Rabelais / Gargantua
Dissertation : Rabelais / Gargantua. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar pichaud.raphael • 7 Mars 2022 • Dissertation • 3 371 Mots (14 Pages) • 2 419 Vues
PICHAUD
Raphaël
102
Français
Dissertation
Dès le Prologue, Rabelais décrit son œuvre, Gargantua, comme étant grotesque et comme devant sa perfection au rire. Or, durant le Moyen-Age, le rire n’est pas bien vu car il est situé du côté du diable et du « bas corporel ». Il représente donc ce qui risque de nous éloigner de Dieu. Toutefois, derrière cette exubérance du rire, se cache une réflexion humaniste, c’est-à-dire que le rire passe du côté de l’esprit et c’est pour cela que cette œuvre peut être comparé à un « philosophe ». En effet, lorsque Rabelais publie Gargantua en 1534, nous sortions du Moyen-Age et rentrons dans une époque qui cherche à retrouver le niveau d’humanité de l’Antiquité, et ceci par le biais du mouvement humaniste. Rabelais nous dit ensuite que son roman méprise «tout ce pour quoi les humains perdent le sommeil, courent, travaillent, naviguent et bataillent tant ». Cette énumération semble se rattacher aux entreprises dans lesquelles se lancent les humains et dans lesquelles ils agissent sans penser. Il invite donc l’homme à s’éloigner de l’action et à se concentrer sur la réflexion en nous disant que son œuvre est remplie « d’une céleste et inestimable drogue » et d’une « vertu merveilleuse » ce remède venant du ciel et cette force morale surnaturelle peuvent ainsi s’apparenter à la bien-pensance de l’humanisme. Ainsi, son œuvre est comparable au philosophe Socrate, un des plus grands esprits de notre civilisation, car comme l’a dit Lavoisier « Rien ne se perd, rien ne se crée : tout se transforme », et c’est pour cela que tout ce qui a été « perdu » dans son apparence physique s’est retrouvé « transformé » dans son grand esprit.
Ainsi, en étudiant ce passage du Prologue, nous pouvons nous éclairer sur notre lecture de l’œuvre et nous demander dans quelles mesures cette œuvre est grotesque, mais nous devons aussi opposer cette absurdité avec toutes les critiques qu’elle cache tout en montrant la solution qui est l’humanisme.
Tout d’abord, nous montrerons que Gargantua est une œuvre grotesque grâce à une omniprésence du rire.
Ensuite, nous verrons comment ce rire cache une critique de la société du XVI siècle.
Enfin, nous nous demanderons si le rire ne permet pas également de nous ouvrir les portes du savoir grâce à l’humanisme.
Tout d’abord, l’œuvre de Rabelais peut être qualifié de grotesque grâce à la présence du gigantisme. Effectivement, nous remarquons que le choix d’utiliser des géants en tant que personnages principaux n’est pas anodin car il permet à l’auteur d’utiliser des exagérations à effet comique. En effet, nous relevons de nombreuses hyperboles tout au long du récit comme par exemple le nombre de vache nécessaire pour faire allaiter le jeune Gargantua ou les quantités astronomiques de nourriture qu’il ingurgite pour satisfaire ses besoins nutritionnels. Ce gigantisme permet aussi d’interminables énumérations comme par exemple au chapitre VIII, où Rabelais nous fait une description des habits de son héros en insistant sur leurs dimensions improbables et sur les gigantesques quantités de matières premières requises pour leur conception. Ces exagérations, ces énumérations et ce genre de chapitre insistant sur des énormes quantités sont typiques de l’humour rabelaisien, et leur omniprésence rendent cette œuvre réellement grotesque.
Puis, le gigantisme vient créer un décalage avec la réalité. En effet, à plusieurs reprises, le gigantesque Gargantua procède à des actions inimaginables pour un simple humain. Nous ne pouvons malheureusement pas toutes les citer mais les plus marquantes sont celles où il mange par accident les pèlerins dans une salade, qu’il finit par recracher car l’un d’entre eux a accidentellement planté son bâton dans une carie de Gargantua. Puis, il y a le passage lors duquel Gargantua se fait bombarder par les canons de Picrochole, mais ça n’a pas l’air de le déranger, et il se débarrasse de ceux rester dans ses cheveux comme si de rien n’était. Ainsi, le gigantisme permet de nous laisser à lire des situations invraisemblables pour un humain lambda, et leur folie nous prête à rire, d’où le caractère grotesque de l’œuvre.
Ensuite, nous remarquons l’apparence grotesque de l’œuvre au travers de l’humour du bas-corporel et des plaisirs du ventre et de la boisson. Effectivement, nous remarquons de nombreuses références aux excréments de la part de l’auteur humaniste, qui était auparavant médecin, et qui, par conséquent connaît très bien la manière dont fonctionne le corps. Nous le constatons dès le début du récit, car la naissance du protagoniste était dans un premier temps confondue avec une indigestion de tripes de sa mère Gargamelle, et les premiers mots de Gargantua sont «À boire ! À boire ! À boire ! ». De plus, nous remarquons un rire centré sur le bas corporel car Gargantua urine à plusieurs reprises dans des situations improbables, notamment lorsqu’il urine sur les Parisiens qu’il en noie 260 418. Puis il manque de noyer les pèlerins en leur urinant dessus, et enfin, sa jument urine sur les soldats de Picrochole et en noie une grande partie. Pour finir ce rire basé sur les plaisirs du ventre se remarque dans l’un des passages les plus rabelaisiens de l’œuvre, le Chapitre V, qui nous présente une longue discussion avec des plaisanteries liées à la nourriture et au plaisir de l’ivresse. Nous voyons donc qu’au travers de ces nombreuses situations, Rabelais cherche donc tout simplement à faire rire le lecteur, et l’absurdité de ces situations témoigne du caractère grotesque du roman car ce rire semble plutôt s’adresser à un enfant.
Par ailleurs, ce caractère grotesque se remarque car Rabelais utilise toutes les ressources de la langue pour faire rire le lecteur. Nous le voyons au travers des noms choisis pour les personnages qui présentent en fait des jeux de mots. Effectivement, les noms des trois géants : Grandgousier, Gargamelle et Gargantua signifient en fait qu’ils ont une grande gorge, le plus flagrant est le nom du père car gousier veut dire gosier donc littéralement arrière gorge. Leur nom sont donc relatifs à la nourriture, donc aux plaisirs du corps, d’où le caractère grotesque du récit.
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