Le corps et l'esprit

Chapitre 2 : Le corps et l’esprit

Introduction :

1. Identité et différence

Le premier point à souligner est que nous (= les êtres humains) distinguons ordinairement et sans avoir besoin de trop y réfléchir, le corps et l’esprit. La dualité corps/esprit est intuitive.

Définition intuition : connaissance immédiate, qui ne suppose pas un effort de réflexion.

La preuve de ceci est que nous parvenons sans efforts à concevoir que quelque chose que l’on appellera « l’esprit » survive à quelque chose qu’on appelle le corps. On arrive aussi à concevoir que cette « esprit » aille se loger ailleurs que dans notre corps.

Exemple : Nous comprenons ce que les indouistes veulent dire lorsqu’ils parlent de métempsycose (méta = au-delà, psyché = âme), également connu en tant que dogme de la réincarnation. Pour les indouistes, selon la nature de nos actes durant notre vie, nous nous réincarnerons en telle ou telle chose. Nous concevons sans difficulté le dogme de la métempsychose.

Le présupposé d’un tel dogme est qu’il y a une différence de nature, une différence substantielle, entre l’âme d’un côté et les corps qu’elle habite successivement. De même, même si nous n’y croyons pas, nous concevons sans trop de souci ce qu’un romancier veut dire lorsqu’il parle d’une histoire de fantôme. Cela veut dire que lorsque l’on nous parle d’un esprit sans corps ça ne heurte pas notre sens logique. Encore une fois, c’est la preuve que la dualité corps esprit est complètement naturelle.

Autre exemple : Norbert Wiener, fondateur de la cybernétique, dit une phrase qui est resté très célèbre : « Avec les progrès de la technique, on pourra bientôt « télégraphier un Homme » ». Il veut dire que ce qui fait l’Homme est sans doute réductible à un flux d’information et que ce flux d‘information peut passer d’un corps à un autre.

Autre Exemple : Quand Elon Musk dit qu’un phénomène qu’on appelle l’esprit peut être détaché du corps, on comprend ce qu’il dit, ça ne blesse pas notre sens logique.

Autre exemple : le complexe physique.

Dans un complexe tel qu’il soit, quelqu’un éprouve qu’il y a une absence de correspondance entre son corps et lui-même. Le corps ne traduit pas l’esprit mais il le trahit. C’est pour cela que les chirurgiens font fortune. Si l’on s’identifiait entièrement à notre nous n’aurions aucune envie de le changer. Si la jeune fille s’identifiait pleinement à son corps elle ne pourrait pas trouver son nez disgracieux. Sema Soma vient de l’orphisme (religion d’Orphée, ancienne religion grec).

[Orphée est un séducteur car c’est un poète (= celui qui maitrise l’harmonie). Après avoir perdu Eurydice, il est plein de chagrin et les ménades (= servante de Dionysos) viennent voire Orphée pour qu’il chante pour eux, et ce dernier refuse car il est rempli de chagrin. Ainsi, il refuse de donner l’harmonie. Les ménades pulvérisent alors son corps. Corps qui finit pulvérisé car il ne veut plus assurer l’harmonie. Pour l’Orphisme, l’incarnation est une incarcération (Sema Soma). Dans cette religion les hommes sont des âmes ayant fait une faute qui sont alors jeté dans la matière. Pour l’Orphisme le corps humain est avant tout une prison, une geôle. Quelque chose qui fait obstacle à l’âme. Qui contient l’âme ou l’esprit. Nous comprenons ce dogme.]

Exercice : Une croyance/Une téléphone portable/La grande muraille de Chine/La connaissance du théorème de Thalès/Le souvenir d’un soir d’hiver…

Consigne : Ranger chacun de ces termes dans 2 colonnes. Colonne 1 = fait psychique / Colonne 2 = fait physique.

Qui va mettre souvenir d’un soir d’hiver dans la catégorie fait physique ?

Qui va mettre la grande muraille de Chine dans la catégorie fait psychique ?

Cet exercice est très intéressant car sauf exception personne ne rangera le téléphone portable dans les faits psychiques. Conclusion : Nous faisons intuitivement la différence entre le corps et l’esprit. 

Renversement :

Mais bien que cette différence soit parfaitement intuitive nous constatons par ailleurs et cela tout aussi quotidiennement que les états de notre corps varient en même temps que les états de notre esprit.

Exemple : Le mouvement volontaire (= ce que l’on appelle une action).

Dans ce cas-là, le corps répond à une impulsion qui vient d’ailleurs que de lui, qui vient de l’esprit. On suppose à ce moment-là qu’il y a une relation de causalité entre le corps et l’esprit. D’ailleurs son suppose que cette causalité va dans les deux sens.

Exemple : Une passion comme le sentiment de chaleur, le fait psychique est déterminé par une transformation physique.

Nous avons l’impression constante qu’il y a une causalité entre le corps et l’esprit. Mais ça ne s’arrête pas là, on suppose qu’il y a un lien d’expressivité entre le corps et l’esprit. C’est-à-dire, le corps n’est pas vu seulement comme un instrument neutre mais plutôt comme la matière vivante et expressive du psychique.

Albert Camus : « A partir d’un certain âge, on est responsable de son visage ». Le corps est le portrait de l’âme.

Le portrait de Dorian Gray, Oscar Wilde. Le principe de l’histoire est qu’il y a un tableau qui vieilli à la place de l’humain. Dorian Grey cesse de vieillir et c’est l’image du tableau qui va vieillir à sa place (roman fantastique). Mais on comprend facilement cette histoire et son intérêt est le suivant : le corps est le portrait de notre âme. Un présupposé de cette histoire est que notre corps particulièrement notre visage nous raconte, nous dit. On suppose que le corps est ce qui manifeste l’esprit. Les Homme supposent que le point ultime de cette expressivité est le mystère du regard. Les yeux seraient la matière corporelle, où quelque chose d’incorporelle se laisserait voir. Les yeux seraient une sorte de médiation psychophysique. Les hommes supposent que rien n’égale le regard pour dire l’âme.

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