Pourquoi et comment les stratagèmes sur lesquels sont construits certaines intrigues retiennent-ils notre attention ?
Dissertation : Pourquoi et comment les stratagèmes sur lesquels sont construits certaines intrigues retiennent-ils notre attention ?. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar beatrix.cbs • 5 Novembre 2022 • Dissertation • 1 080 Mots (5 Pages) • 534 Vues
Beatrice Cabasse 603
DISSERTATION
L'intrigue d'une pièce de théâtre est souvent construite autour d'un stratagème : grâce à sa ruse et ses manœuvres habiles, un personnage parvient à retourner une situation et crée donc l’histoire de cette pièce. Le stratagème apparaît ainsi comme un moteur dramaturgique puissant, qui provoque la curiosité du spectateur. Pourquoi et comment les stratagèmes sur lesquels sont construits certaines intrigues retiennent-ils notre attention ? Nous discuterons dans un premier temps des stratagèmes mis en place par ses personnages. Nous verrons ensuite que le spectateur est complice du stratagème. Nous montrerons enfin que l’art dramatique, lui-même est une forme de stratagème.
Une pièce de théâtre peut se créer autour d’un stratagème et ainsi construire une histoire autour de lui. Qui dit stratagème, dit stratège conduisant la ruse en virtuose. Dubois, meneur de jeu cynique des Fausses Confidences, en offre un bel exemple : c'est lui qui tire toutes les ficelles pour persuader Araminte d'épouser Dorante. Chez Beaumarchais, Figaro est désigné ironiquement par le Comte : son intelligence et sa débrouillardise lui font trouver les moyens les plus ingénieux pour sortir de situations délicates. Dans les comédies de Molière, ces personnages stratèges, valets ou servantes pleins de bon sens et d'habileté, contrastent avec les personnages autoritaires, victimes des stratagèmes, et dont les travers excitent le rire. Ainsi, dans Le Malade imaginaire, on rit de l'hypocondriaque Argan, qui se laisse berner si facilement par sa servante Toinette déguisée en médecin. Dans le théâtre de Marivaux, les victimes du stratagème suscitent plutôt l'émotion. Le spectateur des Fausses Confidences est sensible à la souffrance d'Araminte. La jeune veuve se sent manipulée de toute part ; même la confiance qu'elle mettait en Dubois se trouve trahie.
Chaque personnage met donc en évidence l’intérêt qu’il suscite. Revenons au personnage de Dubois : celui-ci apparaît comme un chef d'artillerie. Véritable metteur scène, il agit comme un double du dramaturge à l'intérieur même de la pièce. L’histoire est donc créée à partir de son stratagème. Dans Hamlet de Shakespeare, la mise en abyme résulte du stratagème imaginé par le prince danois : ce dernier demande à une troupe de comédiens de reconstituer l'assassinat de son père sous les yeux de son oncle meurtrier, afin de l'amener à se trahir.
Le recours au stratagème permet donc la création de pièce de théâtre autour des péripéties méditées par un stratège. Plus largement, on peut dire que le stratagème multiplie les complices.
Le stratagème est par ailleurs un procédé́ universel pour mettre le spectateur au cœur de l’histoire d’une pièce de théâtre. En ce sens, la fonction du stratagème n’est pas seulement destinée à la conception d’une œuvre, mais aussi, plus généralement, à favoriser l’immersion du spectateur. En effet, ce dernier se retrouve dans la situation où il connait des informations que les personnages ne savent pas. Une complicité́ s’installe alors entre le public et les comédiens, ce qui rend l’expérience immersive. Dans Les Fausses confidences, le spectateur prend plaisir à suivre les fausses confidences de Dubois : il invente une rivale à Araminte pour exciter sa jalousie. Le spectateur, par sa position singulière, jouit d’une connaissance dont les personnages de la pièce ne disposent pas. Il peut ainsi apprécier les tactiques du valet pour venir à bout de ses adversaires. Dans Ruy Blas, le spectateur, à l'instar du sombre Gudiel, est mis dans la confidence du plan démoniaque de don Salluste dès la première scène. Le stratagème joue donc un trouble jeu avec son public. Peut-on dire que l’art dramatique en est une autre forme ?
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