Dissertation sur Alexandrin ou l'art de faire des vers à pied

Alexandrin ou l’art de faire des vers à pied, par Alain Kokor et Pascal Rabaté

« Je me présente, Alexandrin de Vanneville, poète des campagnes et des villes, arpentant les chemins de terre et de bitume, par le vent et par la pluie, sans me taire et sans amertume, je survis en proposant ma poésie ».

Ce sans-abri poète à la tête remplie de rimes est le personnage principal de cette bande-dessinée. Allant de porte en porte, il sonne chez les gens pour leur vendre ses poèmes afin de tenter de gagner de quoi manger.

Alors qu’il s’était installé sur un quai pour déjeuner, il rencontre un jeune garçon du nom de Kevin, qui, « pour être libre » comme lui-même le dit, s’est enfui de sa maison. Alexandrin décide alors de le prendre sous son aile et d’en faire son « stagiaire ». Il va ainsi lui faire découvrir la vie dans la rue. Comment aborder le client à qui l’on souhaite vendre, comment se laver, se nourrir pour très peu, … En somme comment survivre.

 Pendant tout un été, ces deux partenaires insolites vont ainsi voyager au gré des paysages, quittant plus tard la ville pour la campagne. Ils y rencontreront Lysette, une dame d’une soixantaine d’années, qui leur offrira le toit et le couvert pour la nuit. Les deux amis vont ensuite continuer de battre la campagne, nous emmenant à travers des paysages bucoliques et toujours très poétiques, dont le calme contraste avec l’agitation de la ville. Après une journée passée à flâner dans les champs, Alexandrin et Kevin offrent leur aide à un agriculteur, qui leur propose ainsi qu’à d’autres travailleurs saisonniers, de ramasser des pommes pendant plusieurs jours, pour « 15 € par jour, nourris, logés ». Durant ces deux-trois jours de labeur, Alexandrin va tomber amoureux d’une jeune espagnole, qui répond à sa rime avec de subtiles « no comprendo ». Scène d’amour dans les champs de coquelicots, danse et joie de vivre vont ainsi animés ces jours.

A la fin de ces travaux, le bonheur et la joie vont cependant peu à peu céder leurs places à la nostalgie. Kevin, qui a rencontré un jeune homme du nom de Mario, qui a le même âge que son frère, va se faire rattraper par ses souvenirs, et la mélancolie.

C’est ainsi que les deux compagnons vont rentrer à la ville. « J’ai passé de bons moments, tu m’as appris tellement … Mais je pense qu’il est temps pour moi de rentrer chez mes parents », dit alors Kevin, ému à son ami et maître poète. Après une scène d’adieu, empreinte de tristesse, Alexandrin repart, cette fois-ci seul.

La solitude reprend alors ses droits. En ville, tout a changé. La caissière, avec qui Alexandrin s’était lié d’amitié, a été remplacée, ses endroits où il dormait sont maintenant occupés. Peu à peu, son sens de la rime aussi le quitte. Alexandrin ne parvient plus à écrire et semble être en manque d’inspiration. À l’approche de l’automne, il quitte à nouveau la ville, pour aller retrouver Lysette, la dame sympathique qui les avait accueillis, lui et Kevin, l’été dernier. Mais la maison est à vendre, et Lysette, elle, est partie.

La neige recouvre alors les feuilles mortes et Alexandrin erre dans la forêt. Après avoir brûlé ses derniers poèmes pour se réchauffer, et en tombant sur une photo de Kevin qu’il avait gardée, Alexandrin se met alors à graver les arbres de la forêt dans un dernier élan de poésie. On le voit ainsi peu à peu s’enfoncer dans les bois, jusqu’à disparaître.

Au dégel, son manteau gît, déchiré sur une souche au bord d’une rivière.

Les arbres sont découpés, et transportés en camion. Dessus, on peut y lire les inscriptions qu’y ont été inscrites à même l’écorce par Alexandrin.

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