Paroles dans l'ombre tiré du livre II L’âme en fleur.
Commentaire de texte : Paroles dans l'ombre tiré du livre II L’âme en fleur.. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar aguillonambre • 16 Janvier 2022 • Commentaire de texte • 1 584 Mots (7 Pages) • 879 Vues
Ce poème Paroles dans l’ombre est le 15ème du livre II L’âme en fleur. Composé de 5 quatrains en alexandrins, ce poème interpelle dès le titre et dès le 1er vers. Qui se trouve dans l’ombre? Qui est ce « elle »? Qui parle? Le livre II est celui de la jeunesse et de l’amour. L’amour qui y est mis en scène est de nature diverse: c’est le sentiment amoureux passionné entre deux êtres, absolu, celui de l’humanité, de la terre, des animaux, ou plus global, celui de la vie et qui nous interroge sur la condition humaine. Nous verrons comment l’amour se manifeste dans ce poème de manière plus pâle que dans les autres poèmes et comment il est intrinsèquement lié à l’écriture.
Le poème semble suivre deux mouvements: le premier, du vers 1 au vers 15 « je le sais » nous peint une scène intérieure, l’intimité de deux être réunis au soir, l’un vaquant à son travail, l’autre jouissant du plaisir d’être à ses côtés.
A partir du vers 15, la conjonction « mais » et l’adverbe« pourtant » viennent teinter ce bonheur qui ne semble pas si idyllique.
Le premier mouvement plonge le lecteur dans une scène privée que le titre « Paroles dans l’ombre » laissait déjà supposer. Le pronom « elle » mis à l’ouverture du poème renvoie à Juliette Drouet, maîtresse fidèle de Hugo pendant cinquante longues années. Le poète fait donc parler cette dernière et rapporte ses paroles au discours direct, le lecteur devient le témoin de cette scène d’intimité entre les deux amants. Les pronoms de 1ère et 2ème personne du singulier sont quasiment en nombre égal. Le couple est donc au cœur de ce poème. Le premier vers donne le ton:
« C’est vrai, j’ai tort de vouloir mieux ;Les heures sont ainsi très doucement passées ».
Quoi demander de plus « j’ai tort de vouloir » quand ce dont on dispose est « le mieux »? L’adverbe « mieux » renchérit par les deux autres « très doucement » témoigne d’une situation parfaite. Le temps s’écoule dans un idéal absolu. Les vers 2 à 15 expliquent et détaillent cette situation et la raison première est la présence de l’être aimé: « Vous êtes là ». L’adverbe de lieu souligne la proximité physique et le champ lexical de la vue s’égraine tout au long du poème:
« Vous êtes là ; mes yeux ne quittent pas vos yeux
Où je regarde aller et venir vos pensées.
Vous voir est un bonheur».
L’un à côté de l’autre, ils semblent unis dans un espace intime protecteur. Le champ lexical de la vue accentue cette intimité et semble souligner le bonheur de pourvoir voir l’être aimé. La vue de l’être aimé suffit donc à plonger l’amante dans un bonheur parfait. La coupure à l’hémistiche du vers 5 marque cependant une pause, mimétique d’une réflexion, d’une nuance qui est verbalisée juste après:
« …je ne l’ai pas complet.
Sans doute, c’est encor bien charmant de la sorte ! » mais le doute se dissipe rapidement balayé par l’adjectif « charmant » renforcé de l’adverbe « bien » et le point d’exclamation souligne l’enthousiasme né de ce constat positif.
Les vers suivants énumèrent les actions de Juliette Drouet:
« Je veille, car je sais tout ce qui vous déplaît,
À ce que nul fâcheux ne vienne ouvrir la porte ;
Je me fais bien petite en mon coin près de vous ;
Vous êtes mon lion, je suis votre colombe ;
J’entends de vos papiers le bruit paisible et doux ;
Je ramasse parfois votre plume qui tombe; »
Les verbes « veille », « entends », « ramasse » sont autant d’actions paisibles effectuées auprès et dans l’intérêt de son amant. Le verbe « je sais » suivi du COD « tout » souligne l’osmose qui règne entre les deux êtres et la connaissance profonde que cette femme a de son amant. Les mots sont donc inutiles, et soulignons qu’il n’y a dans ce poème aucun verbe de parole excepté celui initial « elle disait » qui pourrait être interprété comme « elle pensait ». Gardienne de sa tranquillité, elle œuvre pour maintenir la quiétude dont a besoin le poète. Elle éloigne tout « fâcheux » , veille à garder le silence nécessaire à la création et s’efface dans une abnégation que souligne le groupe adjectival « bien petite » complété par le complément circonstanciel de lieu « en mon coin ». Témoin de l’écriture créatrice de l’auteur « de vos papiers le bruit paisible et doux », la femme se fait « colombe » à l’ombre de « son lion ». La métaphore du lion renvoie à la conception hugolienne du pète qui doit braver les dangers (politiques le plus souvent) pour se mettre au service du peuple. L’oiseau, ici la colombe, incarne la muse inspiratrice, voix dont le poète veut se rapprocher le plus.
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