Commentaire Le Soleil des Scorta, Laurent Gaudé, Le Banquet
Commentaire de texte : Commentaire Le Soleil des Scorta, Laurent Gaudé, Le Banquet. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar tapeworm • 18 Décembre 2015 • Commentaire de texte • 1 974 Mots (8 Pages) • 15 009 Vues
Lecture analytique : « le banquet »
« Ce jour-là resta gravé […] exagération. » p127
Intro : le contexte. Rafaelle qui a décidé quelques années auparavant de porter le nom de Scorta et qui fait désormais partie intégrante de la famille a restauré un trabucco, une plate-forme de pêche faite de planches de bois. Il invite toute la famille, frères, sœurs, neveux et nièces au premier et seul banquet du clan Scorta . Tous partagent le bonheur d’être ensemble et de pouvoir enfin jouir de la vie.
Problématique : par quels procédés l’auteur fait-il de ce banquet un moment de bonheur inoubliable pour les Scorta . ?
1. La description d’un banquet
a> La couleur locale
Nous voyons bien que Laurent Gaudé porte une affection toute particulière au contexte d el’Italie du Sud. Cette Italie ne constitue pas simplement un contexte romanesque comme les autres. On ressent dans l’écriture une véritable jouissance à évoquer cette culture italiene (Laurent Gaudé est marié à uen italienne).
Pour commencer, le repas suit à la lettre le déroulement d’un repas typique. Celui-ci structure d’ailleurs le passage. On note ainsi l’évocation des antipasti. Puis l’apparition des pâtes et du risotto (primi piatti). Une pause durant laquelle les conversations vont bon train. Puis les secondi piatti.
Notons d’ailleurs l’emploi de termes en italien qui contribue à renforcer le pittoresque de l’épisode. Tout ceci a lieu dans le trabbucco de rafaelle. Des Troccoli à l’encre de sèche sont servis. Notons que cet accommodement sieppa de nere n’est pas particulièrement commun en France.
Plus loin dans le passage, les personnages repus s’exclameront panca piena.
On peut même voir dans la métaphore du vin comparé au sang du christ une allusion à la fois religieuse, bien entendu mais aussi une évocation indirecte d’un célèbre vin italien le Lacrima christi même si celui-ci est élaboré dans une autre région,
b> L’abondance
- la première fois qu’ils mangèrent ainsi. Le ainsi recouvre à la fois l’idée d’un clan totalement rassemblé. Mais aussi évoque le caractère pantagruélique du repas. Surtout pour des individus d’origine si modeste et au passé si difficile.
- une dizaine de mets (antipasti)
- effet d’accumulation liée à la liste des plats. On remarque de nombreuses phrases nominales comme « Des pontes de poulpe ; Une salade de tomate et de chicorée. Quelques fines tranches d’aubergine grillée. Des anchois frits. ». Une deuxième phase énumérative de même ordre et avec les mêmes phrases nominales est également présente pour les secondi piatti.
Importance des pluriels. Rien n’est envisagé ou presque au singulier.
Adjectifs à la portée parfois hyperbolique évoquant l’abondance comme « grands plats » et « énormes saladiers fumants » « cinq énormes plats remplis », un « plein saladier »
D’ailleurs, les assiettes ne semblent jamais se vider ou plutôt magiquement se remplir continuellement comme les tonneaux des Danaïdes. (« vérifiant que son assiette ne se vide jamais »).
Pour résumer, cette abondance a évidement quelque chose d’excessif (« exagération » comme le reconnaissent d’ailleurs les femmes à la tablée (« que c’était trop).
A cette abondance quantitative est liée également une idée de repas exceptionnel par la qualité de mets dont certains ne font pas souvent voire jamais apparition à la tablée de personnes si modestes (et même quelques langoustines).
II. Les significations de ce repas
a> Un moment de bonheur fondateur.
C’est la réunion d’une famille voire d’un clan si l’on considère que Raffaele a adopté et a été adopté par les Scorta.
- « Ils se regardèrent un temps, surpris de constater à quel point le clan avait grandi.
Chacun n’est pas perçu dans son individualité mais plutôt comme le maillon d’une véritable chaine familiale. Hormis Raffaele et Guiseppina, les organisateurs de ce repas, aucun des scorta n’est évoqué à travers son prénom.
Un événement Trans générationnel comme l’indique l’énumération « pour tous, adultes comme enfants ». Un événement qui lie donc le passé et les perspectives d’avenir, la perpétuation d’une lignée avec les enfants. D’ailleurs par moments, laction semble vue par ceux qui incarne la descendance, l’avenir de la famille (L’oncle Faelucc avait fait les choses en grand »).
- C’est donc un acte fondateur qui restera dans une forme de mémoire collective (« gravé dans la mémoire des Scorta ». Une forme de communion (référence au sang du christ).
Rayonnait de bonheur et de gourmandise : association de deux termes. Le bonheur est lié à la fois à la réunion mais aussi à la satisfaction des sens à travers un repas exceptionnel au sens étymologique du terme : qui n’aura sans doute jamais lieu de nouveau.
Nous l’avons vu, ce repas ce caractérise par son abondance pantagruélique.
Le bonheur réside dans cette satisfaction des sens à travers ce repas : la vue (« moules grosses comme un pouce », le toucher avec le plaisir des textures « chair ferme qui fond sous la langue » et bien évidemment le gout.
Le repas devient une sorte de parenthèse totalement enchantée à même de générer l’enthousiasme (« hourras »). Il ne s’agit rapidement plus de satisfaire sa faim (« tous étaient rassasiés ») mais surtout de profiter d’un moment que l’on devine éphémère d’où un évident manque de mesure, de modération. (« C’est le moment où l’appétit est ouvert et l’on croit pouvoir manger pendant des jours » - « comme si c’était un plaisir plus grand de parler des nourriture lorsque l’on mange » - il faut manger avec joie et modération)
b>Un moment symbolique.
Protégé du soleil mais celui-ci reste menaçant.
Evocation d’une réalité sociale spécifique (dans le sud, la aprtie la plus pauvre de l’Italie)
Tant qu’on peut – double lecture.
Carpe diem menace du pire , des drames à venir.
Conclusion pour le roman et d’une manière génrale, les repas chez les gens modestes.
Le repas de gervaise
L’assomoir.
Par exemple, il y eut là un fameux coup de fourchette : c’est-à-dire que personne de la société ne se souvenait de s’être jamais collé une pareille indigestion sur la conscience. Gervaise, énorme, tassée sur les coudes, mangeait de gros morceaux de blanc, ne parlant pas, de peur de perdre une bouchée ; et elle était seulement un peu honteuse devant Goujet, ennuyée de se montrer ainsi, gloutonne comme une chatte. Goujet, d’ailleurs, s’emplissait trop lui-même, à la voir toute rose de nourriture. Puis, dans sa gourmandise, elle restait si gentille et si bonne ! Elle ne parlait pas, mais elle se dérangeait à chaque instant, pour soigner le père Bru et lui passer quelque chose de délicat sur son assiette. C’était même touchant de regarder cette gourmande s’enlever un bout d’aile de la bouche, pour le donner au vieux, qui ne semblait pas connaisseur et qui avalait tout, la tête basse, abêti de tant bâfrer, lui dont le gésier avait perdu le goût du pain. Les Lorilleux passaient leur rage sur le rôti ; ils en prenaient pour trois jours, ils auraient englouti le plat, la table et la boutique, afin de ruiner la Banban du coup. Toutes les dames avaient voulu de la carcasse ; la carcasse, c’est le morceau des dames. Madame Lerat, madame Boche, madame Putois grattaient des os, tandis que maman Coupeau, qui adorait le cou, en arrachait la viande avec ses deux dernières dents. Virginie, elle, aimait la peau, quand elle était rissolée, et chaque convive lui passait sa peau, par galanterie ; si bien que Poisson jetait à sa femme des regards sévères, en lui ordonnant de s’arrêter, parce qu’elle en avait assez comme ça : une fois déjà, pour avoir trop mangé d’oie rôtie, elle était restée quinze jours au lit, le ventre enflé. Mais Coupeau se fâcha et servit un haut de cuisse à Virginie, criant que, tonnerre de Dieu ! Si elle ne le décrottait pas, elle n’était pas une femme. Est-ce que l’oie avait jamais fait du mal à quelqu’un ? Au contraire, l’oie guérissait les maladies de rate. On croquait ça sans pain, comme un dessert. Lui, en aurait bouffé toute la nuit, sans être incommodé ; et, pour crâner, il s’enfonçait un pilon entier dans la bouche. Cependant, Clémence achevait son croupion, le suçait avec un gloussement des lèvres, en se tordant de rire sur sa chaise, à cause de Boche qui lui disait tout bas des indécences. Ah ! Nom de dieu ! Oui, on s’en flanqua une bosse ! Quand on y est, on y est, n’est-ce pas ? et si l’on ne se paie qu’un gueuleton par-ci par-là, on serait joliment godiche de ne pas s’en fourrer jusqu’aux oreilles. Vrai, on voyait les bedons se gonfler à mesure. Les dames étaient grosses. Ils pétaient dans leur peau, les sacrés goinfres ! La bouche ouverte, le menton barbouillé de graisse, ils avaient des faces pareilles à des derrières, et si rouges, qu’on aurait dit des derrières de gens riches, crevant de prospérité.
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