Le désir cas
Dissertation : Le désir cas. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Rubkars • 28 Septembre 2016 • Dissertation • 3 386 Mots (14 Pages) • 1 084 Vues
Du matin au soir, nous ne cessons d'éprouver des désirs. Certains nous abandonnent à peine éclos, d'autres nous hantent et nous tenaillent la vie durant. Nous sommes comme ces chasseurs qui, délaissant la proie pour l'ombre, poursuivent en vain un gibier qui ne cesse de leur glisser entre les doigts. Comme le chasseur, nous éprouvons un désir, c'est à dire une envie, un souhait, conscient. Mais ce gibier, comme le désir, ne serait-il pas sage d'arrêter de le pourchasser? Ainsi, il semble être plus modéré, réfléchi et prudent de borner ses désirs, c'est à dire les restreindre, les réduire, voire les arrêter, que de les laisser sans bornes. A la question: est-il est sage de vouloir borner ses désirs? La première réponse qui vient alors à l'esprit est une réponse positive. Et pourtant, cette inclination immédiate et semblant évidente ne va pas de soi car le désir est propre à l'être humain et le définit essentiellement: vouloir mettre des bornes au désir, et donc à ce qui définit l'homme, ne serait-ce pas risquer de nier la nature de l'homme? Est-il donc vraiment sage de vouloir borner le désir humain? Notre idée de la sagesse s'accompagne d'un contrôle de nos passions. La sagesse, c'est arriver à introduire un ordre et une certaine constance dans notre comportement. dans un premier temps, nous analyserons la nature de l'homme en tant qu'être de désir capable certes de sagesse mais dont la sagesse ne peut pas signifier la négation de ce qu'il est, de son essence. Nous nous attacherons donc par la suite à ce qui semble être la contradiction humaine: la difficulté qu'il a à être sage et désireux à la fois. Comment sortir de cette contradiction? Car le désir est source de souffrance, comme nous le verrons dans notre seconde partie. Cette souffrance est liée à l'infinité du désir humain. Nous verrons alors comment introduire une limite qui n'est pas une négation de nos désirs mais leur accomplissement mesuré. Et ce sera pour nous une définition de l'être moral de l'homme.
Dans un premier temps, nous allons donc étudier l'homme en tant qu'être de désir.
D'abord, il est important de faire le contraste entre le désir et le besoin. L'homme se distingue en effet de l'animal car le désir est propre à l'humanité. Certes, l'homme éprouve des besoins mais il n'est pas, à la différence de l'animal, seulement un être de besoins. Ainsi, le besoin caractérise l'état de l'organisme lorsqu'il est privé de ce qui assure son fonctionnement: j'ai besoin de boire, manger, respirer ou de dormir , et si ces besoins ne sont pas pleinement satisfaits, c'et on corps qui ne peut durer. Les besoins assurent la survie de l'espèce et ont donc un caractère nécessaire que le désir n'a pas. Le besoin est l'expérience d'un manque dont la satisfaction est obtenue par des moyens physiques, c'est à dire naturels. Il y a une part d'animalité en l'homme mais l'homme est plus complexe que cette part d'animalité. Cette complexité se voit à travers le désir. En effet, le désir, "béance", reposant sur un manque, se définit comme la tendance consciente à combler un manque. Mais affirmer que le désir est un manque ne suffit pas pour le définir strictement car le besoin nait du manque: le désir est aussi production de soi même et création de conscience. Or selon Spinoza, le désir est l'essence de l'homme, c'est à dire qu'il engendre pleinement l'être humain. Il nous dit que "Le désir est l'appétit avec conscience de lui même": Spinoza souligne ici que l'homme ne fait pas que tendre vers la satisfaction d'un besoin mais qu'il réfléchit à cette tension dans le moment où il l'éprouve. Je peux ressentir la faim mais le seul fait que me dire à moi même que j'ai faim engendre des images de ce qui pourrait me satisfaire. Je ne fais pas seulement que rechercher une nourriture qui comblera ma faim, mais je désire certains mets qui me satisferont autrement que n'aurait été satisfait un animal. Je sais ce que j'aime. J'y pense. Et le seul fait d'y penser fait naitre de nouveaux désir. Cette conscience, qui s'ajoute à l'appétit et qui le complique, est bien le propre de l'homme. Spinoza voit donc dans le désir l'essence de l'homme, le mouvement par lequel nous nous efforçons de persévérer dans notre être : selon Spinoza, l'homme est animé par ce qu'il appelle le conatus, défini comme le « désir de persévérer dans son être ».
. L'homme vise alors plus haut que le maintien de son espèce: l'homme ne fait pas que se conserver, il évolue, il grandit , il passe d'un état à un autre au fil de son l'histoire. Ce qui s'ajoute à l'appétit, au besoin, ce sont les pensées, ses désirs.
Aussi, en désirant, l'homme satisfait certains plaisir. Or la satisfaction permet d'accéder au bonheur. Dans ce cas, on peut dire que le désir fait vivre. En effet, les désirs positifs et bénéfiques, à commencer par le désir de connaissance qui caractérise la démarche de la "philosophie", ce qui signifie, "recherche de la sagesse". Or si l'action de désirer en soi permettrait d'accéder à la sagesse, pourquoi vouloir borner les désirs de l'homme? C'est donc la condition humaine que de désirer différentes choses, et donc toujours autre chose que l'on a. Si pour continuer l'exemple amorcé plus haut, une fois après avoir demander à manger, on me donne une banane. Mais je vois mon ami qui mange une pomme, donc je demande une pomme. Si on me sert cette pomme, alors je serai plus heureux. Nous pouvons donc en déduire que ce qui est vraiment désirable dans le désir, c'est le fait même de désirer, qui permet d'éprouver cette sensation délicieuse de vivre, d'être porté par une dynamique qui semble donner un sens à notre existence. Il semble peu probable d'imaginer une vie au cours de laquelle on ne désirerait rien, sinon une vie triste et morne. Sans désir, il n'y a donc pas de bonheur véritable, or celui qui ne serait habité par aucun désir, c'est à dire par rien, ne serait il pas mort? Or mort, comment exercer une sagesse? Le sage ne saurait en effet vivre sans désirs puisqu'il y a des désirs nécessaires.
Ainsi, si le désir est l'essence de l'homme, s'il constitue le mouvement même de la vie, il semble nécessaire, pour élaborer une sagesse, de prendre en compte le désir, manifestation vitale par excellence. Toute vraie sagesse se fonde sur le désir. Mais au lieu de vouloir borner les désirs, il faut établir une hiérarchie des désirs: établie par Epicure, ce dernier fonde ainsi une sagesse prenant en compte le corps, mais permettant cependant à l'être humain de sauvegarder sa liberté intérieure. Epicure dit "Il faut se rendre compte que parmi nos désirs, les uns sont naturels, les autres sont vains, et que, parmi les premiers, il y en a des nécessaires et d'autres naturels seulement. Enfin, parmi les nécessaires, il y en a qui le sont pour le bonheur, d'autres pour la tranquillité continue du corps, d'autres enfin pour la vie même". Lorsqu'Epicure évoque des désirs naturels, il prend soin d'y repérer deux niveaux: si les désirs sont naturels et nécessaires (renvoient au besoins physiologiques) doivent être satisfaits, il convient de réfléchir avant de céder aux désirs naturels mais non nécessaires. Il s'agit en effet de mesurer le plaisir que peut nous apporter leur satisfaction: "bien manger" par exemple, même si c'est sur le moment un plaisir, peut ensuite être source de douleur, et mieux vaut alors s'abstenir. Ainsi, si les désirs ne sont pas tous souhaitables, ne serait il pas bénéfique pour l'homme de vouloir les borner? La sagesse consiste à contrôler les désirs, les envies et impulsions que l'homme a en lui: comment faire, alors, pour être sage sans retomber dans l'animalité?
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