Faut-il se méfier du peuple ?
Dissertation : Faut-il se méfier du peuple ?. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar piuytrxcvbn • 7 Décembre 2021 • Dissertation • 4 047 Mots (17 Pages) • 431 Vues
Dissertation de Philosophie
Appréciation :
La démocratie est souvent décrite par la célèbre phrase de l’ancien président américain Abraham Lincoln, “la démocratie, c’est le pouvoir du peuple, par le peuple, pour le peuple”. La démocratie (“demos” signifiant le peuple et “kratos” le pouvoir, autrement dit le pouvoir par le peuple), c’est donc le régime politique dans lequel la souveraineté repose sur la Nation toute entière dans un intérêt collectif. Elle apparait pour la première fois à Athènes, en Grèce, au Vᵉ siècle avant Jésus-Christ. C’est également le régime qui sortira du lot après la révolution française de 1789, le 21 septembre 1792. En effet, les politiques français ce sont inspirés de la Grèce antique, et donc du passé pour mieux décider du futur de leur pays. Bien que la Première République fut très courte, c’est tout de même ce régime politique qui avec difficulté, s’est imposé au fil des derniers siècles dans le monde. On pourrait également choisir de prendre l’exemple de la démocratie américaine, associée au libéralisme politique comme économique, qui fut victorieuse au cours de la guerre froide contre le despotisme soviétique. La démocratie parait donc être le régime politique favori de ces derniers siècles et certainement le plus susceptible d’atteindre le bien commun et la paix.
Toutefois, si la politique a pour objectif le bien commun, on peut alors se demander si le peuple est le plus compétent en ce qui concerne sa conception. En effet, les affaires politiques, qui sont très vastes et souvent complexes nécessitent une vertu remarquable et particulière, ce qui n’est pas forcément le cas de l’entièreté de la population. Ainsi ne devrions pas nous demander si le peuple est réellement le plus apte à remplir ce rôle de souverain. La politique peut-elle être l’affaire de tous ? Ou au contraire, faut-il se méfier du peuple.
Tout d’abord, nous nous intéresserons aux différents facteurs qui pourraient justifier notre méfiance à l’égard du peuple. Puis, dans un deuxième temps, nous nous focaliserons sur la nécessité de faire confiance au peuple, aussi difficile que cela peut être.
Tout d’abord, de nombreux facteurs peuvent donner naissance à des doutes en ce qui concerne la confiance accordée au peuple.
Effectivement, la race humaine peut s’avérer et s’est avérée être capable de mener à son autodestruction. Les premiers évènements qui viennent à l’esprit du commun des mortels ne sont autres que le nombreux génocides, guerres et crimes de guerres, ainsi que tous les autres vices dont sont capables les êtres humains. Plus récemment, le réchauffement climatique, qui s’avère être accéléré par les actions de l’Homme est voué à mener dans les siècles à venir à l’extinction de la race humaine. Car la montée annuelle du niveau de la mer de 3,3 millimètres, à l’instar de l’augmentation de la température terrestre moyenne (plus 0,8 degré depuis le fin du XIXᵉ siècle) ne sont pas anodins. De surcroît, la seule raison qui pousse les hommes à agir face à cette situation dramatique n’est pas la nature, l’environnement ou la santé de notre belle planète bleue, c’est le simple fait que nous, les humains, sommes également menacés par ce changement climatique. L’Homme n’est pas bon. L’Homme est égoïste, anthropocentrique. Voici ce qu’affirme notamment Thomas Hobbes, philosophe anglais du XVIIᵉ siècle et théoricien du contrat social. D’après lui, “L’Homme est un loup pour l’Homme”. L’Homme privilégie son intérêt personnel à l’intérêt commun de manière naturelle. Ce qui pose évidemment problème concernant la politique, censée apporter le bien commun à travers la paix. Également, Sigmund Freud, sociologue allemand du XXᵉ siècle et inventeur de la psychanalyse, nous éclaire sur le fait que l’Homme n’est pas fait pour vivre en société, qu’il n’est pas fait pour aimer ses semblables. En effet, chaque homme est animé par la pulsion et la destruction et non pas par innocence ou quelconque bienveillance : Freud exprime le fait que faire cohabiter les hommes, c’est faire cohabiter des adversaires. Ces derniers sont dans l’obligation de réprimer leurs pulsions pour vivre ensemble et sont a fortiori des êtres névrosés. La vision anthropologique pessimiste que nous livrent Hobbes et Freud ne donnent pas aux hommes l’image de personnes étant en capacité d’être souverains et d’offrir la paix à quiconque.
De plus, le peuple a souvent été vu au cours de l’Histoire comme incapable de se gouverner.
Même si l’une des premières civilisations connues à ce jour qu’est la Grèce antique idolâtrait ce que l’on appelle aujourd’hui la “démocratie directe”, sans délégués, Platon, l’un des philosophes les plus renommés de cette époque, et qui a inspiré une grande partie des hommes politiques et autres hommes importants au fil des siècles, est bien à l’origine même du débat et de la politique. Et pourtant, il s’est toujours montré hostile en ce qui concerne la démocratie. D’après lui, la vérité absolue prime sur l’opinion multiple ou publique, tandis que le choix de l’unité prime également sur le choix de la pluralité. Platon estime qu’il va de soi que l’élite, c’est-à-dire les philosophes sont les plus aptes à gouverner. C’est notamment ce que Platon explique à travers l’allégorie du “philosophe roi”, dirigeant de Callipolis, la cité idéale d’après Platon dans livre V de son œuvre “La République”. Le philosophe ne désirant pas le pouvoir plus qu’autre chose, son désintéressement lui permet de faire un bon usage de la souveraineté qui lui est conférée. La démocratie en revanche, laisse paraître de nombreuses failles, à l’exemple de la tyrannie de la majorité, ou encore des démagogues, qui flattent l’auditoire et le manipule comme bon leur semblent. Platon compare la foule à un “gros animal” dont la dangerosité fait passer les désirs pour des nécessités vraies aux yeux de son soigneur. Car l’homme est un être de désir. De plus, la concurrence entre les nombreux candidats provoque une surenchère de promesses, ce qui forme en dernier lieu un obstacle à la justice (en termes de morale, pas de droit). Il apparait donc que la démocratie n’est pas le régime le plus représentatif du peuple. Puisque ce dernier est trompé continuellement par différentes sources. Thomas Hobbes aborde également cette incapacité du peuple à se gouverner à travers la distinction entre le droit naturel et le droit positif. Le droit naturel, que l’on peut notamment observer dans des récits antiques comme celui d’Antigone, une tragédie de Sophocle, dramaturge du Vᵉ siècle avant Jésus-Christ, exprime le fait qu’il existe des règles communes à l’entièreté des hommes, des règles de morale, puis d’éthique qui s’opposent au droit positif, relatant des lois exprimées par une autorité souveraine, à l’instar d’un État. D’après Hobbes, le droit naturel est introuvable, car il est tout simplement irréel. Il est relatif à l’utopie, à un monde parfait où tout le monde pourrait s’autogouverner en fonction de leurs propres principes moraux, sauf que sans même mettre en pratique cette théorie, elle s’avère être immédiatement irréalisable. En effet, le mieux est toujours l’ennemi du bien. Ce qui signifie que parfois il faut se contenter de ce qui se rapproche le plus du “mieux”, et pas forcément du “mieux” lui-même qui s’avère être inexistant. L’État de nature mène, d’après Hobbes à la guerre civile : c’est l’État de tous contre tous, avec comme souverain la peur. En effet, le droit naturel donne l’accès à la liberté totale, à la liberté ultime, mais cette liberté s’avère être un cadeau empoisonné puisqu’elle est toujours opprimée par la liberté des autres individus et donc par la peur d’une mort violente. Jacques Rancière, philosophe contemporain français, dévoile dans “La haine de la Démocratie” qu’il y a une certaine peur du peuple, et que cette peur provoque une méfiance envers lui et que l’on redoute de lui donner une pleine souveraineté. Par conséquent, il est nécessaire de restreindre les libertés pour mieux les exploiter. Le droit naturel de Hobbes fait que la peur prime sur la sécurité tandis que le droit positif fait primer cette fois la sécurité sur la peur. Ainsi, “la liberté réside dans le silence de la loi”. Autrement dit, la liberté existe quand on n’interdit pas de faire, mais qu’on n’y oblige pas non plus.
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