Les Monstres
Mémoires Gratuits : Les Monstres. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar dragbol • 15 Mars 2014 • 3 508 Mots (15 Pages) • 1 480 Vues
SUJET
Vous ferez des cinq documents suivants, consacrés au regard porté sur les
monstres dans la société, une synthèse concise, objective et ordonnée.
DOCUMENTS
Document 1 "Quasimodo", Victor HUGO, Notre-Dame de Paris, Livre 1, chapitre V,
Editions Gallimard Folio,1831.
Document 2 : « Les délices de la peur », Claire CAILLAUD, Revue Textes et documents
pour la classe, décembre 1995.
Document 3 : Frankenstein, Mary SHELLEY, Frankenstein ou Le Prométhée moderne,
dernier chapitre, Editions Gallimard Folio Plus, Traduit de l'anglais par Paul Couturiau.
Document 4 : Gilbert LASCAULT, Encyclopaedia universalis, 1995.
Document 5 : The Elephant Man, Affiche du film de David LYNCH, 1980.
Document 1
QUASIMODO
La scène se passe à la fin du Moyen Âge. Pour se divertir, le peuple de Paris décide de
procéder à l'élection du « pape des fous », un concours de grimaces.
C'était une merveilleuse grimace, en effet, que celle qui rayonnait en ce moment
au trou de la rosace. Après toutes les figures pentagones, hexagones et hétéroclites qui
s'étaient succédé à cette lucarne sans réaliser cet idéal du grotesque qui s'était
construit dans les imaginations exaltées par l'orgie, il ne fallait rien moins pour enlever
les suffrages, que la grimace sublime qui venait d'éblouir l'assemblée. Maître Coppenole
lui-même applaudit;et Clopin Trouillefou, qui avait concouru, et Dieu sait quelle
intensité de laideur son visage pouvait atteindre, s'avoua vaincu. Nous ferons de même.
Nous n'essaierons pas de donner au lecteur une idée de ce nez tétraèdre (1), de cette
bouche en fer à cheval, de ce petit oeil gauche obstrué d'un sourcil roux en broussailles
tandis que l’œil droit disparaissait entièrement sous une énorme verrue, de ces dents
désordonnées, ébréchées çà et là,, comme les créneaux d'une forteresse, de cette lèvre
calleuse sur laquelle une de ces dents empiétait comme la défense d'un éléphant, de ce
menton fourchu, et surtout de la physionomie répandue sur tout cela, de ce mélange de
malice, d'étonnement et de tristesse. Qu'on rêve, si l'on peut, cet ensemble.
L'acclamation fut unanime. On se précipita vers la chapelle. On en fit sortir en triomphe
le bienheureux pape des fous. Mais c'est alors que la surprise et l'admiration furent à
leur comble. La grimace était son visage.
Ou plutôt toute sa personne était une grimace. Une grosse tête hérissée de cheveux
roux ; entre les deux épaules une bosse énorme dont le contre-coup se faisait sentir
par-devant un système de cuisses et de jambes si étrangement fourvoyées qu'elles ne
pouvaient se toucher que par les genoux, et, vues de face, ressemblaient à deux
croissants de faucilles qui se rejoignent par la poignée ; de larges pieds, des mains
monstrueuses ; et, avec toute cette difformité, je ne sais quelle allure redoutable de
vigueur, d'agilité et de courage ; étrange exception à la règle éternelle qui veut que la
force, comme la beauté, résulte de l'harmonie. Tel était le pape que les fous venaient
de se donner.
On eût dit un géant brisé et mal ressoudé.
Quand cette espèce de cyclope parut sur le seuil de la chapelle, immobile, trapu, et
presque aussi large que haut, carré par la base, comme dit un grand homme, à son
surtout (2) mi-parti (3) rouge et violet, semé de campaniles (4) d'argent ' et surtout à
la perfection de sa laideur, la populace le reconnut sur-lechamp, et s'écria d'une voix:
- C'est Quasimodo, le sonneur de cloches ! c'est Quasimodo, le bossu de Notre -Dame!
Quasimodo le borgne! Quasimodo le bancal ! Noël ! Noël (5) On voit que le pauvre diable avait des surnoms à choisir.
-Gare les femmes grosses (6) ! criaient les écoliers.
- Ou qui ont envie de l'être, reprenait Joannes.
Les femmes en effet se cachaient le visage.
- Oh! le vilain singe, disait l'une.- Aussi méchant que laid, reprenait une autre.- C'est le
diable, ajoutait une troisième.
Victor HUGO, Notre-Dame de Paris, Livre 1, chapitre V,
Editions Gallimard Folio,1831.
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