Commentaire de texte sur le passage de L'Eldoro dans Candide de Voltaire

Ce passage de Candide se situe au chapitre 18 qui forme avec le chapitre précédent, au centre du conte, une parenthèse dans la description du monde rongé par le mal. Il évoque le monde extraordinaire de l’Eldorado.

Nous montrerons que l’Eldorado apparaît comme un univers splendide et parfait dans de nombreux domaines, mais que ce modèle ainsi présenté permet à Voltaire d’émettre une critique.

 I ) Un univers merveilleux

Candide et Cacambo sont conduits dans la ville d’Eldorado puis à la cour du roi : ils y découvrent un monde merveilleux et véritablement extraordinaire.

1 ) Un monde imaginaire de la démesure

Cet univers est associé à la grandeur, à la démesure 

• Les dimensions de la ville apparaissent colossales : exagération des chiffres avec  ces différentes hyperboles  « 220 pieds de haut », « jusqu’aux nues », « mille colonnes », « deux mille pas ».
• Cet univers apparaît véritablement comme merveilleux : le carrosse de Candide et Cacambo est tiré par des moutons qui volent ,caractère d'ailleurs un peu comique , puisque les moutons sont des animaux de ferme et se veulent moins nobles que des chevaux.
• C'est un monde merveilleux, idéal, parfait, extraordinaire, dédié au plaisir des sens et au bien-être, mais désigné comme inconcevable : « il est impossible d’exprimer quelle en était la matière », « ce qui le surprit davantage »

→ Un monde improbable, irréaliste et imaginaire qui appartient au genre du conte , on retrouve notamment les caractéristiques du comte  telles que le carrosse ou encore le palais

2 ) Un monde parfait et luxueux

  L'Eldorado est un pays agréable , un  monde qui a une « supériorité prodigieuse ».

• On retrouve de nombreux termes élogieux, mélioratifs soulignant la perfection du pays et font de lui le meilleur des monde : « belles filles », « grâce inimaginable » ; mœurs policées : « poliment » ; pureté et abondance : « eau pure », « toute pleine ».
• C'est un véritable modèle d'architecture et d'organisation . facilité de transport (les moutons volants !), salubrité publique avec la présence de bains publics, édifices publiques majestueux, marchés et grandes places, fontaines à la fois belles et utiles.
  Un urbanisme parfait pour une ville où il fait bon vivre !
•  On retrouve des matières  luxurieuse et des odeurs agréables : « or et pierreries », « orné », « duvet de colibri »,  « une odeur semblable à celle du gérofle et de la cannelle », « liqueur de canne de sucre » ; La musique  participe  elle aussi à l' enchantement des sens: « mille musiciens selon l’usage ordinaire » Cette hyperbole montre une fois de plus l'immensité et la grandeur de la ville

→ Un univers imaginaire et parfait qui correspond bien à la définition de l’utopie, c’est-à-dire un monde imaginaire et idéal qui se présente comme un modèle.

3 )Un sanctuaire de convivialité et de paix

Les citoyens peuplant l' Eldorado sont accueillants et vivent en harmonie :

• En effet  Il règne une certaine hospitalité et générosité  comme le montre les verbes d'actions, adverbe et adj suivants: « reçurent », « les conduisirent », « les vétirent », « poliment »,, « grâce inimaginable ».
• On remarque aussi que les rapport de protocoles Simplicité des rapports de protocole :
  « L’usage est d’embrasser le roi et de le baiser des deux côtés », « Candide et Cacambo sautèrent au cou de sa majesté ». Pas de solennité, de codes, de rites : une familiarité conviviale.
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  De plus il y a une totale absence de répression marquée par de nombreuses négations : « il n’y en avait point », « on ne plaidait jamais », « on lui dit que non ». De façon implicite suggère l’absence de violence et de délits.
• L’égalité des sexes suggérée par la présence de femmes dans certains corps classiquement réservés aux hommes : « vingt belles filles de la garde », « les grands officiers et les grandes officières de la couronne ».

→ Description d’un monde exemplaire. Mais l’utopie sert à l’auteur à développer une critique.

II ) Entre critiques et leçons

1 ) la critique du monde contemporain

Par contraste la perfection du monde de l’Eldorado vient souligner l’ampleur du mal qui ravage et ronge le monde, elle montre les défauts de la société contemporaine de Voltaire.

• L'auteur dénonce les villes laides, encombrées, puantes de la fin du XVIIIe siècle, l’allusion aux rapports sociaux rongés par l’égoïsme, la méfiance, la xénophobie synonymes d’intolérance…
• En montrant aussi l’absence de répression et de justice, Voltaire stigmatise peut-être aussi la trop forte répression qui règne en France en matière de censure, ou de condamnation de délits…
• Mais l’univers de la cour, peut-être celle de Louis XV, semble fortement critiqué. Le protocole de cour auquel est habitué Candide est ridiculisé : l’énumération que son esclave fait des différents rites traduit l’absurdité comique de la flatterie dont sont coutumiers les courtisans : « Cacambo demanda à un grand officier comment il fallait s’y prendre pour saluer Sa Majesté : si on se jetait à genoux ou ventre à terre ; si on mettait les mains sur la tête ou sur le derrière ; si on léchait la poussière de la salle ; en un mot, quelle était la cérémonie ».

→ Voltaire fait preuve d'habilité en apportant son jugement tout en évitant la censure. Pour cela il cache sa critique derrière un simple comte de prime abord  

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