Lecture analytique "Une charogne " de Baudelaire

«Une Charogne», Les Fleurs du Mal (Spleen et Idéal) Baudelaire

Introduction : Poème extrait de la section «Spleen et idéal» des Fleurs du Mal, «Une Charogne» décrit la promenade d’un couple interrompue par une vision d’horreur : l’apparition d’un cadavre en décomposition. Ici c’est la charogne et non la femme aimée qui se place au centre du poème. 

(Annonce du plan selon la question : Derrière l’ironie de Baudelaire dans le mélange du Beau et du Laid  et dans le détournement d’une scène amoureuse traditionnelle, se cache une réflexion sur l’Art et la Poésie.)

Note sur l'auteur : Son recueil le plus célèbre, Les Fleurs du Mal, montre un poète tiraillé entre le spleen et l’idéal, le mal et le bien, la laideur et la beauté.

Ce recueil a choqué la bourgeoisie bien-pensante de l’époque pour sa volonté de mêler le beau et le sordide, le bien et le mal. Point majeur du recueil = provocation. Il transforme l'abjecte en objet esthétique (cf Gautier, Parnasse).

→ Le spleen est le mal-être baudelairien. Il s’agit d’un état dépressif et morbide ressenti par le poète.

Problématiques :  - En quoi ce poème peut-il être une mise en abyme de la création poétique ?
                            - Quels sont les enjeux de la description de la charogne ?
                            - Commenter la comparaison entre la charogne et la femme.         Que peut-on en déduire ?
                            - Analyser la progression du récit dans le poème

                             -Quelle rôle jouent les oppositions dans ce poème ?

Annonce du type de lecture et du plan (ici axes du plan) : Lecture composée.

Plan

1. Le poète s'adresse à une jeune femme

• Rimes féminines et masculines alternées = impression d'échange, dialogue, écho …
• « nous » pronom perso → union narrateur et jeune fille
• Passé simple → récit rétrospectif « nous vîmes » = rappelle ses souvenirs à une jeune fille (narratif → psg deux promeneurs, « charogne », chienne)
• Courtoisie, vouvoiement P2 « rappelez », « dites » … = relation précieuse
• Apostrophe méliorative « mon âme » → éloge romantique
• Cadre spacio-temporel « sentier », « matin » → cadre propice à la promenade romantique
• MAIS fin du poème « je » = distance crée

1. La description d'une charogne

• V.4 à 37 imparfait descriptif → texte centré sur la description de la charogne
• Rimes toujours suffisantes ou riches (+équivoquées = homonymie et jeux sur le son d'un mot au sens différent) = recherche de versification pour la description d'une charogne

• Les sens : -odorat «puanteur »                     =Description riche en sens, travail.

                 -ouie «étrange musique »

                 -vue «vîmes », « regardait »

                 -toucher «épais », « brûlante »

                 -goût «cuire à point »

• « bourdonnaient », « coulaient », « sautaient » → analogie vivant/mort par les verbes de mouvement + « bataillon de larves », « se multipliant », « centuple » → multiplication, indénombrable + pluriel = effervescence, microcosme.
• Forme du poème (sorte de vagues) + enjambement = donne une impression de reflux donc de vivant + allitération [s] et [l] = mouvement + polyptote « vivant/vivait »
• Analogie/comparaison « lit », « lubrique », « brûlante », « ventre » = allusion sexuelle (association beau/laid) + assonance en nasales [en], [é] (strophe 2, « nonchalent »)
• «Parodie du lyrisme (surabondance) dans la description d'une charogne qui crée un décalage « mon âme », « ! » … + hyperbole «étoile de mes yeux »
• « vous crûtes » = passé simple → langue très soutenue « telle vous serez » (inversion)+ phrases complexes et longues = préciosité langagière pour une charogne = burlesque 
• Evocation de l'esthétisme « cynique », « nonchalente » = B décrit peut-être sa propre écriture …
• Oxymore « carcasse superbe » → décalage = potentiel esthétique révélé
• « infec/i/on » = diérèse → insistance sur un terme concret et choquant
• Description ambivalente et subjective « pourriture »/ »superbe », « comme une fleur » …

1. Dimension didactique : mort inéluctable

• La charogne → mise en scène pour mettre en garde le lecteur + futur « serez »
• Un poème structuré : -Impératif « rappelez-vous », «dites »

                                   -Connecteur logique « alors », « pourtant »

=Nous avons la présence d'une thèse (devenir une pourriture) donc d'une argumentation

• Comparaison « telle » dernière strophe = expliciter
• Registre polémique « derniers sacrements », « moisir parmi les ossements » = B critique l'idéalisme poétique en montrant la mort de façon concrète
• Abstrait et concret en analogie « étoile de mes yeux », « pourrir », « moisir » → expliciter également

1. La réflexion sur le rôle du poète

• La mise en scène de la charogne et l'avertissement avec le registre didactique = le poète est celui qui sait → position supérieure qui révèle l'avenir, il est le seul capable de révéler la beauté et de rendre immortel ce qui est voué à disparaître
• « ébauche »/ »terminée » =antithèse montrant que l'artiste maintient vivant et éternel ce que la nature fait pourrir
• Comparaison « ébauche » =référence au peintre. Affirmation de la fonction de l'artiste : il recrée une réalité idéale à partir de l'ébauche que laisse le réel (monde sublime) = « Tu m'as donné ta boue et j'en ai fait de l'or. »

→ Recrée la beauté à partir de la décomposition (d'où titre de l’œuvre) = il reconstitue « l'essence divine ». Il réinvente l'univers et recompose la vie.

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