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Toutes les cultures se valent-elles ?

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Par   •  26 Novembre 2020  •  Dissertation  •  2 235 Mots (9 Pages)  •  707 Vues

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Toutes les cultures se valent-elles?

“Il faut voyager pour frotter et limer sa cervelle contre celle d'autrui” affirme l’humaniste Montaigne pour inviter au voyage, à la découverte d’autrui. Pour l’auteur des Essais, aller à la rencontre d’autres cultures permet non seulement de s’enthousiasmer pour la nouveauté mais aussi de réfléchir sur soi-même, de prendre un recul bénéfique. Cela laisserait entendre que l’on peut comparer des cultures. Toutes les cultures se valent-elles? Autrement dit, si une culture se définit par un ensemble d’habitudes, de valeurs, une histoire singulière et sa diffusion, est-il possible et par la suite souhaitable de l’évaluer au regard d’une autre? Considérer que deux éléments se valent, cela revient à leur attribuer une note, une fonction et sans doute un prix (chiffré ou affectif). Deux équivalents peuvent en général s’interchanger ou du moins s’équilibrer. Cependant, lorsqu’il s’agit de culture, comment jauger ? D’une part, une culture est par nature singulière, elle constitue une signature, un moyen d’identifier un groupe ou une personne: en cela elle correspond à un processus de différenciation. D’autre part, une culture réunit, fédère, regroupe: en cela, elle crée un phénomène d’unification. Dès lors, quel critère permettrait d’évaluer des cultures afin d’imaginer qu’elles se valent? Mais surtout, pourquoi voudrait-on le faire et que gagnerait-on à ce que des cultures se valent?

Ainsi, se demander si toutes les cultures se valent invite à chercher pourquoi comparer ce qui, par essence, invite à ne pas établir de jugement? Pourquoi vouloir évaluer les cultures?

Il va s’agir d’examiner si les cultures peuvent, en fait, être comparées et comment, puis d’interroger les motivations qui pousseraient à le faire, afin d’évaluer si, en droit, de manière légitime, il convient que les cultures se valent.

Peut-on comparer des cultures? Est-ce sensé de chercher à les évaluer entre elles alors que le principe d’une culture est d’être singulière?

La culture semble tout d’abord définir nos moeurs, des coutumes. Celles-ci diffèrent en fonction du modèle de société, du pays, de la région ou même du quartier dans lequel on vit. De plus, ces différentes cultures peuvent être objectivables, observables et analysables par des anthropologues, sociologues, historiens, qui semblent en mesure et en droit de les comparer. Si l’on prend l’exemple d’un historien, il confronte objectivement, un thème commun à plusieurs cultures en essayant de les mettre en perspective comme dans une guerre lorsqu'un pays dispose de moyens plus modernes et plus efficaces de combat, l’historien étudie l’approche d’une guerre en fonction du pays, de la culture. Ainsi, l’analyse puis la comparaison d’une culture peut se faire dans le but simple d’une étude élaborée. La culture se met au service de l’éducation, de l’apprentissage et de la recherche dans le sens où étudie la culture de la guerre.

Cependant, mettre en regard ces cultures est-il neutre ? Cela relève-t-il d’une volonté de comprendre, d’apprendre ou de juger? L’évaluation n’est pas inévitable? En effet, comparer des cultures, c’est souvent les concevoir dans une forme de verticalité et pas seulement d’horizontalité. Même déterminé à éclairer les enjeux de chacune, à expliquer les ingrédients, les caractéristiques et autres, l'esprit humain a tendance à émettre des préférences et des réactions de jugement. Que ce soit dans un sens où dans l’autre et peut être même avec un avis neutre, notre esprit s’octroie naturellement le droit (ou le devoir) d’établir une hiérarchie d’ordre moral comme c’est le cas dans le Supplément au Voyage de Bougainville de Denis Diderot. Pendant son discours, le vieillard Otaïtien défend son modèle: celui de la polygamie, du respect de la nature et de l’hospitalité face à l’Européen (qui est par ailleurs l’oppresseur) qui en incarne un autre: celui de la conquête, de la monogamie et du matérialisme. Les deux modèles possèdent certainement défauts et vertus mais le texte oriente tout de même vers un jugement favorable aux valeurs des otaïtiens représentants du “mythe du bon sauvage”, comme s’il n’était pas possible de ne pas établir une échelle de valeurs entre ces deux façons de vivre.

Finalement, ne juge-t-on pas toujours d’après sa propre culture? Notre culture n’influence-t-elle pas l’appréciation de la culture voisine? Même sans formuler de “jugement” au sens d’évaluation, chacun appréhende, découvre et accueille une autre culture, en l'appréciant d’après ce qu’il connaît lui-même. Ainsi pour découvrir avec objectivité, bienveillance, une culture différente, il faudrait d’abord se dépouiller, se défaire de sa propre culture. Sans cela, notre regard est biaisé. C’est ce que Romain Gary réussit à faire lorsqu’il dépeint la situation des États-Unis dans la fin des années 1960 dans son roman autobiographique Chien Blanc. Effectivement, Romain Gary réussit à se détacher de ses connaissances et de ses idées pour faire l’analyse de la société américaine en pleine lutte contre la ségrégation raciale. Ce qui prouve que son analyse de la “culture” américaine se détache de toute culture acquise, c’est que ce roman n’est pas uniquement encensé pour sa critique du racisme mais il l’est autant pour sa critique de l'antiracisme des privilégiés blancs de Beverly Hills qui s’engagent également pour les droits civiques des Noirs américains. En outre, ce qui donne accès à une vision aussi claire et complète de la situation se fait par le point de vue extérieur et détaché de la culture de Romain Gary, c’est une perspective que l’on retrouve rarement lorsqu’il y a “analyse et comparaison de culture”.

Suite à cela, on peut alors se demander pourquoi vouloir comparer les cultures? Que cherche-t-on à faire ?

Vouloir comparer des cultures peut traduire une intention louable, “humaniste” qui serait d’une part d’augmenter la connaissance globale sur les cultures, et d’autre part de “restaurer” la dignité, la valeur et la force d’une culture oubliée, dénigrée ou interdite. L’idée va alors dans le sens de la justice et devient légitime. Le but n’est pas de déprécier une culture mais plutôt de rappeler le combat, les valeurs et les souffrances d’une autre culture dont les mémoires semblent être passées à la trappe. Avec l’aide de Léopold Sédar Senghor et Aimé Césaire, le courant

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