La Dent d'or de Fontenelle
Commentaire d'oeuvre : La Dent d'or de Fontenelle. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar cfrisch • 7 Avril 2019 • Commentaire d'oeuvre • 3 971 Mots (16 Pages) • 1 793 Vues
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Commentaire de La Dent d’or de Fontenelle
Fontenelle (né en 1657 et mort en 1757) est à la fois un écrivain et un scientifique. Il est animé d'un esprit rationaliste qui s'est affirmé avec la lecture des ouvrages du célèbre philosophe Descartes. Passionné des sciences et animé d'une grande foi dans le progrès, ennemi de l'obscurantisme et de l'irrationnel, il est connu pour sa réputation de bel esprit et de précurseur de la philosophie des Lumières. Ses principaux ouvrages ont en effet été publié à la fin du XVIIème siècle, annonçant alors le « Siècle des Lumières ».
Histoire des oracles est un essai écrit par Fontenelle en 1687 dans lequel celui-ci dénonce la superstition en discréditant les oracles de l’Antiquité et en semant le doute sur le surnaturel. L'extrait étudié est tiré du quatrième livre d’Histoire des oracles et raconte l'histoire de la Dent d’Or, apologue servant à convaincre le lecteur qu'il faut vérifier les faits avant de chercher à les expliquer.
De ce fait, nous pouvons nous demander comment Fontenelle, à travers un texte d’apologue en usant de l’ironie dénonce l'obscurantisme des XVIIème et XVIIIème siècle.
Dans une première partie nous parlerons de l’apologue, un moyen efficace pour formuler une critique, tout en intéressant le lecteur et en contournant la censure. Puis dans une seconde partie, nous monterons que Fontenelle manie l’ironie et la satire pour dénoncer. Enfin, nous expliquerons que le texte de la dent d’or est un texte précurseur des Lumières, véhiculant une morale sur la recherche de la vérité à l’aide de sa propre raison.
I. L’apologue, un moyen efficace pour formuler une critique, tout en intéressant le lecteur et en contournant la censure :
1. Le texte de la dent d’or, un texte de l’apologue
- Apologue : texte bref véhiculant une morale à l’aide d’une partie narrative comme une anecdote qui illustre une partie argumentative.
- Le texte de Fontenelle est bien un apologue : le récit est structuré en différentes parties :
- Le récit, (l. 7 à 21), imbriqué dans la partie argumentative
- La partie argumentative (l. 1 à 4 puis 22 à 27)
- Dans le premier paragraphe, Fontenelle formule une hypothèse sur laquelle il construit son argumentation que l’on pourrait reformuler ainsi : avant toute chose, il faut s’assurer de partir d’informations véridiques.
- Puis il introduit la partie narrative et commence le récit qui illustre et confirme son hypothèse.
- Enfin, il conclut en expliquant que la quête de la vérité doit être un combat permanent car la nature de l’homme « s’accommode très bien au faux » et que la véritable bêtise est de croire en ce qui n’est pas.
C’est la présence de ces deux parties complémentaires qui permet à Fontenelle d’expliquer son raisonnement, d’intéresser et de convaincre le lecteur afin qu’il adhère à son propos.
2. La forme de l’apologue permet à Fontenelle de proposer une critique indirecte de la société tout en intéressant le lecteur :
a. Proposer une critique indirecte de la société à travers une anecdote
- L’anecdote permet à Fontenelle d’illustrer sa critique et de la rendre plus compréhensible pour le lecteur. Il choisit dans ce texte de se moquer subtilement de savants qui basent leurs recherches sur une information fausse.
- Il propose une critique à travers une anecdote en évitant la censure et les critiques
→ « fin du siècle passé » l. 5, « Allemagne » l. 6
= Indicateurs spatio-temporels qui ne concernent pas directement la France et l’époque à laquelle est publiée l’œuvre
b. Intéresser et plaire au lecteur :
- La partie narrative de l’apologue a une dimension pédagogique importante car elle rend le texte de Fontenelle à la fois instructif et plaisant, ce qui permet d’intéresser le lecteur.
- Proverbe latin « placere et docere » (plaire et instruire)
- « plaisamment » l. 5 : Adverbe indiquant au lecteur une histoire plaisante
- Fontenelle utilise des procédés d’écriture pour intéresser le lecteur et pour qu’il se sente concerné.
- Fontenelle s’adresse au lecteur au discours direct : « Figurez – vous » l. 12
→ Plaire et intéresser avec un ton familier le lecteur qui est en position d’interlocuteur et de complice.
- Il utilise l’impératif :
→ « Assurons-nous » l.1, « Figurez-vous » l.13
- On retrouve plusieurs fois le pronom personnel de la 3e personne :
- « nous » l. 1, 3, 24, 25, 26 :
→ Fontenelle prend le lecteur à parti
- Pronom « je » puis du pronom « nous » dans la même phrase (l. 22-25) : « Je ne suis pas si convaincu de notre ignorance par les choses qui sont, et dont la raison nous est inconnue, que par celles qui ne sont point, et dont nous trouvons la raison. ».
→ Rallier et inclure le lecteur dans son propos.
En plus de plaire et d’intéresser, la forme de l’apologue a surtout pour but de convaincre le lecteur
3. La forme de l’apologue permet avant tout à Fontenelle de convaincre le lecteur :
Fontenelle veut convaincre le lecteur qu’il faut appuyer tout raisonnement sur une source sûre et se servir de sa raison. Il réussit à convaincre le lecteur grâce à la forme de l’apologue en utilisant différents procédés.
a. La structure du texte est faite pour que le lecteur adhère au propos de Fontenelle :
- Pour convaincre, Fontenelle structure son raisonnement par des connecteurs logiques : « Il est vrai que » l. 1-2, « mais » l. 2, « pour » l. 12, « ni […] ni » l.13 « sinon » l. 19, « mais » l. 21, « Cela veut dire que » l. 25
- Il essaie aussi de convaincre le lecteur que son anecdote est réelle en utilisant des indicateurs temporels très précis : « En 1593 » l.7, « en 1598 » l. 9, « En la même année » l. 13, « Deux ans après » l.14, « aussitôt » l.16
b. Grâce à la forme de l’apologue, il peut expliquer directement sa pensée au milieu du récit
- Il intervient dans le récit la ligne 13 et accentue l’absurdité des raisons que les scientifiques ont inventées au phénomène de la dent d’or en disant « Figurez-vous quelle consolation et quel rapport de cette dent aux Chrétiens ni aux Turcs ! ».
- Tous les verbes du dernier paragraphe sont au présent de vérité générale ce qui permet à son discours de paraître véridique et que chaque lecteur se sente concerné.
« est », (l.22, 24), « sont » (l. 23,24), « avons » (l.25-26)
c. Certains procédés concernent directement la morale qu’il veut véhiculer sur la quête de la vérité :
- La forme du texte de la dent d’or ressemble à un protocole expérimental avec un premier paragraphe qui introduit une hypothèse : « Assurons-nous bien du fait avant que de nous inquiéter de la cause. » l. 1. Puis il commence le récit qui représenterai l’expérience (l.5-21)et il conclut par le dernier paragraphe qui vérifie l’hypothèse (l.22-27).
→ Incite à utiliser un raisonnement
- Juste après la formulation de son hypothèse, il émet une objection à son idée mais conclut en vérifiant l’hypothèse : « Il est vrai que cette méthode est bien lente […] mais enfin nous éviterons le ridicule d'avoir trouvé la cause de ce qui n'est point. » l. 1-4.
→ Rend son hypothèse plus véridique
- Nous pouvons aussi remarquer un chiasme aux lignes 1-3 :
« fait […] cause. […] cause […] fait »
→ Insiste sur l’importance de vérifier le fait avant de chercher la cause
- Nous retrouvons aussi une allégorie de la précipitation ligne 3 :« des gens qui courent naturellement à la cause et passent par-dessus la vérité du fait »
→ L’auteur transmet sa pensée en image ce qui permet au lecteur de mieux comprendre et les persuader de ne pas se précipiter.
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