Revolutions; Ce qui est « révolutionnaire ».
Résumé : Revolutions; Ce qui est « révolutionnaire ».. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Corentin Barrou • 19 Janvier 2022 • Résumé • 1 609 Mots (7 Pages) • 406 Vues
REVOLUTIONS : PRESENTATION GENERALE : DEFINITIONS ET PROBLEMES
- Ce qui est « révolutionnaire », et les révolutions
Ce qui est révolutionnaire introduit un changement tel que le monde s’en trouve irrémédiablement transformé. Pourtant, peut-on dire que ce qui est « révolutionnaire » implique nécessairement une révolution ? En effet, certaines innovations ou certaines formes d’organisation du travail ont été décisives pour notre modernité, que ce soit sur le plan social, économique ou politique2 . A quelles conditions peut-on dire que nous avons affaire à une véritable révolution, et non à de simples simulacres de révolutions ?
Thomas Kuhn, dans La structure des révolutions scientifiques :
Les révolutions politiques commencent par le sentiment croissant, parfois restreint à une fraction de la communauté politique, que les institutions ont cessé de répondre d’une manière adéquate aux problèmes posés par un environnement qu’elles ont contribué à créer. De semblable manière, les révolutions scientifiques commencent avec le sentiment croissant, souvent restreint à une petite fraction de la communauté scientifique, qu’un paradigme a cessé de fonctionner de manière satisfaisante pour l’exploration d’un aspect de la nature sur lequel ce même paradigme a antérieurement dirigé les recherches. Dans le développement politique comme dans celui des sciences, le sentiment d’un fonctionnement défectueux, susceptible d’aboutir à une crise, est la condition indispensable des révolutions.
∙ Les paradigmes sont des « découvertes scientifiques universellement reconnues qui, pour un temps, fournissent à une communauté de chercheurs des problèmes types et des solutions4 . ». Il construit une théorie du progrès scientifique fondée sur l’idée que celui-ci repose sur des révolutions.
∙ La nuance vient de ce que, dans les sciences, le sentiment d’insuffisance provient « souvent » d’une partie de la communauté, alors que c’est « parfois » le cas dans les révolutions politiques. Cela veut-il dire que les révolutions politiques peuvent aussi provenir d’une majorité en colère, ce qui n’est jamais le cas pour les sciences ? En effet, celles-ci ne sont pas l’affaire du peuple, mais d’une communauté savante, instruite et professionnalisée.
∙ Enfin, la révolution ne peut émerger que sur fond de « crise » (verbe grec krinein, « décider », « faire un choix »). Sur les plans scientifiques et politiques, il faut donc d’abord un moment de grande instabilité ou de grande incertitude qui oblige à prendre une décision radicale, laquelle rendra impossible la stagnation ou le retour en arrière.
Une révolution est un changement brusque qui produit des transformations durables.
- La révolution, retour du même ou progrès ?
En physique, la « révolution » désigne un mouvement orbital périodique d’un corps céleste qui le ramène au même point. Applicable à la politique ? Le guépard de Lampedusa : « il faut que tout change pour rien ne change » (le neveu du prince de Salina : voit imminence de changement radical qui se profile, le prince : convaincu que rien ne changera en dépit de l’agitation ambiante)
La révolution, en dépit de ses bouleversements apparents, ne changera rien à un certain ordre social ? Si la révolution met à fin à un certain ordre social et politique, et qu’elle y substitue un autre en maintenant les inégalités dont elle prétendait nous débarrasser, n’aura-t-elle pas été qu’une illusion ? Marx considère qu’en 1789 la révolution a transformé les structures étatiques à l’aide de la bourgeoisie, il reconnaît qu’elle a prolongé une tendance déjà présente sous la monarchie (notamment la centralisation du pouvoir). Ce sera, en revanche, en juin 1848 que la révolution aura un vrai contenu social, puisqu’il s’agira d’une véritable lutte du peuple contre la bourgeoisie en place. De la même manière, les révolutions arabes de 2011 ne semblent pas avoir réalisé toutes les promesses qu’elles contenaient. Ainsi, en Egypte, malgré la mise au ban de Moubarak et le désir de progrès social, le maréchal al-Sissi, réélu en 2018, est considéré comme un dictateur par les analystes et ses opposants.
Peut-être faut-il modifier l’échelle qui permet d’appréhender les révolutions politiques : considérées sur le court terme, elles paraissent opérer un retour du même plutôt qu’une rupture radicale avec le passé. A quel moment peut-on alors dire qu’une révolution est terminée10 ? La Révolution française ne s’est pas limitée à la prise de la Bastille, qui n’a été qu’un moment de révolte. Appréhender une révolution suppose de se placer sur un temps long, car il s’agit d’un évènement qui dure. Encore dans processus révolution française ?
3)Les signes de la révolution
Une révolution ne se caractérise donc pas tant par ses causes ou par la « nature » des actes révolutionnaires que par ses effets à long terme. Il y a donc un nécessaire décalage entre les acteurs de la révolution et le résultat de leurs actions, puisqu’il faudrait avoir mesuré ce qui, par nature, ne sera peut-être visible que dans le futur. Ainsi, le mouvement des gilets jaunes a-t-il été le point de départ d’une longue révolution qui sera reprise et continuée, ou n’aura-t-il été qu’une révolte éphémère ? Kant, qui pensait que la destination morale de l’humanité nous oblige à penser un progrès dans l’histoire, se demandait ainsi quel pouvait être le « signe historique » qui nous indique un tel progrès. Un acte, même humble, de désobéissance peut y participer : c’est ce que montre le film La révolution silencieuse, de Lars Kraume, sorti en 2018. Tout commence par une minute de silence observée par une classe à la mémoire des hongrois morts en résistant aux russes, alors que l’occupation soviétique est à son apogée. On ne peut pas voir dans cet événement le signe de « la » révolution tout entière, mais bien une contribution au mouvement qui amènera, cinq ans plus tard, la chute du mur de Berlin. Kant souligne que c’est l’universalité de l’intérêt qui importe : le révolutionnaire n’est pas un hors la loi préoccupé par ses intérêts personnels.
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