérience sensuelle, de l’ordre de l’esthétique) le plus secret et son plus clair idéal (=abstrait, de l’ordre de la raison)»

• But poursuivi de l’ordre de l’expérience

• Antithèse « secret »=obscur ≠ « clair »=visible🡪évidence intime

• L’expression d’une volonté

• Anaphore « je voulais que » qui rythme le tx, suivie par une multitude de prop. complétives (11 désirs au total à l’imparfait) 🡪 volonté démultipliée

• Subjectif « fussent » : mode de la subjectivité met en valeur la décision de l’esprit plutôt que la réalité du projet

• Verbe « vouloir » : ordre impérial et souhait

• Mais au service d’une grandeur avant tout politique

• Vers blanc l.11 « que l’immense majesté s’étendit à tous »🡪 H s’efface devant un idéal politique admiré

• Pléonasme « immense majesté »

• Personnification de la paix romaine qui est grande et son immensité n’est pas rattachée à l’homme

• H cherche à satisfaire son désir personnel qui est le bien commun « s’étendit à tous ». H s’oppose à la politique de conquête de T🡪 image noble de l’empire et du rôle de l’empereur

b) Un regard supérieur

• Un regard panoramique : ouvert sur le monde

• H balaie du regard l’empire voire le monde entier « les villes », les « foyers », « les gymnases », « les vergers », les « frontières », « les routes », le « monde » qui évoquent les campagnes, les pays, les continents, les mers. Il s’agit de régner sur tout l’empire et d’étendre la paix.

• Volonté universelle « sphères ». Toute la société est concernée : H évoque les âges et les ordres de la société « femmes », « écoliers », « jeunes hommes » 🡪 structure énumérative au pluriel mais sans vieillards. Il ne cherche pas l’égalité mais ne veut pas que les marques de l’esclavage apparaissent.

• H se compare en sa faveur avec les autres hommes

• Allusion implicite aux vices ou aux autres empereurs comme Néron (l.1-2)

• Valorisation implicite l.18 : H s’adresse à tout homme avec la périphrase « travaux stupides ou féroces »🡪 H ne peut pas critiquer la guerre en tant qu’empereur et allusion à la « boucherie héroïque » de la guerre dans Candide de Voltaire. L’idéal d’H est considéré comme supérieur à celui des autres.

• H a voulu créer un monde ordonné où chacun soit heureux🡪 M.Y. fait peut-être apparaître l’idée moderne selon laquelle la guerre est absurde (en référence aux 2 guerres du XXème)

• H montre sa proximité avec Arrien qui est valorisée car il s’intéresse à la culture plutôt qu’à la guerre.

• La majesté du style oratoire

• Dit « togé », allusion à la toge des sénateurs (mot inventé par M.Y. qui désigne un style entre écrit et oral)🡪 vérités générales : entre lettre et discours

• Vocabulaire abstrait : champ lexical de la beauté de la justice

• Parallélisme/ Période : phrases complexes qui copient la langue latine basée sur la symétrie des l.4 à 17. La beauté est vue sous le signe de la qualité. Ces 2 longues périodes s’attachent à décrire la beauté de l’empire.

c) Au service d’un idéal grec

• Importance de la sagesse présente dans une certaine modestie

• H ne fait pas preuve d’hybris : démesure, excès rejeté par les grecs🡪concession accordée à l’adversaire l.2 « son ambition si l’on veut ». Son idéal en est un parmi divers

...