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Penser c'est dire non

Dissertation : Penser c'est dire non. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  10 Décembre 2018  •  Dissertation  •  2 572 Mots (11 Pages)  •  4 149 Vues

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Voici le texte « Penser, c’est dire non. Remarquez que le signe du oui est d’un homme qui s’endort ; au contraire le réveil secoue la tête et dit non. Non à quoi ? Au monde, au tyran, au prêcheur ? Ce n’est que l’apparence. En tous ces cas-là, c’est à elle-même que la pensée dit non. Elle rompt l’heureux acquiescement. Elle se sépare d’elle-même. Elle combat contre elle-même. Il n’y a pas au monde d’autre combat. Ce qui fait que le monde me trompe par ses perspectives, ses brouillards, ses chocs détournés, c’est que je consens, c’est que je ne cherche pas autre chose. Et ce qui fait que le tyran est maître de moi, c’est que je respecte au lieu d’examiner. Même une doctrine vraie, elle tombe au faux par cette somnolence. C’est par croire que les hommes sont esclaves. Réfléchir, c’est nier ce que l’on croit. Qui croit ne sait même plus ce qu’il croit. Qui se contente de sa pensée ne pense plus rien. »

Le passage proposé est un extrait de « Penser c’est dire non » écrit par Alain. Alain de son vrai nom Émile-Auguste Chartier est un philosophe Français de la première moitié du 20eme siècle.

Alain affirme dans ce texte que réfléchir c’est nier ce que l’on croit en disant non à sa propre pensée et pas seulement à ce qui nous est extérieur.

Au sens large, penser équivaut à avoir une représentation mentale, c’est-à- dire avoir une idée. La pensée est donc l’une des caractéristiques essentielles de l’homme. À l’évidence, l’homme n’a pas seulement un corps ; il a aussi un esprit, et de ce fait, il « pense », il a des représentations mentales, plus ou moins complexes.

Au sens strict, penser équivaut à réfléchir. Qu’est-ce que penser au sens de réfléchir ? Alain se propose de répondre à cette question. Il formule d’emblée sa thèse, de manière brève : « Penser, c’est dire non » (ligne 1). Dès le début du texte , une telle affirmation est étonnante : à première vue Alain identifie l’activité de penser au fait de « dire non », c’est-à-dire à l’acte de nier, ce qui semble non seulement réducteur, mais aussi arbitraire. Nier n’est qu’une opération parmi tant d’autres : lorsque nous réfléchissons, nous pouvons nier mais aussi affirmer. Pourquoi Alain fait-il de la négation l’essence même de la pensée ? Toute pensée serait-elle négative ? Par ailleurs lorsqu’on dit non c’est toujours à quelque chose ou à quelqu’un, mais à quoi faut-il dire non ?

Nous pouvons observer qu’au fil du texte, Alain justifie puis précise sa

thèse : « Réfléchir, c’est nier ce que l’on croit » (ligne 10-11). Dans un premier temps nous verrons (du début du texte jusqu’à : « Il n’y a pas au monde d’autre combat » ligne 6 ), qu’Alain établit que, si penser, c’est dire non, c’est à soi-même qu’il faut dire non. Le fait de penser est associé au fait de réfléchir, c’est donc, avant tout, opérer un retour sur soi-même, prendre du recul sur ses propres pensées pour pouvoir les examiner.

Ensuite, dans un second temps (à partir de la ligne 6 : « Ce qui fait que le monde me trompe... » jusqu’à la fin), il démontre que l’absence de réflexion a des conséquences néfastes, à la fois dans le domaine théorique et dans le domaine pratique, et plus précisément, politique. Il revient alors sur les

trois thèmes auxquels il a fait une très brève mais importante allusion dans la première partie (le monde, le tyran, le prêcheur).

Nous procéderons à l’étude ordonnée de ce texte afin d’en dégager l’intérêt philosophique.

Alain introduit le passage par une affirmation « Penser c’est dire non », malgré la simplicité de cette affirmation , on peut émettre d’emblée deux objections.

La première étant que l’affirmation peut sembler réductrice car penser ne peut pas être réduit au simple fait de dire non, c’est également dire oui. Néanmoins l’homme peut certes dire « non » à des affirmations fausses mais il doit aussi dire « oui » à celles qui sont vraies. Par exemple, on ne peut pas dire non à la proposition : « 2+2=4 » ; dans ce cas, précisément, penser, c’est dire oui. Il n’y a donc, à première vue, aucune raison de réduire, comme le fait Alain, l’activité de penser au simple fait de nier.

La deuxième objection présente ici est que si penser ce n’est pas nécessairement dire non alors dire non ce n’est pas nécessairement penser. Suffit-il de nier pour penser ? Nous pouvons douter de cette question car on peut dire non sans forcement avoir pensé aux répercutions. Dire non à tout, tout le temps, serait absurde, relèverait de la pure et simple bêtise. La formule d’Alain est donc si générale qu’elle peut sembler arbitraire. Or, Alain ne se contente pas d’affirmer sa thèse : il la justifie aussitôt avec un premier argument.

« Remarquez que le signe du oui est d’un homme qui s’endort ; au contraire le réveil secoue la tête et dit non. » (ligne 1-2) . Alain interpelle le lecteur en proposant une interprétation de ce qu’est dire « oui » et de ce qu’est dire « non ». Alors Alain affirme que lorsque qu’on dit oui on se résout à répondre sans penser, sans donner d’explication : on est passif. Il emploie là le mot « s’endort » pour justifier de cette affirmation: lorsque qu’on dit oui on ne mobilise pas nos capacités intellectuelles on répond juste « oui » bêtement. A contrario dire « non » c’est nier, refuser, manifester son désaccord. C’est également penser et lorsqu’on pense on est attentif à tous les stimulis environnants. Métaphoriquement dire « non » c’est être réveillé. Il y aurait, par conséquent, un lien entre le fait de dire non et celui d’être actif. Alain

pose la question et énonce trois hypothèses : « Non à quoi ? Au monde, au tyran, au prêcheur ? »(ligne 2-3). Ces trois hypothèses seront reprises plus loin, pour finalement être rejetées. Alain étant concis, il faut essayer d’expliciter ce à quoi il fait allusion.

Le monde : deux interprétations sont ici possibles. Par « monde », on peut comprendre la réalité sensible, mais aussi la société. Dans le premier cas, le penseur, c’est celui qui « dit non » aux apparences sensibles : se méfiant de ses perceptions, il cherche l’être véritable, ce qui est « réellement réel ». Dans le second cas, le penseur, c’est celui qui « dit non » aux opinions qui sont véhiculées par les autres, et par la société, en général ; c’est donc celui qui s’oppose à l’opinion commune. Ces deux interprétations sont possibles, mais la suite du texte nous permet de trancher en faveur de la première

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