Phèdre de Jean Racine
Dissertation : Phèdre de Jean Racine. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Simon Essayouti • 24 Juin 2018 • Dissertation • 1 965 Mots (8 Pages) • 1 495 Vues
Dissertation de français : Phèdre de Jean Racine
« Dans le déroulement tout psychologique de la pièce, non seulement l’efficacité du destin n’apparaît guère, mais encore il semble que le personnage utilise l’image de la fatalité, tantôt comme un moyen d’action, tantôt comme une excuse ou un déguisement de ses faiblesses. »
Raymond Picard
« La fatalité, c'est l'excuse des âmes sans volonté »[1]. Tels sont les mots de Romain Rolland, écrivain et philosophe du début du 20ème siècle. Nous retrouvons également cette idée d’excuse par la fatalité dans l’oeuvre de Racine, Phèdre. Cette dernière est tirée de la mythologie grecque et raconte l’amour impossible car incestueux de Phèdre, femme du roi d’Athènes, pour Hippolyte, son beau fils. Dans cette pièce, Jean Racine a ajouté une grande richesse à la tragédie classique. En effet, il a apporté une dimension psychologique aux personnages, ce qui a pour but de rapprocher les spectateurs aux personnages et de transmettre des émotions. De plus, cela rend les personnages plus complexes donc plus intéressants. Comme le dit Raymond Picard dans la préface de Phèdre : « Dans le déroulement tout psychologique de la pièce, non seulement l’efficacité du destin n’apparaît guère, mais encore il semble que le personnage utilise l’image de la fatalité, tantôt comme un moyen d’action, tantôt comme une excuse ou un déguisement de ses faiblesses. » En d’autres mots, le destin est une série imprévisible d’événements sur laquelle les personnages n’ont aucune emprise. Et la fatalité, dans le cas de Phèdre l’aveuglement dû à une passion, est utilisée à deux fins. Soit afin d’agir, soit comme prétexte. Comme quand elle est aveuglée par sa passion amoureuse et qu’elle ne va même pas essayer de combattre cette ardeur dévorante pour Hippolyte. Elle préfèrera se taire plutôt qu’avouer à Thésée son crime. Dans la citation de Raymond Picard deux autres opposition peuvent être soulevée : le libre arbitre et le jansénisme. En effet, le libre arbitre est l’idée de libre choix pour les personnes. Chacun a le choix et c’est à lui de prendre le bon, au contraire d’une vision janséniste. Effectivement, le jansénisme, mouvement religieux dans lequel Jean Racine a grandi, revendique une prédestination des événements, une ligne tracée pour chacun. Cela signifie que malgré tous les efforts qui pourraient être mis en place, la fatalité du destin l’emportera toujours. Donc les élus le sont à partir de leur conception jusqu’au jugement dernier et les damnés également. Comme par exemple, Phèdre qui est constamment tiraillée entre choisir de parler ou se taire ou encore choisir entre sa raison ou sa passion. C’est pour cela que nous sommes en droit de nous poser les questions suivante : Est-ce que le destin s’applique sur Phèdre ou non et comment utilise-t-elle cette fatalité ?
Afin d’y répondre, nous procéderons comme suit. Tout d’abord, nous allons remettre en question l’application du destin dans la pièce, puis discuter dans quel mesure le destin s’applique à Phèdre dans l’oeuvre de Racine et illustrer l’utilisation de la fatalité par l’héroïne.
Tout d’abord, dans Phèdre, la destinée des personnages ne s’appliquent pas car certains d’entre-eux sont promis à un avenir brillant ou funeste qui au final n’aboutit pas. Selon la définition janséniste du terme, le destin est écrit à l’avance et aucun des actes fait sur terre ne changera le jugement divin. Cela signifie qu’aucun rachat est possible. Dans le cas de Phèdre, la malédiction familiale pèse sur elle sauf que nous remarquons qu’à plusieurs reprises elle a le choix de parler ou de se taire. C’est donc le libre arbitre de Phèdre d’avouer et de dissimuler les secrets. Par exemple, elle a le choix de révéler ou non à Oenone son amour pour Hippolyte. Elle préfèrerait d’abord mourir plutôt que révéler cette inavouable crime. Mais après une discussion avec sa nourrice elle décide lui avouer qu’elle aime son beau-fils « J’aime… À ce nom fatal, je tremble, je frissonne. J’aime …[…] C’est toi qui l’as nommé » (vers 261 à 264). Cet aveux fut difficile pour Phèdre mais elle ne la pas dit, elle a fait deviner à Oenone de qui il s’agissait. Ensuite, nous constatons également qu’au moment de la révélation à Thésée, durant laquelle Oenone a préféré blâmer Hippolyte pour protéger sa maîtresse, Phèdre aura le choix de dire la vérité mais rongée par la jalousie, cette dernière va se taire et par la même occasion tuer indirectement Hippolyte. En effet, quand Phèdre apprendra qu’Hippolyte aime Aricie (vers 1187 et 1188) elle reviendra sur sa décision de tout avouer à son mari (acte 4 scène 5). Phèdre pensera pourquoi défendre celui qui aime une autre femme qu’elle et celle qui a volé le coeur d’Hippolyte « Je suis le seul objet qu’il ne saurait souffrir ; Et je me chargerais du soin de le défendre ? » (vers 1212 et 1213). Une fois de plus Phèdre avait le choix. Elle pouvait tout avouer et sauver Hippolyte, elle ne l’a pas fait. Puis, dans le cas d’Hippolyte est promis a un avenir de héros car son père, Thésée, est lui-même un grand héros. Son exploit le plus héroïque est d’avoir tuer le Minotaure. Cependant, Hippolyte va fauter et va déshonorer sa famille en aimant Aricie, car elle est issue d’une famille ennemie. Par conséquent, la prédestination d’Hippolyte à être un héros va s’altérer. Mais ce qui va sceller la mort d’Hippolyte, c’est le faux aveux d’Oenone à Thésée afin de protéger sa maîtresse. A la scène 1 acte 4, la nourrice va prétendre qu’Hippolyte aime Phèdre. Dans la scène suivante, le roi d’Athènes va maudire son fils « J’abandonne ce traitre à toute ta colère » (vers 1074). Comme nous l’avons constaté le destin ne s’applique pas de manière systématique. En effet, Phèdre avait le choix de laisser Oenone mentir a Thésée. De plus, elle a eu le choix de parler ou se taire mais elle n’a rien fait. Dans le cas d’Hippolyte, bien que son père soit un immense héros et qu’il soit donc lui aussi prédestiné à être un héros, il va en être tout autrement. Cependant, la narration de sa mort, bien que tragique, va quand même lui donné un côté héroïque « J’ai vu, Seigneur, j’ai vu votre malheureux fils Trainé par les chevaux que sa main a nourris », (vers 1547 et 1548) et par conséquent son honneur.
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