Lettre 62 des Lettres Persanes
Commentaire de texte : Lettre 62 des Lettres Persanes. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Jihene Salhi • 10 Mai 2019 • Commentaire de texte • 1 310 Mots (6 Pages) • 3 165 Vues
Commentaire composé de la lettre 62
Il s’agit de la lettre soixante-deux des Lettres Persanes, la dix-septième lettre dans les correspondances consacrées au sérail et la deuxième de Zélis parmi ses 5 lettres en tout. Elle a comme objet la subordination « heureuse » des femmes où Zélis pense qu’il vaut mieux confier la fille d’Usbek âgée de sept ans aux eunuques noirs du sérail le plus tôt possible. Il faut l’habituer à la subordination avant que les passions la pousse à l’indépendance. Elle justifie cette idée par le fait que la phallocratie est un ordre naturel. A la fin, Zélis affirme qu’elle n’est pas moins heureuse qu’Usbek et que dans sa prison, elle est plus libre que lui. C’est ainsi que s’impose la voix auctoriale, qui repose sur la satire de l’institution orientale et métaphoriquement du despotisme occidental. Pour dévoiler cette énonciation implicite, nous étudions d’abord la cruauté de l’éducation orientale, ensuite la synthèse ironique de Zélis et de Montesquieu.
Zélis entame sa lettre par la description de l’éducation au sein du sérail, dont la fille qu’elle a eue avec Usbek est un exemple. De là , se dessine une sacralisation de cette éducation à travers le champ lexical du sacré « sainte », « sacré », « pudeur »,.. En effet, la réception d'une nouvelle jeune fille donne lieu à un vrai rite religieux, « une éducation sainte dans le sacrés murs». Par conséquent, nous pouvons déceler la structure carcérale et répressive du sérail. Grâce aux termes « intérieurs », « murs », et « renferment », nous pouvons dire que c’est un espace clos et d’étouffements physiques. Symboliquement, il est un lieu de contraintes où se jouent des rites étranges et imposés, puisque l’institution orientale dans ce harem est héréditaire. Elle exige que les enfants doivent suivre leurs parents : « leur font embrasser violemment. inspirer ». Le caractère oppressif se trouve ici renforcé par l’adverbe « violemment ». En effet, éduquer les jeunes filles signifie les habituer à la dépendance, à la servitude des hommes. Et comme on est face à un point de vue féminin posé sur l’éducation orientale qui revendique ce principe et juge même que dix ans est un âge tardif pour faire ce rituel, nous pouvons dire que Zélis a intériorisé cette servitude et même elle la savoure. Elle défend cela par l’ordre de la Nature.
Nous remarquons d’abord que les pronoms déictiques « je » et « tu » s’effacent au profit des pronoms « on », « nous » désignant les femmes en général et « vous » pour les hommes. Zélis se met dans le statut d’un porte-parole de toutes les femmes orientales et cherche à montrer que la soumission des femmes orientales s’inscrit dans la fatalité. Même la syntaxe ne manque pas d’y contribue : elle met le pronom « nous » qui réfère à la race féminine dans le statut de Cod pour six verbes. La négation se trouve aussi dans des structures hypothétiques et montre que cette servitude ne nait jamais d’un devoir ni d’un penchant. C’est écrit là-haut : « des lois » indiscutables qui font de la femme une esclave et la dépouille de son caractère humain. Les adjectifs et les verbes qui relèvent de l’esclavage le montrent : « attachés », « entrainées », « donnent ». Dans le dernier paragraphe, Zélis souligne l’injustice de la Nature qui n’a pas uniquement emprisonné les femmes « en faveur des hommes » mais elle les a dédiées à apaiser continuellement l’appétit sexuel démesuré de leurs maitres. C’est une fonction qui relève d’un ordre purement phallocratique et tyrannique dont le but est la réification de la femme et son instrumentalisation. Le paroxysme de cette tyrannie se voit dans le fait de priver cette esclave de la jouissance des plaisirs qu’elle a procurés par elle-même : « sans que nous puissions jamais gouter cet heureux état où nous les mettons » Nous pouvons même parler d’un cruel masochisme. Partant de cette image, Montesquieu élabore toute une réflexion sur la position de la femme dans la société, accusant leur acceptation de la supériorité des hommes et donc de la phallocratie. Mais, même si Zélis développe l’image de la servitude féminine, qu’elle accepte, elle semble pourtant se moquer de son maître, se
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