Les Adieux au monde de Mme de Beauséant

Commentaire composée : Les adieux au monde de Mme de Beauséant

        Ecrit en 1834 par Balzac, Le père Goriot est un roman démontrant toute la force de l’écriture de son auteur. Ce roman réaliste s’oppose au classicisme et au courant romantique apparu au 19ème siècle. Dans le roman Mme de Beauséant a toute son importance : c’est elle qui donnera ses bons conseils à Rastignac, qui lui apprendra les vices de la société et comment s’y faire une place…  Le texte des adieux au monde de Mme de Beauséant est un extrait du dernier chapitre du Père Goriot. Nous verrons en premier lieu en quoi le bal prend une dimension théâtrale puis nous montrerons que sa « chute » est parfaitement maitrisé malgré les jeux du sort qu’elle subit.

        Cette scène exposant le retrait de Mme de Beauséant du grand monde parisien est présentée par l’auteur comme un spectacle. L’emploi de l’imparfait par le narrateur dans les premières phrases du texte posent le décor : “les lanternes de cinq cents voitures éclairaient les abords de l’hôtel de Beauséant”, “De chaque côté de la porte illuminé piaffait un gendarme”. Les mots “affluer”, “empressement” et "abondamment" dévoilent à quel point cet instant se fait désirer et comment les gens s’y pressent comme pour ne pas rater le début d’une pièce et avoir la meilleure place. L’effet de lumière introduit par “les lanternes de cinq cents voitures”, “la porte illuminée" conforte l’idée que l'événement est attendu par tous et que le beau monde parisien a les yeux rivés sur la scène de la pièce qu’est l’hôtel de Beauséant.

        La comparaison de Mme de Beauséant à un gladiateur qui savait “sourire en expirant” dans l’arène. Applaudi par les jeunes romaines qui ne sont que le public venu assister à la réception, confère à cette scène à une dimension théâtrale beaucoup plus prononcée. La haute société est représentée par l’arène où chacun lutte pour cacher ses secrets et où tous se délectent du malheur et de la souffrance des autres. La figure de marbre, le calme dont elle fait preuve, le fait qu’elle ne laisse rien paraître de sa douleur pour satisfaire le public et s'en éviter les foudres peut être comparé à un acteur portant un masque pour incarner un personnage. Mme de Beauséant sait “sourire en expirant” elle ne montre rien alors qu’elle “meure” dans la haute société. Elle fait son deuil.

La grandeur de Mme de Beauséant autant dans le grand monde que dans son personnage est justifiée par le public venu assister à son départ. Les “ministres”, “les hommes les plus distingués de la cour”, “les ambassadeurs”, “les gens illustrés en tout genre”, “les plus belles femmes de Paris'' venus à la réception montrent au lecteur l’importance de cette soirée pour la haute société parisienne. Balzac met en évidence la grandeur de Mme de Beauséant par le prestige et l’importance dans la société de ses invités. Enfin la phrase “les plus distingués de la cour” affirme l’importance de l'événement jusque dans l’entourage du roi. 

Mme de Beauséant est propulsée dans une toute autre dimension lorsque Balzac compare sa séparation à celle de la grande Mademoiselle à qui le roi Louis XIV en personne arrachait son amant. Cette comparaison permet à Balzac d’introduire la vicomtesse non plus comme une femme importante de la haute société mais comme une “reine” qui maitrise et comprend le monde. Qui sait s’en servir à son avantage, une femme qui se “ montr[e] supérieur à son mal”, qui “domin[e] jusqu’à son dernier moment le monde dont elle n’avait accepté les vanités que pour les faire servir au triomphe de sa passion”. Son titre de “dernière fille de la quasi royale maison de Bourgogne” achève cette entrée dans une dimensions souveraine et majestueuse. Enfin le palais “désert pour sa reine” prouve que Mme de Beauséant est au-dessus de toutes les critiques et se contrefiche que les invités les plus prestigieux viennent à sa réception, elle maîtrise et comprend le fonctionnement de ce beau monde, elle a conscience de l'hypocrisie de ce monde.

...