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Diderot, Jacques le fataliste

Fiche de lecture : Diderot, Jacques le fataliste. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  12 Juin 2017  •  Fiche de lecture  •  999 Mots (4 Pages)  •  1 354 Vues

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LA 5 : Diderot, Jacques le fataliste

Introduction :

  • Denis Diderot, un des philosophes les plus productifs du siècle des lumières
  • Penseur, romancier, dramaturge, critique et essayiste, il est à l’origine de l’encyclopédie (avec le mathématicien d’Alembert) = rassembler tous les savoirs de l’époque
  • Romancier le plus lu
  • 1ere édition posthume en France = 1796
  • Dès les premières lignes = le lecteur dérouté : loin des conversations narratives traditionnelles = Diderot s’engage dans un dialogue avec son lecteur et ne cessera d’interrompre la narration. Cet incipit frappant est ainsi représentatif du reste de l’œuvre.

Problématique :

Dans quelle mesure cet incipit atypique remet-il en question le statut du personnage ?

Reformulée : En quoi Jacques bouleverse les codes romanesques de son époque ?

  1. Un personnage insaisissable

  1. Un anti-portrait

  • Pas de nom mais un prénom : Jacques = paysan

+ 1er pronom personnel « ils » permet pas de le distinguer > indéterminé

+ fonction implicite déduite du statut du maître

  • Pas de portrait sauf boiteux >portrait banal : bribes décousues de son histoire  > analepse sur son passé de soldat l.10/14

+ histoires de ses amours : un valet peut avoir une vie amoureuse = romance de sa vie

  • Pas d’analyse psychologique mais remplacé par un dialogue stérile et de l’action : ou ils se perdent > en vain
  • Identité floue, renvoyant juste à un couple traditionnel de la littérature : Don Quichotte et Sancho Pansa.
  1. Fil décousu de son intrigue à l’image de l’errance du personnage : quelle est la liaison des idées ?

  • Un récit sans cesse repoussé, sous différentes formes : lignes 10/14 à la place du récit on à du dialogue. Récit ? Passé ? non finalement présent de narration.
  • De multiples interruptions, des coqs à l’âne : l.6 et l.8 capitaine puis cabaretier

(Ou des échos ? ) : l.6 et l.8

  • Un texte qui tourne en rond (structure cyclique) > phrases qui ne cessent d’être répétées (« là-haut », « grand mot », « amour »

l.2 à l.40 = lecteur qui intervient « Jacques commença l’histoire de ses amours » « Eh bien Jacques, où en étions-nous de tes amours ? »

  1. Dans un genre inclassable

  • Le dialogue         -     Dédoublé : lecteur et maître / auteur et valet
  • Mélangé : dialogue romanesque / dialogue théâtral
  • Autres genres reconnaissables : « qu’il est facile de faire des contes »
  1. Entre liberté et déterminisme de Jacques

  1. Un personnage libre

  • Renversement des rôles : absence de nom du maître > placé en 2eme position (dans le titre) > il n’a qu’un statut. Maître = personnage type / Valet = héros

Endormissement l.32 = comique. Curiosité dans le dialogue (ex ; « quelques questions »)

+ « et » relance bienveillante (oreille attentive) qui s’oppose à la violence/désintérêt habituels

  • Maître du récit (conteur) ; si le maître est dépendant du bon vouloir narratif de Jacques : l.26

     Stichomythies pour le plaisir de le faire languir (suspense) l.27

  • Mise en abyme du narrateur : l.29 le narrateur
  1. Un personnage déterminé (fataliste)

  • Parataxe > la force du destin : (l.10/l.14/l.29) montre l’implacable enchaînement des causes et des conséquences = tout est écrit à l’avance. (Parataxe = Quelque chose qui enlève les liens logiques entraîne une conséquence).
  • Fatalité des coups de bâton inscrite dans la tradition littéraire (personnage type de la comédie) : par son père l.11 et par son maître l.3
  • Jouet dans les mains du narrateur tel un démiurge (dieu) : l.33 « il ne tiendrait qu’à moi » restrictive : moi tout puissant.
  1. Remise en cause de l’illusion réaliste : le dessous des cartes (démystification de l’écriture romanesque)

  1. Toute puissance du narrateur/romancier (au détriment du personnage)

  • Récit des amours de Jacques sans cesse retardé ou interrompu : en guise d’ouverture on à plutôt une fin = on parle des amours mais on suppose qu’ils sont déjà finis.
  • Chronologie perturbée : on parle d’abord du capitaine et non pas du cabaretier
  • Informations lacunaires (informations qui manquent) : ellipse de la bataille l.10/l.14

Aucun souci de vérité. Totale liberté du créateur face aux conventions et au déterminisme ! C’est lui le véritable maître de Jacques et du lecteur !

  • Dénonciation du caractère artificiel de la création littéraire
  1. Jeu avec les attentes du lecteur

  • Provocation amusée = désinvolture d’un début in médias res : pas de crédibilité/rendre le roman crédible = rien à faire « d’où venait-il ? » « du lieu le plus prochain »
  • Décontraction du langage : discours indirect emboîtés de la ligne 3
  • Ironie le maître s'endort au récit qui pourtant est l'objet de toute notre attention + l.34/38 narrateur se moque du lecteur
  • Le personnage du maître est une enveloppe vide et sans intérêt : cliché de paroles "c'est un grand mot que cela") ; "et il avait raison" = paroles vides de sens. Il est niais et ne sert que de relanceur.

  1. Au point que le lecteur devient un personnage dans une sorte de prosopopée : nouveau pacte de lecture

  • Il est traité par le narrateur avec désinvolture : il ne répond à ses questions légitimes que par des platitudes ("par hasard comme tout le monde"), de nouvelles questions ("Est-ce que l'on sait où l'on va ?") ou encore des provocations ("Que vous importe ?"), on à pas plus d’info
  • Figure du lecteur caricaturale, construite le narrateur : lecteur exigeant, impatient, conventionnel, conformiste, artificiel = idiot toujours dans l’attente > veut tout savoir

 

Conclusion :

  • Diderot écrit ainsi une œuvre originale en intervenant comme auteur dans le récit, ne laissant jamais le lecteur douter du caractère fonctionnel du roman.
  • Dès l’incipit, Jacques le Fataliste et son maître troublent, frustrent et amusent sans d’interroger à la fois le statut de l’auteur mais aussi sur questions sociales philosophiques et religieuses alors remise en cause.
  • Diderot laisse le lecteur rentrer dans les coulisses de son imagination

Cet incipit prend presque des allures de manifeste où l’auteur revendique la liberté de créer.

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