Introduction sur le début de Boule Suif Maupassant

Maupassant est un auteur français de la seconde moitié du XIXe siècle, associé au mouvement littéraire du Naturalisme (qui radicalise les ambitions du réalisme). Il est l’auteur de plusieurs romans, et surtout de nombreuses nouvelles (réalistes, fantastiques), dont Boule de Suif, une des plus connues. Ce court récit a d’abord été publié en 1880 dans un recueil de six nouvelles, Les soirées de Médan (localité située en banlieue parisienne, où habitait Emile Zola). Ce recueil se voulait un véritable, et scandaleux, « manifeste » du Naturalisme, un « art poétique » de cette nouvelle esthétique littéraire provocatrice. Toutes les nouvelles de ce recueil ont un même sujet, douloureux pour l’orgueil national : la défaite de la France contre la Prusse durant la guerre de 1870, qui emportera dans la débâcle militaire le régime politique du Second Empire, et amputera la France de l’Alsace et de la Lorraine. Chaque nouvelle de ce recueil traite, avec un réalisme impitoyable et parfois narquois, de cette défaite nationale, en refusant de la montrer sous un jour idéalisé, ou patriotique et revanchard. Dans cette nouvelle, « un chef d’œuvre » d’après Flaubert, le « maître à écrire » de Maupassant, l’auteur met en scène un groupe de notables qui fuit Rouen, en 1870, lors de l’invasion prussienne de la ville. Dans la diligence qui les emporte dans la campagne enneigée loin de la cité normande occupée, ils cheminent avec une prostituée patriote aux formes girondes surnommée Boule de Suif. Bloqué par un officier prussien dans une auberge, le petit groupe réussit à convaincre la jolie péripatéticienne de céder aux avances de l’officier, malgré le dégoût que son patriotisme lui inspire pour cet officier. Grâce à son « sacrifice », la diligence peut repartir, mais ceux-là même qui l’ont incitée à céder la méprisent à présent. L’incipit de cette nouvelle évoque avec réalisme la retraite, la débâcle, d’une armée française en lambeaux, qui traverse en désordre Rouen, avant l’arrivée des prussiens victorieux. Mais cette ouverture propose aussi un portrait satirique de cette armée, ainsi que de la « garde nationale » rouennaise (constituée de bourgeois pour la défense de la ville). Vantardise, impréparation, lâcheté… sont autant de facteurs qui expliquent lucidement les raisons de cette défaite. Aussi nous nous demanderons comment Maupassant arrive à nous donner ici l’illusion du réel, tout en nous amusant et en nous suggérant une explication de cette « étrange défaite ». D’abord, cet incipit « naturaliste » propose une représentation précise, réaliste, de la débâcle de l’armée française. Mais l’emploi du registre satirique permet aussi à l’auteur d’amuser le lecteur (de lui « plaire »), de lui donner son point de vue sur les causes de cette défaite retentissante.

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