Peut on ne pas être soi ?

Peut-on être soi ?

En d’autres termes, peut-on être différent, autre, que soi ? Le sujet suppose une permanence fondamentale, un « soi » déterminé, défini, auquel on pourrait ne pas être fidèle. Or, dans la doctrine existentialiste élaborée par Jean-Paul Sartre ce n’est pas tant que l’on peut ne pas être soi, mais plutôt que l’on ne peut pas être soi, dans la mesure où ce « soi » n’est pas déterminé ni définissable. En effet, dans la conférence qu’il donne en 1945, et publiée en 1946, L’Existentialisme est un Humanisme, Sartre inverse la proposition des pensées essentialistes en affirmant que « l’existence précède l’essence ». La naissance de chaque homme est un surgissement au monde à partir de rien, ouvert à une infinité de possibles. C’est dans la succession de choix libres que l’homme, petit à petit, se définit de manière unique et indéterminée ; son identité, en perpétuelle évolution, se construit. Ce n’est donc pas tant qu’on n’est pas soi, mais qu’on le devient progressivement, et uniquement par nos actions (« l'homme n'est rien d'autre que ce qu'il se fait ») : l’homme est un projet libre. Au « Deviens ce que tu es » de Nietzsche (Ainsi Parlait Zarathoustra), Jean-Paul Sartre semble intimer à l’homme qu’il sera ce qu’il aura choisi de devenir. D’une certaine manière, c’est un peu comme si l’on ne pouvait coïncider avec soi, complètement, qu’au terme de l’existence, après la mort, et être alors, véritablement, ce que l’on a été, a posteriori : « L’homme […] n’est rien d’autre que sa vie »

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