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Dissertation - Faire de la politique

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Par   •  1 Avril 2020  •  Dissertation  •  3 295 Mots (14 Pages)  •  999 Vues

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FAIRE DE LA POLITIQUE

Introduction

Au premier regard sur les mots de l’énoncé, proposons cette phrase abstraite pour définir formellement l’action politique : Un individu ou un groupe mettent en oeuvre des moyens pour un intérêt particulier. Dans cette définition on distingue trois éléments :

  • Acteurs : qui fait de la politique ? à qui revient le pouvoir ? (“un individu ou un groupe” cause efficiente)
  • Moyens : qu’est ce que/comment faire de la politique ? (cause matérielle)
  • Finalité : pourquoi faire de la politique ? (“un intérêt particulier”, cause formelle et finale)

Le premier élément que nous allons préciser est la finalité. Car il convient de s’interroger sur les moyens d’atteindre cette fin, la finalité détermine les moyens concrets. Aristote définit la cité (polis) comme diverses petites communautés unifiées en une plus grande, capable de vivre en autarcie (auto-suffisance) pour mener une vie heureuse.[1] D’autres penseurs utilitaristes comme Mill considèrent que la finalité de la politique est de maximiser le bien-être collectif, entendu comme la somme ou la moyenne de bonheur (« the greatest amount of happiness altogether », « general pleasure » [2]). Pour Hobbes, il est moins question de bonheur que de survie. Il explique que le souverain ou l’état, qu’il nomme Léviathan, fait peur aux hommes[3] pour garantir la sécurité et la paix[4] entres eux.

Dans ces différentes thèses, la finalité de la politique contient toujours des valeurs positives comme l’intérêt général ou la justice sociale, le progrès technique, l’amélioration du confort de vie… ce qui semble montrer que l’éthique guide la politique. On peut cependant douter de l’efficacité de ces finalités en pratique : les maximes morales et les connaissances théoriques sont-elles toujours suffisantes et nécessaire pour bien faire de la politique ? Cette problématique de la difficulté de l’application de l’éthique théorique sera notre fil conducteur.

Dans un premier temps nous affirmerons un idéalisme unificateur, nous expliquerons que la raison gouverne l’action des hommes, que la politique est une technique réservée aux savants et aux sages car la connaissance va toujours de pair avec la morale.

Dans un deuxième temps, nous critiquerons cette harmonie entre théorie et pratique en affirmant une vision matérialiste, empiriste en décrivant psychologiquement la place des affects et de l’égoïsme dans les actions des hommes. Nous en déduirons la nécessité des conflits entres individus et groupes et l’impossibilité de prévoir ou de maîtriser la société.

Dans la troisième partie nous affirmerons que, malgré que notre jugement se fie généralement aux apparences, malgré que les passions et l’égoïsme gouvernent une part importante de l’action des hommes et engendre souvent des conflits, malgré que la théorie politique ne rende pas compte du dynamisme et de la pluri factorialité des interactions concrètes, un agir politique moral est possible.

Partie 1

Comme évoqué en introduction, la politique est guidée par des valeurs donc sa finalité est morale. Ainsi, entre « bien commun » et « finalité de la politique » nous entendons la même chose. Quelles sont donc les facultés supérieures qui permettent à l’homme de connaître et d’agir adéquatement en vue du bien commun ? L’homme est doté d’une raison et d’une morale utiles pour gérer les affaires de la cité, ce qui fait de lui un « animal politique ». En effet, les facultés de l’esprit permettent aux hommes de penser abstraitement pour former des lois générales qui permettent finalement de prendre pouvoir sur la nature. Puisque la société est naturelle, de la même manière théorique, en utilisant sa raison l’homme comprend comment bien organiser la société. Ainsi, ceux qui savent le mieux utiliser leur raison, les savants, sont plus légitimes que les ignorants pour le pouvoir politique. Cette idée est similaire à celle de Platon dans La République. Il explique en effet que la majorité des hommes sont ignorants et pleins de préjugés (δόξα). Cet arbitraire et cette inconstance de l’opinion de la foule ne doit pas gouverner la cité. A l’inverse, la responsabilité des affaires publiques revient à ceux qui se sont élevés vers les Idées, les philosophes. Autrement dit, le plus à même de gouverner dans l’intérêt de tous est le sage. Gouverner incombe au philosophe-roi[5]. On peut s’interroger si un tel philosophe-roi existe ou si Platon ne surestime pas un peu les compétences de celui-ci. Son modèle paraît effectivement difficilement applicable aujourd’hui (à l’échelle nationale), quelles responsabilités reviennent au philosophe-roi ? Néanmoins, si la qualité de l’agir politique est proportionnelle à la quantité de connaissances, le philosophe peut s’entourer de savants pour éclairer ses décisions politiques. De plus, si tous les hommes sont naturellement raisonnés et moraux, pourquoi ne pas tous les faire participer aux affaires publiques ? La somme de leurs connaissances et leurs volontés tendraient ensemble vers le bien. Pour rousseau, l’homme tend naturellement à fonder des lois qui constituent la Volonté générale, l’égalité : « la souveraineté n’étant jamais que l’exercice de la volonté générale ne peut jamais s’aliéner (…) ».[6] Or dans l’histoire on observe des conflits entres les hommes. Est-ce parce que l’une est dépourvu de raison ou de morale ? ou alors il y a conflit parce que ces facultés ne sont pas correctement utilisées ? Comment expliquer, si l’on estime que tous les hommes tendent vers le bien, l’extrême diversité de leurs comportements ? S’ils aspirent aux mêmes finalités, pourquoi se différencient et s’opposent-ils ? Ou plus précisément, comment tenir qu’une politique unanime, qui unifie la diversité des groupes et des cultures, est possible, alors même que tous ceux qui participent à la politique semblent, en pratique, défendre des intérêts particuliers ?

Partie 2

Toutefois, comme l’explique Arendt, la réalité du monde politique n’est pas initialement celle d’une belle unité : « Les hommes, dans un chaos absolu ou bien à partir d’un chaos absolu de différences, s’organisent selon des communautés essentielles et déterminées ».[7] Apprendre la théorie politique est évidemment insuffisant pour bien faire de la politique en pratique. Car dans l’action, les affects règnent, donc l’agir politique est indépendant de la finalité idéale (du bien commun). Nietzsche par exemple s’oppose à l’idéalisme Platonicien en considérant l’homme comme un corps animé d’instincts et de pulsions ; il explique qu’il y a des affects derrière les valeurs.[8] Avant lui, Schopenhauer théorise un concept similaire à sa « Volonté de puissance », le « vouloir-vivre » qui désigne le désir de vivre à tout prix. Il écrit : « L’égoïsme, par nature, est sans borne : l’homme n’a qu’un désir absolu, conserver son existence (…) Tout obstacle qui se dresse entre son égoïsme et ses convoitises excite son humeur, sa colère, sa haine : c’est un ennemi qu’il faut écraser ».[9] Quelles sont les conséquences politique de cette thèse psychologique ? L’influence des passions sur l’action politique engendre une sorte d’individualisme dans lequel il n’y a pas d’accord commun possible entre les hommes ? Il semble plutôt que cet accord soit possible à condition qu’il ne découle pas de la raison mais des passions. Autrement dit, faire de la politique consiste à influencer (voir manipuler) les hommes en suscitant leurs émotions. C’est ainsi que dans l’antiquité grecque, des rhéteurs séduisent et persuadent la foule, qui, sous l’effet esthétique, adhère au parti du rhéteur. Il semble que le pouvoir politique implique toujours une communication entre le politicien et les citoyens, et vice-versa (particulièrement en démocratie). Cette communication peut passer par divers médiums :

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