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Dissertation: argumentation

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Par   •  25 Janvier 2017  •  Dissertation  •  3 014 Mots (13 Pages)  •  1 417 Vues

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Depuis la Renaissance, le questionnement de la condition humaine, de ses valeurs et de ses défauts nourrit les grands textes de la littérature française. C’est en effet à cette époque que l’on assiste à l’essor d’un courant de pensée humaniste, poussant l’homme à atteindre un certain idéal: l’homme se devait d’être un exemple de sagesse et être avide de savoir, se distinguant des autres par sa capacité à acquérir connaissances et vertus. Cette réflexion sur l’humanité se voit nuancée au fil des siècles et donne lieu à l’apparition de textes dénonciateurs voire critiques, précurseurs d’œuvres novatrices comme L’Encyclopédie et, plus tard, de la littérature engagée. En s’interrogeant sur l’homme, les écrivains sont amenés à s’interroger sur une société car c’est en société que l’homme commun vit, or la vie en société est perfectible, soumise à des dysfonctionnements comme des frustrations ou encore des conflits. Les textes visant à dénoncer les imperfections d’une communauté ne manquent donc pas.

Il est alors légitime de se demander, à la lumière de toutes ces observations, quel genre littéraire paraît le plus adapté pour dénoncer les défauts d’une société. Les auteurs recourent généralement à l’argumentation pour défendre leur jugement, leur avis sur la société dans ce cas précis. Il s’agira de montrer en quoi le genre argumentatif est-il le plus adéquat afin de dénoncer les travers de l’être humain et de la société en général.

Pour cela, nous étudierons tout d’abord les stratégies argumentatives au service de ce genre littéraire, puis nous distinguerons deux types d’argumentation: l’argumentation directe où nous allons essentiellement nous concentrer sur l’essai et ses dérivés d’un côté, et l’argumentation indirecte, ou tout simplement apologue, de l’autre.

Les textes argumentatifs dispensent un certain nombre de stratégies afin de faire adhérer le lecteur à leur contenu. Cet objectif particulier ne concerne pas que le fond mais a aussi une influence sur la forme même du texte. Nous distinguons ainsi trois stratégies argumentatives: convaincre, persuader et délibérer.

Le locuteur va en effet chercher à convaincre son lecteur de la véracité de ses points de vue sur la société. Il va faire appel à la raison de son destinataire dans l’optique de le faire adhérer à son point de vue. Pour cela, il fournit des éléments de preuves à soutenir ou à réfuter dans un développement organisé en sollicitant les capacités intellectuelles et les capacités de raisonnement des deux camps. Cela favorise le dialogue et fait partie intégrante de la stratégie argumentative, en effet, se montrer conciliant peut amener le lecteur à reconnaître que l’argument du locuteur est irréfutable. C’est le cas par exemple du fragment 135 des Pensées de Blaise Pascal en 1670. Le ton de Pascal se fait polémique dans ce fragment visant à dénoncer le pas que prend la force sur la justice, deux notions que l’auteur oppose en début de texte pour finalement les rapprocher à la fin de son raisonnement, ponctué de phrases courtes et acerbes. En outre, il dénonce l’exercice du pouvoir humain en concluant que ces deux concepts ne peuvent pas coexister, et convainc ainsi son lecteur quant à la véracité des faits qu’il énonce.

D’autre part, le locuteur peut choisir d’adopter une autre stratégie, la persuasion, avec la même intention de faire adhérer le lecteur à ses idées. Convaincre et persuader sont synonymes dans le langage courant, or dans les genres de l’argumentation ce dernier terme revêt un tout autre sens que le premier. Au lieu d’obtenir l’adhésion de son auditoire par la voie de la raison, le locuteur va chercher à faire partager sa thèse cette fois-ci par la voie des sentiments. Par conséquent il agit sur les émotions de son destinataire en se faisant plus présent et en l’apostrophant, ce qui crée une connivence entre les deux. Dans Les Aventures de Télémaque de Fénelon, paru en 1677, par exemple, le personnage d’Adoam cherche à persuader Télémaque du caractère vicieux des peuples de la Bétique, des conquérants, en faisant une analogie avec un homme recherchant la gloire. Il fait appel aux émotions de son destinataire en usant d’un lexique du sentiment particulièrement dépréciatif: “Croit-il ne pouvoir mériter des louanges qu’en devenant violent, injuste, hautain, usurpateur, tyrannique sur tous ces voisins?”, cette énumération de défauts est une figure d’insistance ayant pour effet d’amplifier la réalité, ce qui joue en faveur de la stratégie de persuasion puisque le destinataire sera plus enclin à accepter cette vision de l’homme tant elle est marquante. Ces deux stratégies ne sont pas exclusives dans un même texte: souvent les auteurs allient la pertinence d’arguments convaincants à un style saisissant et persuasif.

Outre cela, un auteur va confronter différentes thèses afin de permettre à celui qui le lit de construire sa propre opinion à travers une délibération. Une argumentation ne serait pas riche si l’on ne réfléchissait pas à tous les aspects d’un problème donné et particulièrement autoritaire s’il était question de forcer un destinataire à y consentir sans lui permettre de fonder son propre jugement. Ainsi, l’acte de délibérer revient à établir un débat constitué de son propre jugement et celui d’autrui avant de choisir une solution. C’est une étape essentielle dans la réflexion personnelle, surtout lorsque l’auteur d’une thèse cherche à dénoncer un défaut précis d’une société, comme il est question dans Contribution à l’Histoire des deux Indes de l’abbé Raynal de Diderot en 1780, où l’auteur condamne l’hypocrisie et la cruauté de l’esclavage, en utilisant deux voix: d’un côté un “on” exclusif qui le détache des défenseurs de l’esclavage et un “je” de l’autre côté qui le représente en train d’argumenter contre ces pratiques qu’il juge inhumaines. La multiplicité des interjections et des interrogations rhétoriques donne un ton polémique à sa démonstration et la double énonciation permet d’étudier deux points de vue sur l’esclavage. Diderot délibère alors et rend son jugement: “Je hais, je fuis l'espèce humaine, composée de victimes et de bourreaux ; et si elle ne doit pas devenir meilleure, puisse-t-elle s'anéantir !”, sur un ton particulièrement virulent, Diderot laisse le choix au lecteur de partager son avis ou non au bout d’un réquisitoire organisé respectant les codes de la délibération.

Ainsi, nous avons vu que différentes stratégies argumentatives peuvent être mises en œuvre de manière à mieux disposer un destinataire à approuver

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