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Une robe orientale

Étude de cas : Une robe orientale. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  22 Mars 2022  •  Étude de cas  •  1 717 Mots (7 Pages)  •  386 Vues

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Une robe orientale

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Soirée iranienne de Claire Fontaine et Jacynthe Delahaye. Piano en sourdine.

Bruxelles, 31 mai 2018

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Cette robe que je porte a une histoire. Voulez-vous que je vous la raconte ?

L’histoire se déroule 15 ans avant la fin du 20ème siècle, en l’an de grâce 1986.

Elle se déroule en Iran, le pays des nobles Aryens, de l’ancienne Perse, des roses et du vin, du soleil et des femmes aux yeux de gazelle, et surtout le pays des poètes : Omar Khayam, Saadi, Rumi, Hafez. Ce sublime royaume de Perse est fondé en -550 avant Jésus-Christ par Cyrus le Grand, Roi de la dynastie des Achéménides. Ce Roi était grand, il vénérait le prophète de la tolérance : Zarathoustra, Zoroastre. Vous allez voir que cette grande terre, encore méconnue de bien des occidentaux, est riche d’une histoire très mouvementée. Convoitée à volonté, conquise par Alexandre le Grand de Macédoine, par les musulmans, par Tamerlan, par Gengis Khan, elle a porté l’âge d’or des Sassanides. Elle a accueilli les Arméniens, mais aussi les Kashkaïs, ou la dynastie des Qadjar. Tiens, Kashkai, Kadjar cela vous dit quelque chose ? He bien Oui ! Ces noms de grandes tribus ont été ressuscités dans des marques de voitures Nissan et Renault ! Pourquoi me direz-vous ? Eh bien c’est une histoire de nomadisme pardi ! 

Reprenons le fil de notre histoire. Nous voici en 1925 : une dynastie en chasse une autre. Cette dernière est usurpée. C’est celle des Pahlavi et de son Shah, Rezah, chassé de son « trône du paon » en 1979 par un grand corbeau noir, exilé à Paris, qui attendait lui aussi son heure de gloire : l’Ayattolah Khomeiny, religieux Chiite, auto-proclamé « guide suprême de la révolution ». Il prend donc le pouvoir et instaure une théocratie.

Sous le soleil de plomb, c’est donc une deuxième chape qui plonge dans une pénombre sourde et triste ce grand pays à la langue indo-européenne si douce à entendre et certainement à parler. La loi islamique étouffe tout sur son passage et voile les visages et les corps féminins dans de grands tissus noirs : les loups sont  entrés dans Téhéran, les corbeaux les suivent et épient. Tous les musées se ferment sauf celui du tapis et du verre.  On ne danse plus, on ne chante plus, le vin s’ennuie de ne plus couler dans les gorges. Le pays se fane telle une tulipe noire, se ferme « au nom de Dieu, selon la loi des hommes », disent-ils. L’important n’est plus la rose mais le voile, le voile noir-jais, noir-ébène, noir-corbeau. Le noir est l’absence de lumière. Un objet noir piège toute la lumière. Le noir tue la couleur, c’est l’absence d’émotions et de lumière.

Pendant qu’en Europe, en terre chrétienne, on bâtit  Notre-Dame de Paris, en Iran on ne célèbre plus les grands poètes des 11-12-13-14èmes siècles : Khayam, Hafez, Saadi, Rumi, chantres du vers et du verre (de vin), qui ont si bien décrit la douceur de vivre de ce vaste jardin de roses, de noyers et de grenades.

A cette époque, seuls quelques rares voyageurs étrangers sont tolérés en cette noble terre : les dignitaires des pays étrangers et quelques hommes d’affaires, pour négocier surtout le prix du pétrole et des armes. Israël et les Etats-Unis sont devenus les bêtes noires tout comme l’Irak voisin qui martyrise les jeunes et endeuille leurs familles. L’exil commence pour ceux qui peuvent encore fuir, le pays se vide de ses habitants les plus éduqués : Les Pahlavi et leur cour partent en Californie, les Baktiar en France, les Gemayel retournent au Liban,  le dissident Ahmad Aminian arrive en Belgique.

Au même moment, en Europe, une femme d’ambassadeur décide de faire le tri de sa garde-robe, enrichie de nombreuses pièces achetées et portées au cours de sa vie de nomade confortable en Afrique et au Moyen-Orient.

Cette femme, fluette de corps mais forte de tête, réfléchit à qui elle pourrait offrir cette riche étoffe de soie.  Elle pense à une nièce au physique proche du sien. Cette jeune diplômée lui a raconté son projet de long voyage  en Asie en commençant loin, à l’extrême-Est, par un mariage à Bali, puis en remontant vers la Thaïlande, l’Inde, le Népal et enfin en automne, une halte privilégiée, toujours au Levant, chez son Oncle Victor en Iran.

La jeune fille remercie sa tante et roule le léger et peu encombrant cadeau dans le fond de son sac à dos en se disant que ce joli petit morceau de brocart lui servira davantage de doux oreiller que de parure corporelle. Tout en pensant à cette petite maxime qui dit : « Ou bien parais telle que tu es, ou bien sois telle que tu parais » sans savoir que ce mot venait du célèbre poète persan du 13ème Siècle, le mystique Rumi.

Automne 1986. Voilà déjà 6 ans que Khomeiny règne sur l’Iran. Les fleurs ne sont plus chantées. Les mollahs prient, boivent du yaourt et critiquent l’Occident et sa culture. les Pasdarans, les gardiens de la Révolution, surveillent les tenues des femmes et distribuent le code vestimentaire et de conduite dans les lieux publics : pas de chair, pas de cheveux qui dépassent, signe de prostitution, pas de rouge à lèvres, pas de bijoux, pas de talons, pas de chevilles nues, pas d’ostentation à l’horizon, pas d’alcool, pas de,  pas de, pas de… pas de VIE ! Omar Khayam, le chantre du vin,  honni aujourd’hui, écrivait déjà au 11ème siècle : « boire du vin, étreindre la beauté vaut mieux que l’hypocrisie des dévots »…

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